Conseils lecture
Stress a 37 ans, il est réalisateur et a une idée en tête, concevoir un film sur son quartier « Le panier », ou plus exactement sur ce qu’il était avant la « gentrification », quand sa bande et lui zonaient sur un banc en fumant des joints, un quartier populaire. Celui qui accueillait toute la misère de Marseille, loin des clichés d’aujourd’hui, vitrine de l’office de tourisme.
Stress, il voudrait tirer le portrait de cette époque révolue, retrouver ses potes et leur demander de témoigner, avant que son ancien quartier ne devienne définitivement un Disneyland pour les touristes que vomissent les paquebots chaque jour. Seulement Stress passe ses soirées de fêtes en fêtes vaguement à la recherche de financements pour son projet, parce que le fond du problème c’est qu’il est trop intransigeant avec les autres et pas assez avec lui-même… En attendant, quand il a besoin de thune il filme des mariages orientaux dans les quartiers nord.
Un merveilleux voyage à Marseille et dans le temps, fait d’allers-retours entre la ville d’hier et celle d’aujourd’hui. Une écriture percutante à l’image de ce personnage sans concessions. Un récit qui vous emporte et une force narrative du quotidien, les odeurs, la bouffe, les fringues, la musique, des habitudes et des attitudes décryptées à la loupe. Deux sociétés antagonistes, celle des pauvres d’hier, sans papiers, et des riches d’aujourd’hui, bobos, artistes, Parisiens immigrés, qui cohabitent à quelques années de distance. Un travail d’ethnographe moderne et une grande histoire d’amour, celle du héros et de sa ville qu’il voit changer, comme lui à l’aube de la quarantaine, et peu à peu oublier son passé. Un magnifique roman empreint de la nostalgie de celui qui quitte son pays malgré lui.
« Je m’appelle Taylor Davis, je suis écrivain et il faut que tu saches que tu vis dans un roman... dans mon roman pour être exact... Tu es un personnage de fiction, Stella. » C’est ainsi que Taylor s’adresse à sa création, avec condescendance, jusqu’à ce qu’elle prenne vie et apparaisse devant lui... et tous les autres. Le romancier démiurge jusqu’ici coincé dans une impasse, ne parvenait pas à boucler son scénario. Grâce à l’apparition de Stella, il connaît un véritable succès littéraire et mondain. Mais dénuée d’identité civile et attisant la curiosité, Stella est pourchassée par les autorités. Elle trouve refuge auprès d’un organisme d’étude de la noosphère qui voit en elle un accès pur à la conscience collective. Sur qui peut-elle compter : son créateur qui l’a exposée et s’avère incapable de la protéger ou un organisme qui l’étudie ? Au début de cette lecture, on pense bien sûr à Pygmalion et on imagine une simple romance. C’est d’ailleurs ce qu’avait prévu Taylor Davis : clichés et ennui garantis. Fort heureusement, Cyril Bonin est bien plus malin que cela et nous livre un récit très original. Ayant pris soin de travailler tous ses personnages, jouant de leur intelligence, il donne une profondeur inattendue à l’histoire en multipliant les points de vue. On aurait cependant aimé que certains passages soient un peu plus développés : la question de l’identité ou la découverte de la noosphère par exemple. Malgré cela, on peut dire que l’auteur sait mener sa barque et n’est pas avare de rebondissements. Stella nous tient en haleine jusqu’à la dernière case, livrant une réflexion singulière sur les créateurs où les Galatée et Pygmalion sont protéiformes et surprenants. - Aurélie
Le canapé de Panda et Pingouin est vraiment trop vieux. Ils décident donc d’aller au magasin afin d’en acheter un nouveau. Parmi la multitude de modèles proposés, le choix s’avère bien compliqué… Nos deux amis arriveront-ils à trouver la perle rare ?
À travers des illustrations « simples », crayonnées aux pastels, cet album évoque la surconsommation de notre société, ainsi que la relation d’attachement aux objets qui nous sont chers.
Comme le dit si bien Fifi Kuo « Les choses que l’on possède déjà peuvent parfois être les plus parfaites ! »
Au XVIIIe siècle, l’Islande est une terre rude. Épidémies, famines, éruptions volcaniques et occupation danoise rendent ce pays invivable. Riche de sagas légendaires, l’Islande n’a plus d’espoir, si ce n’est de se trouver un guide, un héros. Grimr, jeune orphelin, pourrait être celui-ci, à moins qu’il ne devienne un fléau bien pire...
Faire de « La saga de Grimr » l’IDBD de la semaine, cela peut paraître facile puisque cet album a remporté le prix du meilleur album (Fauve d’Or) au festival de bandes dessinées d’Angoulême 2018. Mais sacrebleu ! Il le vaut bien et il serait fort regrettable de ne pas vous en parler. Jérémie Moreau livre une copie parfaite. Partant d’un contexte historique, il développe un récit riche en actions et en émotions. La tension va crescendo jusqu’au final magistral qui ne vous laissera pas indifférent. L’auteur réussit son pari en écrivant et en offrant une vraie saga, digne des plus belles, sublimée par les décors et les aquarelles de cet artiste hors norme. Maintenant, à vous d’aller conter la saga de Grimr ! - Michaël
Béatrice est une jeune femme bien seule dont l’existence est rythmée par des habitudes et un quotidien très banal. D’un naturel discret, elle rêve secrètement de passion, d’aventure et du grand amour. Malheureusement la vie n’est pas vraiment une comédie romantique, c’est pourquoi, pour pimenter ce morne quotidien, elle décide de chaparder discrètement un sac rouge délaissé, abandonné en plein milieu de la gare. Dans ce sac, elle va découvrir un album photo qui va la plonger dans une vie de rêve, mais à quel prix... « Béatrice » est un album étrange, aux frontières du réel et de l’imaginaire. L’histoire, a priori classique et sans surprise, se transforme vite en conte étrange et captivant. Joris Mertens nous balade (littéralement) dans un univers aux multiples facettes, à la fois romantique, poétique, énigmatique et surnaturel. Il distille les ingrédients au fur et à mesure, accentuant ainsi la tension et le mystère tout au long du récit. Il parvient à nous tenir en haleine et surtout, à conclure son histoire par une fin qui nous laisse sans voix, comme cet album dont une des particularité est de ne comporter ni texte ni didascalie. Les illustrations sont juste magnifiques. L’auteur crée ses planches au crayon de papier rehaussé de couleurs vives, qui se révèlent techniques et pleines de détails. Un travail minutieux à saluer comme il se doit. Lire « Béatrice », c’est comme regarder un épisode de « La quatrième dimension » : « Apprêtez-vous à entrer dans une nouvelle dimension, qui ne se conçoit pas seulement en terme d’espace, mais où les portes entrebâillées du temps peuvent se refermer sur vous à tout jamais… ». Bon voyage !
Madame Lamort a un étrange métier. Elle est l’émissaire de la mort et envoie dans l’au-delà les tristes sélectionnés. Alors qu'elle était sur le point de décrocher le très prestigieux titre d’employée du mois, M. Bavasse, le dernier sur sa liste, lui échappe. Vexée, elle n'a qu'une hâte, le retrouver pour lui prendre son âme. Mais comment faire ? Celui-ci semble avoir complètement disparu de la circulation. Alors que tout semble perdu, elle apprend que l'un des camarades de classe de sa fille Joëlle a pour papa un certain M. Bavasse. Joëlle aura donc droit à une fête d'anniversaire où tous les élèves, ainsi que leur papa, seront invités...
Intégrale de la série culte de Davide Cali et Ninie, Cruelle Joëlle est un récit surprenant. Avec brio, les auteurs proposent une série dynamique, inventive et pleine d'humour. Ils abordent de nombreux thèmes comme la mort, mais aussi la séparation, les familles monoparentales ou encore l'adolescence. Le dessin de Ninie est des plus agréables et crée une véritable atmosphère, grâce, en partie, à l’utilisation de couleurs en parfaite adéquation avec l’ambiance générale. Cruelle Joëlle est une lecture qui procure détente et drôlerie, pouvant plaire aux grands comme aux petits. - Michaël
Márcia est infirmière. Elle vit dans une favela de Rio et comme tous et toutes, elle a du mal à joindre les deux bouts. Pourtant sa vie n’est pas si mal, si ce n’est sa relation avec Jaqueline, sa fille, qui fricote dangereusement avec les dealers du coin…
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« Écoute, jolie Márcia » est un titre brésilien au fort goût d’authenticité, celle de la vie difficile dans les bidonvilles de « L'éternel pays d'avenir ». On y croise des personnages aux forts caractères, mais au courage essentiel pour survivre dans cette société pétrie de violence. Tout au long de cette lecture, on découvre des portraits de femmes et on comprend le rôle qu’elles jouent dans l’ombre, ô combien important pour maintenir un peu d’humanité dans la société brésilienne. Au-delà, cette oeuvre est aussi une histoire de famille, celle du combat d’une mère pour offrir à sa fille un meilleur avenir.
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Marcello Quintanilha possède un style graphique propre, aux volumes et aux couleurs généreuses, pleines de vie et de passion, sans nul doute, à l’image de son pays.
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« Écoute, jolie Márcia » est un récit remarquablement écrit, au suspense intenable qu’il sera difficile d’oublier.
La Justice League, la célèbre équipe de super-héroïnes et de super-héros, a beaucoup de travail pour sauver le monde de terribles menaces. Cependant, par moment, ses membres trouvent un peu de temps pour regarder leurs mails et répondre à leurs nombreux admirateur·rices... « Chère Justice League » est un récit jeunesse de « super·es », cependant il n'est en rien comparable avec ce qui se fait habituellement. Oh bien sûr, il va être question d'une menace sur notre planète, d'une bataille pour notre civilisation, mais cette intrigue est relayée au deuxième, voire troisième plan. Le plus important pour nos personnages est de répondre aux questions des fans et surtout, de répondre sincèrement : Superman fait-il des erreurs ? A force de vivre sous l'eau, Aquaman sent-il le poisson ? Et bien d'autres questions et réponses à découvrir ! Ce titre humoristique ravira petit·es et grand·es lecteur·rices, car aussi drôle que soient les réponses, c'est surtout la façon de les amener qui l'est encore plus. Bien sûr, les illustrations jouent également un rôle majeur dans le rendu général. Wonder Woman, Batman et compagnie sont croqué·es avec un style « cartoon », les visages et les postures, sont légèrement exagéré·es pour donner un effet des plus caustiques. « Chère Justice League » est un titre à part dans ce genre états-uniens, léger et rafraîchissant, il ne procure que du bien-être. - Michaël
1927, Etats-Unis, le Mississippi est en crue. Rien ne lui résiste : digues, plantations et villes sont englouties sous la violence des eaux. Dans cette Amérique en souffrance, un seul homme semble détenir la force de contrer cette nature hostile. Mais saura-t-on lui faire confiance ? Pourra-t-on lui demander de l'aide ? A lui cet homme de couleur ? Il est le seul capable d'aider hommes et femmes dans ces coins reculés et en proie au racisme...
Mark Waid, sur un fond historique, a écrit un récit humaniste, teinté certes de noirceur, mais ô combien empli de courage, d'intelligence et de partage. Dans cette quête, il est aidé par un artiste talentueux : M. Jones, magicien qui réalise des aquarelles de toute beauté. Il peint les visages, les corps et les situations avec subtilité et justesse. Il pousse le souci du détail à son paroxysme. Tout parait tellement vrai, telles les vieilles photographies d'antan. Un album qui parle de super pouvoirs sans être véritablement une bande dessinée de super-héros. Un album qui parle et dénonce le racisme aux Etats-Unis, et qui malheureusement est toujours d'actualité. - Michaël
Des camions et des caravanes arrivent dans un pré puis les forains installent leurs attractions à la lisière d’une forêt. Le jour, la fête foraine bat son plein ; puis la nuit tombe, le gardien fait une dernière ronde et le lieu se vide en attendant de recommencer le lendemain. Vraiment ? Non… car les animaux qui observent depuis leur forêt sont bien décidés à profiter eux aussi de ce lieu féérique, plein de sensations fortes et de sucreries à déguster ! "La nuit de la fête foraine" est un album qui donne à voir avec délice, un univers magique, une bulle ou le temps n’est dédié qu’à l’amusement. Sans texte, l’illustration de Mariachiara Di Giorgio réussit à parler à tous nos sens : on entend la musique des manèges se mélanger les unes aux autres, on sent le goût de la barbe à papa fondre dans la bouche. On se plonge sans retenue dans ce monde sucré et doux, aux lumières étincelantes et aux couleurs éclatantes. Les ours, sangliers, biches et autres loups sont représentés avec décalage et beaucoup d’humour dans des attractions peu adaptées à leurs morphologie, mais peu leur importe. Leurs regards sont si expressifs qu’on retrouve le plaisir d’être là et la joie dans leurs yeux. Un coup de nostalgie assuré pour les grands enfants que sont les adultes et d’émerveillement pour les plus jeunes qui assurément, auront hâte de retrouver leur fête foraine dès que celles-ci rouvriront leurs portes.
Papa Ours est heureux avec sa fille Elma, ils vivent au jour le jour dans un univers d’amour et de paix. Malheureusement cette quiétude est mise à mal le jour des 7 ans de la petite humaine. Il est temps pour Papa Ours, malgré ses peurs, d’accompagner Elma pour un long voyage... Beaucoup d’émotions se dégagent de ce magnifique album. De par ses illustrations qui sont d’une incroyable beauté. Sur papier coloré, Léa Mazé utilise gouaches, crayons de couleur et encres afin de donner vie et d’insuffler des ambiances particulières à chaque scène. Son trait est fin et délicat, il enchantera bon nombre de lecteurs. Enfin le scénario est mystérieux et tendre à la fois. Nous accompagnons Papa Ours et sa petite Elma dans un voyage dont nous ne connaîtrons pas tout de suite le dénouement (suite et fin dans le tome 2). De très petits indices ponctuent le récit, mais ne laissent pas la place à de hâtives conclusions. Au delà de cette frustration, nous sommes touchés de plein fouet par l’amour que se portent les deux personnages. Les marques d’affections se multiplient aux grés des événements et nous ressentons cette complicité, cette connivence familiale. À regarder Papa Ours perdu dans ses pensées, ses craintes et ses peurs, vous comprendrez qu’Ingrid Chabbert, par son écriture et sa mise en scène, a réussi à rendre ces personnages bien vivants. Tellement vivants que nous tremblons pour eux. « Elma, une vie d’ours » est à n’en pas douter un futur classique de la bande dessinée jeunesse. - Michaël
Conseils lecture
Au cours d’une après-midi en compagnie de sa fille, le narrateur évoque les réminiscences de son enfance, passée en compagnie animale. Gambadant avec sa petit Lila au cœur de Mexico, l’une des villes les plus polluées au monde, l’auteur mêle des récits indiens à l’imaginaire de son enfant pour nous émerveiller du miracle qu’est la nature... Nous rappeler que « nous sommes une partie de la nature, et elle fait partie de nous » et de ce constat simple, qu’il nous faut la respecter, la protéger. Cette bande dessinée n’est pas uniquement le message d’un père à sa fille sous la forme d’une fable, mais celui d’un citoyen soucieux de son environnement autant que de ses proches, exprimant sa peur de l’avenir incertain de la planète et de l’héritage légué à nos chérubins. François Olislaeger illustre son récit sobrement, principalement en noir et blanc, en nous gratifiant par endroit de magnifiques doubles pages, peignant la beauté sauvage. Véritable ode à la vie et à la nature, il dresse un constat alarmant des actions humaines sur l’environnement. Il dénonce, mais ne se pose pas pour autant en chantre de l’écologie innocent, car lui comme nous, sommes coupables d’inaction et en quelque sorte de lâcheté. A l’heure où les politiques n’agissent peu ou pas, il est important d’exprimer nos inquiétudes pour qu’elles soient entendues et que ces voix, nos voix, qui se multiplient, puissent entrer en action et changer notre monde. Écolila est un récit plein de sagesse qu’une bibliographie vient étayer, à destination des plus curieux désireux de poursuivre cette réflexion écologique. - Michaël
Les parents de Travis sont séparés, mais du haut de ses 6 ans, il ne comprend pas grand-chose à ces histoires de grands. La plupart du temps il vit avec sa mère et passe quelques rares week-ends avec son père. Cela aurait pu fonctionner ainsi, un bonheur à eux, leur normalité, mais hélas, il en a été autrement : Dave, le père, a en lui un profond désespoir qu'il ne parvient à oublier que par la consommation d'héroïne. Nous n'avons malheureusement pas entre les mains une fiction, mais bel et bien le récit autobiographique de l'auteur qui dès son plus jeune âge a fait face aux ravages de la drogue. Victime innocente et impuissante, il a assisté a des scènes qu'un enfant de son âge ne devrait pas connaître. Il a grandi, s'est construit avec cette enfance cassée, volée. Aujourd'hui, Travis Dandro est devenu auteur et par la puissance du médium bande dessinée, il réussit à évacuer cette souffrance trop longtemps contenue. Il livre ainsi un témoignage rare, sans apitoiement, sans larmoiement sur toutes les victimes de la drogue. Non manichéen, le récit dépeint la vie, composée d'espoirs, mais aussi de désillusions. « Mon père, cet enfer » est une oeuvre riche, écrite et dessinée avec certes le coeur, mais aussi les tripes. - Michaël
Le personnage principal du roman est un jeune homme issu de la classe populaire du nord de la France. Dans sa famille, les études c’est pour les autres ; aussi, après une expérience avortée à la fac, parce qu’il faut bien gagner sa vie et surtout pour échapper au garage miteux de son oncle, il devient livreur à domicile. Il enchaîne les courses à vélo, de moins en moins bien payées, accélère la cadence, grille les feux, les stops, tout en ravalant sa dignité face aux clients pour obtenir sa note de 5 étoiles, condition sine qua non pour que l’algorithme de la plateforme informatique vous donne du travail. Les jours s’enchaînent à écraser les pédales dans la nuit, sous la pluie, jusqu’au risque de trop : le crash, éparpillé sur la chaussée.
Désormais le vélo c’est fini pour lui. Alors en convalescence, il rumine, tourne en rond, cherche une solution, jusqu’à la révélation : un soir devant la pâleur bleutée de son écran, un reportage à Marseille, où une femme chargée de vérifier la qualité d’un restaurant est cliente mystère. Commencent alors pour le jeune homme une nouvelle carrière, puis les rêves d’ascension sociale et la spirale infernale s’enclenche, avec en point de mire une myriade de questions : jusqu’où peut-on aller pour satisfaire son ambition ? Qu’est-ce que la morale ? Peut-on échapper à sa conscience ? Et surtout ne sommes-nous pas tous des pions écrasés par les rouages du grand capital ?
Une critique de la société et de la dérive actuelle du monde du travail très pertinente. Un style singulier à la fois rapide, incisif et poétique, où tout est décortiqué par l’œil, une vision exacerbée du quotidien et parfois des fulgurances de beauté. Un premier roman très réussi dans lequel fond et forme sont parfaitement en osmose. Pour prolonger l’expérience je vous conseille, également, la lecture du roman « En salle » de Claire Baglin, ayant fait l’objet d’un autre coup de cœur.
Depuis 118 ans, un fantôme hante un immeuble parisien. C’est un travail à plein temps, d’être l’esprit frappeur de ce beau bâtiment. Il en a vu défiler, des choses étranges, émouvantes, des scènes de ménage, des cambriolages, des baisers passionnés, des ascenseurs coincés ! Rien ne changera jamais dans sa vie d’esprit. Jusqu’à… ce que quelqu’un d’autre meure et vienne s’installer dans l’immeuble ! C’est une jeune fille d’aujourd’hui, les cheveux pleins de soleil, qui dit hello aux résidents et fais des tope-là aux bébés. Notre fantôme tombe alors amoureux… mais lui, vieux de 118 ans, comment pourrait-il lui plaire ? Quelle belle histoire que ce fantôme parisien qui tombe amoureux ! Clémentine Beauvais et Gerald Guerlais nous offrent un magnifique tour de force : aborder le thème des fantômes avec légèreté, poésie, et joie. Le texte, facétieux, ne tarit pas de jeux de mots bien sentis autour de la mort et retranscrit avec force les émotions de notre héros bien maladroit. L’illustration, sublime, rend grâce à la beauté des toits haussmanniens et nous fait voyager tout droit vers Paris. Sous les crayons de Gérald Guerlais, les personnages tourbillonnent, virevoltent, se cherchent et se découvrent. "Les esprits de l’escalier" est un conte romantique plein d’amour, de tendresse, un moment de poésie suspendu.
Dans la froideur du monde polaire, Petit Ours dort. Mais à quoi peut-il bien rêver ? Cet album aux couleurs douces et bleutées dégage à lui seul une force incroyablement apaisante et sereine. Il est en cela un compagnon, telle une peluche ou une veilleuse, idéal pour accompagner l'enfant jusqu'aux pays des rêves. Les illustrations de Paul Schmid sont également d'une redoutable efficacité. Ces ours polaires sont beaux, ils sont mignons, ils sont attachants et l'enfant peut facilement s'identifier à eux. De même que les parents, car l'auteur a pris soin de ne pas sexuer les personnages. L'histoire est somme toute classique à cela près qu'elle est une ouverture à l'imagination et une invitation au sommeil. « Petit Ours rêve » est un excellent album pour passer un délicieux moment avec ses enfants. - Michaël
Tout droit venue des Etats-Unis, "Beverly" est une oeuvre atypique. On y découvre le quotidien des habitants d'une banlieue aisée américaine. Les personnages défilent, se croisent, se connaissent ou pas et nous faisons preuve de voyeurisme en nous insinuant dans leur vie de tous les jours. De là réside la force de l'album : nous faire devenir le témoin de différentes existences qui en forme une seule et même entité, la banlieue, cette banlieue.
Les histoires se succèdent, rebondissent, de personnage en personnage et deviennent comme dans la vraie vie, des racontars. Nick Drnaso livre donc un récit cru sur les relations humaines, qui nous unissent et parfois nous séparent. Il utilise un dessin épuré tout en rondeur, comme du Botero. Les couleurs, utilisées en aplat, sont froides, comme pour rappeler notre rôle et nous exhorter à laisser de côté nos émotions, ne pas juger, être de simples témoins. - Michaël
Si vous aimez les histoires différentes, un peu étranges, ce livre est fait pour vous. Nous pénétrons le quotidien, pas si banal, d'une famille australienne. Cette famille, nous nous y attachons rapidement, surtout à Kellyanne, la petite dernière. Cette petite fille, dont le destin bascule le jour où ses amis imaginaires disparaissent, nous pousse à croire en l'impossible, à donner vie à Pobby et Dingan. Chose étrange car à la lecture d'une oeuvre nous donnons forcément vie à des personnages de mots, ici nous allons plus loin, nous donnons vie à des personnages imaginés par un personnage de fiction... Mais pas de prise de tête, non, que de la pure émotion, sublimée par une écriture nerveuse et raffinée. Un petit chef d'oeuvre méconnu à lire rapidement. - Michaël
Lamya Essemlali nous entraîne dans l'épopée de la « Sea Shepherd », une organisation qui ne recule devant aucun sacrifice pour défendre les océans et de la biodiversité.
À travers ce récit, c'est le portrait d'un homme hors du commun, Paul Watson, qui se dessine : un capitaine courageux, un visionnaire passionné, mais aussi un rebelle qui bouscule les consciences.
Un livre indispensable pour comprendre les enjeux de la préservation des océans et pour s'inspirer de ceux qui luttent pour un monde meilleur.
L'arrestation injustifiée de Paul Watson au Groenland témoigne de la violence des enjeux et de cette hypocrisie qui règne dans nos gouvernements.
Ce livre est un cri d'alarme qui nous rappelle que la lutte pour la préservation de notre planète est loin d'être terminée.
C’est le printemps, cela donne envie de sortir jouer dehors dans la campagne. Trois ami·es, deux garçons et une fille décident de se rendre à la cabane secrète qu’iels ont construit dans les bois. L’aventure commence sitôt le portail franchi. Les enfants croisent le chien de la voisine qui aboie, les moutons, les champs d’herbes hautes où iels aiment se perdre et prendre le goûter…Tout semble parfait, nos héros·ïnes s’inventent des jeux et des histoires au gré de leur balade.
L’autrice Marie Dorléans, avec des dialogues simples, nous entraine sur le chemin emprunté par le joyeux trio afin de rejoindre leur cachette. Au fil des pages, les paysages et les ambiances changent. Les illustrations sont très réalistes, précises et vivantes. On voit le vent qui se lève, les herbes bouger, le ciel qui s’assombrit… On devine l’orage qui va sûrement bientôt éclater. On sent la peur grandir chez les enfants qui s’accrochent aux herbes et luttent contre les éléments. La joie et l’insouciance du début laisse place à l’angoisse : dans quel état vont-iels retrouver leur cabane ?
« Notre cabane » est un album magnifique qui met à l’honneur la nature, l’amitié, l’imagination et les jeux simples de l’enfance à travers l’escapade des trois personnages.
Bob et Marley, malgré le titre qui peut nous induire en erreur, n’est pas une série d’albums sur la culture rastafarie. Bob et Marley sont deux amis ours qui prennent vie à travers une série d’albums courts et avec peu de texte. Bob est plus petit que Marley, plutôt naïf et pose beaucoup de questions. Marley est plus grand que Bob, plus sage aussi et tente de répondre aux multiples questions que Bob lui pose. De plus Bob et Marley sont très drôles. Même si le plus souvent, c’est bien malgré eux… A travers leurs personnages d’ours, Frédéric Marais et Thierry Dedieu abordent de nombreux sujets et thématiques philosophiques. Les jeux sur les mots, le décalage parfois absurde entre texte et illustration apportent une touche d’humour à plusieurs niveaux de compréhension, qui amusera les parents comme les enfants. L’illustration nous rappelle ce que Thierry Dedieu avait déjà proposé dans sa série documentaire et humoristique des Tatsu Nagata : une illustration efficace, des aplats de couleurs tranchés en guise de décor qui vont de pair avec le rythme efficace et enlevé de chaque aventure vécue par nos oursons Bob et Marley.
Le 17 mars 2020, en pleine crise du COVID-19, le président de la République annonce pour des raisons sanitaires le confinement du peuple français, et cela pour une durée encore indéterminée. Pour José, Caro et leurs enfants va commencer une nouvelle expérience de vie, ou comment passer ensemble 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, sans perdre la tête.
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Fortu, comme à son habitude, nous livre un témoignage très personnel sur son vécu de cet isolement. Bien évidemment, l’humour est le moteur de cette œuvre, mais sous des aspects « blaguaire », il pousse à la réflexion et nous interroge sur notre société et nos modes de consommation. Il nous met devant nos contradictions sans s’exclure lui même de l’équation. « Journal d’un confiné » est un titre humoristique qui peut être lu par tous. 55 gags réalisés en temps réel, une véritable performance d’auteur qui est à signaler. L’Espace COOLturel est heureux de vous faire découvrir ce titre en exclusivité. Nul doute qu’il sera au-delà, une œuvre de référence. - Michaël
La lutte contre la maltraitance animale est un sujet qui alimente les débats dans notre société. Aussi juste soit-elle, elle remet en cause bons nombres de croyances et/ou de pratiques plus ou moins barbares.
Alors, à raison, if faut se demander ce qu’est la maltraitance animale et où commence-t-elle ? Le débat est ouvert…
« Sandrine et Flibuste » et « Les droits des animaux en questions » sont deux titres qui abordent le sujet. L’un par des minis récits en bande dessinée où avec humour et cynisme, l’autrice aborde des thèmes explosifs comme l’élevage intensif, le broyage à vif ou encore la chasse à courre. Elle interroge en cela le rapport de domination de l'humain sur l'animal.
L’autre titre a une approche plus scientifique et juridique. Il va nous conter l’histoire de l’humanité et son rapport avec ce monde animal dont elle oublie souvent qu'elle en est. Il va s’attarder également sur le cadre juridique, l’animal est-il une chose, un meuble ? Les avancées de ces dernières années en matière de droit et le chemin qu’il reste encore à parcourir pour offrir à l’ensemble du vivant la vie qu’il mérite.
Gandhi a dit : « On peut juger de la grandeur d'une nation et ses progrès moraux par la façon dont elle traite les animaux. »… Alors où en est-on ?
Comme tous les membres de sa famille, même le chien, Eliott a plusieurs ballons de couleurs. A l’intérieur on y trouve, des souvenirs : un anniversaire, un mariage, une partie de pêche…
Grand-père en possède énormément. Elliot est très proche de lui. Il aime beaucoup l’écouter raconter toutes les merveilleuses histoires contenues dans ses ballons.
Hélas, avec le temps, un à un, les ballons de Papi s’envolent. Elliot ne comprend pas ce qui se passe …
Jessie Oliveros aborde avec sensibilité, à travers la complicité de l’enfant et de son grand-père, le temps qui passe, la vieillesse et surtout la maladie d’Alzheimer. Les ballons tenus par un fil est une métaphore graphique des souvenirs, douce et bien adaptée au jeune public.
Dana Wulfekotte a choisi d’illustrer en noir et blanc, sauf pour les ballons, qui eux sont colorés. Cela renforce la tendresse éprouvée et la poésie de l’album.
Une très jolie histoire émouvante, remplie d’amour et bien sûr d’espoir, pour évoquer avec les enfants un sujet encore peu traité en littérature jeunesse.
« Les ballons du souvenir » m’a beaucoup touché sans être fataliste.