Conseils lecture
Eric, la quarantaine, est divorcé et père d’un fils qu’il voit occasionnellement. Sur le plan professionnel, il a gravi tous les échelons, pour être à présent directeur commercial chez Décathlon. À ce stade, son ambition semble stagner. Lassitude et désintérêt général se sont emparés de lui.
Amélie, mariée, deux filles, est responsable d’un cabinet ministériel. À la recherche d’un nouveau collaborateur, elle tombe sur le profil d’Éric via une page d’anciens élèves de lycée. Les protagonistes ne se sont pas revus depuis 20 ans et n’étaient pas particulièrement proches.
Pourtant, l’intuition de la jeune femme, la pousse à engager son camarade pour la seconder dans ses missions auprès du gouvernement. Iels partent ainsi à Séoul pour signer un gros contrat. Lors de ce séjour, leur relation prend une tournure plus intime. Mais tout va basculer.
Est-ce vraiment un hasard ? Cette offre qui tombe au bon moment, va-t-elle redonner un nouvel élan à la carrière du quadragénaire ?
« Jamais aucune époque n’a autant été marquée par le désir de changer de vie. Nous voulons tout, à un moment de notre existence, être un autre. » Pourquoi ?
David Foenkinos, nous offre un roman drôle et touchant à la fois. Il nous invite à réfléchir sur des sujets tels que nos choix de vie, la mort, les relations humaines, le travail et le bonheur.
Dans certains récits, il arrive que des enfants disparaissent dans des mondes étranges et fantastiques où ils endossent le rôle de sauveur. Ils y deviennent des légendes et l’histoire ce termine en happy-end. Très bien... mais entre temps que s’est-il passé pour les parents, les proches de ces enfants disparus ?
« Ceux qui restent » est une histoire singulière et étonnante qui prend le contre-pied des œuvres fantastiques classiques. Cette fois, nous ne voyageons pas avec les enfants mais restons à quai avec ces parents morts d’inquiétude et suspectés de choses atroces par la police et une certaine presse à scandale. Tous les ingrédients d’une BD réussie sont réunis dans cette fable oscillant entre polar et fantastique. L’histoire est habillement écrite, ménageant des moments forts en suspense et émotions. Vous serez également charmé par les illustrations d’Alex Xöul, fluides et agréables, qui adoucissent l’atmosphère inquiétante du récit. Un récit envoûtant et inattendus en provenance de la belle Espagne. -Michaël
Aude, 24 ans, commence une nouvelle et jolie histoire avec Christophe. Un coup de foudre puis une relation à distance, qui semble une évidence. Sans qu’elle s’en rende compte, le cours de sa vie a pourtant pris un tournant : malgré ses précautions, elle est enceinte. Après la stupeur, le déni, la colère, vient le parcours médical. Et la décision qu’il faut prendre : Aude opte pour l’avortement. Ce récit se fait à deux voix : celle qui a vécu cette épreuve, l’auteure, et celui qui accompagne, qui soigne, en la personne de Martin Winckler. Ce dernier livre son expérience médicale à double titre : du praticien de ce geste si particulier qu’est l’IVG, et du soignant empathique à l’écoute des nombreuses et si diverses patientes qu’il a assistées dans ce parcours. Le témoignage de l’auteure est à lire aussi bien par les femmes, concernées ou non, que par les hommes car il éclaire les mécanismes complexes qui entrent en jeu dans ce deuil. Rien n’est épargné au lecteur : le tourbillon émotionnel de la grossesse puis de l’avortement, la solitude de certaines femmes face à cette situation, la douleur de la fausse couche ou encore la lente et difficile réappropriation de son corps. Des larmes et du sang. Beaucoup… et la nécessaire bienveillance du corps médical et soignant. Une histoire de femme(s) racontée de manière à la fois délicate et violente, d’une sincérité bouleversante. - Michaël
Monsieur Henri vit dans un arrêt de bus depuis déjà très longtemps. Tellement longtemps que plus personne ne le remarque vraiment. Un jour, par le plus étrange des hasards, un éléphanteau vient s’asseoir à côté de lui.
Qu’il est beau ce petit éléphant, mais comme il a l’air triste… C’est décidé, Monsieur Henri va l’aider à retrouver sa famille même si pour cela il doit, un temps, quitter son abri…
« L’arrêt de bus » est un très joli album sur l’amitié et l’entraide. L’autrice délivre un texte certes court, mais empli d’une abondance d’émotions. D’une grande sensibilité, par moment mélancoliques, ces mots nous enveloppent d’une couverture de bien-être.
Ils sont en parfaite harmonie avec les délicieuses illustrations, au style « anglais » de Juliette Lagrange. Un travail pictural remarquable tant par le trait, fin et délicat, que par la mise en couleur : des aquarelles savamment travaillées, aux couleurs justes et équilibrées.
Leur travail de mise en scène est également à souligner, mélangeant allègrement illustrations pleine page, magnifiques de détails et saynètes plus intimistes, propices à l’émotion.
« L’arrêt de bus » est un très bel album, tout en retenue, propice à la lecture en famille.
Ce grand album traite de nos peurs enfantines, de ces frayeurs qui lorsqu'elles nous pénétraient nous rendaient les nuits impossibles. Simplement, mais intelligemment, les auteurs nous entraînent, par le biais de quatre cauchemars, dans monde de l'enfance torturée. Ils apportent à leur façon un antidote salvateur pour apaiser notre repos. A première vue cette œuvre est destinée aux enfants, mais la force narrative du récit trouvera chez l'adulte un écho certain. - Michaël
Roman... Bande dessinée... Livre illustré... Thornhill est un titre difficile à classer, tant il revêt différentes formes. Peut-être pourrions-nous simplement le qualifier, pour le coup, de véritable roman graphique, tant il correspond à cette description ! Ce titre nous plonge dans le quotidien d’Ella, une jeune fille ordinaire dont la curiosité l’amène à observer depuis sa chambre l’étrange manoir voisin au doux nom de Thornhill. Abandonnée depuis des années, cette demeure était un orphelinat ou s’est joué un terrible drame. Depuis, réputée maudite, elle est laissée à l’abandon, mais entre ses murs une présence intrigue et attire Ella plus que de raison. Inquiétant et mystérieux, le récit se lit d’une traite. Il tient en haleine de bout en bout et nous gratifie d’une fin non conventionnelle. Il oscille entre deux époques, mais surtout deux formats narratifs. Textes et illustrations se croisent, se complètent, racontent le passé pour l’un, le présent pour l’autre et créent par cette danse, une atmosphère où la tension va crescendo. Derrière l’ambiance nappée d’étrangeté et de fantastique, se cache en réalité un récit âpre et fort en émotion. Une œuvre marquante et originale à découvrir. - Michaël
Comme il est devenu coutume dans le futur, 9 lycéen.es ont été.es sélectionné.es pour un voyage scolaire dans l’espace. Elles et ils seront déposé.es et livré.es à eux-mêmes même durant 5 jours sur la planète McPA, où nos héros ne courent aucun danger. Le but de ce voyage est de créer du lien et pourquoi pas prendre goût à l’exploration spatiale. Malheureusement, alors que tout semble aller pour le mieux, nos jeunes explorateur.trices sont, par une sphère mystérieuse, téléporté.es accidentellement en plein espace... « Astra » est un récit de science-fiction au caractère bien trempé. 9 personnages, 9 personnalités à découvrir au fil de la série. Nos protagonistes, malgré leur jeune âge, ont une histoire, une blessure qu’elles et qu’ils traînent et en font des caractères uniques. Parfois pour le bien de tous.tes, mais parfois pour le malheur de l’équipe. On parle bien ici du vivre ensemble, d’accepter les compromis et d’en retirer le positif. Comme souvent dans les œuvres japonaises pour préados et ados, la tolérance, le courage sont mis en avant. Ce titre ne déroge pas à la règle. Le rythme est soutenu et à aucun moment nous ne nous ennuyons. La richesse des personnages permet à la fois des moments de tensions, d’émotions, mais aussi d’humour. Le suspense est également une source importante de la qualité de ce titre. L’illustration, de facture classique, est sans fouillis, très lisible. Les visages expressifs, mais cela n’est pas une surprise, car n’est-ce pas habituel dans les mangas ? Pour certain.es, ce titre rappellera certainement les séries TV « Perdus dans l’espace » ; je ne sais pas si Kenta Shinohara s’en est inspiré, mais en tout cas, « Astra » en est un bel hommage. - Michaël
Que dire de plus après un titre qui résume à lui seul le contenu de cette œuvre ? Peut-être, excusez du peu, évoquer le remarquable travail de l’auteur qui réussit simplement, mais avec beaucoup d’humour, à parler du racisme au sens large du terme. Il présente l’humanité et ses rapports conflictuels qu’elle a toujours entretenu avec cet·te « autre », qui n’est pourtant qu’elle-même !? Le racisme, la xénophobie ou encore les stéréotypes, les préjugés et autres discriminations sont autant de thèmes abordés dans ce livre, vulgarisés et combattus comme il se doit. Cette bande dessinée n’est pas que pour les enfants, elle est destinée à tous et toutes, tant son fond fait écho à la vie de tous les jours et va à l’encontre de cette immonde bêtise qui inonde le champs politique et certains médias.
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Ce titre est à découvrir dans votre Espace COOLturel, au rayon BD « tout public » et on vous la conseille chaleureusement ! - Michaël
Hannah Hoshiko est une Nissei, elle est née de parents japonais dans un pays étranger : le Canada. Boucs émissaires au lendemain de la crise de 1929, puis persécutés suite à l’alliance de leur pays avec l’Allemagne nazie, les japonais·es survivent comme iels peuvent dans un pays hostile, pliant l’échine sous les coups répétés de l’administration et de la population.
Jack est blanc, après le décès de sa mère, son père s’est remarié avec une indienne autochtone. Fuyant la « civilisation » il a adopté depuis longtemps le mode de vie des peuples premiers. Il est « creekwalker », son travail consiste à compter les saumons, afin d’établir des quotas de pêche et de préserver, ainsi, l’écosystème de la forêt.
C’est le récit de ces deux êtres, à la marge, que fait avec force sensibilité l’autrice, Marie Charrel. Tour à tour bousculés par l’injustice, heurtés par la mort, blessés par la barbarie, iels perdent l’équilibre, glissent dans les ravines, s’accrochent aux branches et se relèvent chancelants. Les yeux ébahis, le souffle court, nous nous laissons emporter par cette merveilleuse chorégraphie, où s’entremêlent l’opiniâtreté des combats, la confusion des sentiments et la beauté sauvage des paysages.
Une danse, pleine de mystère où se tissent des liens inattendus. Un magnifique roman construit sur cette question, pierre angulaire : comment trouver dans l’imperfection du monde la beauté nécessaire à la résilience ?
Certainement, un des plus beaux livres de cette année !
« Jim » de François Schuiten est une œuvre bouleversante, sincère et précieuse.
« Jim » est, était le chien de M. Schuiten, il est mort cette année. L’auteur, par ce livre exutoire, nous parle de son deuil. De cette absence omniprésente qui vous colle à chaque moment de la journée, un vide bien trop pesant.
Avec justesse et simplicité, M. Schuiten évoque sa tristesse, sa soudaine solitude. Il partage avec nous son désarroi, un dernier au revoir à celui qui a partagé sa vie durant ces 13 dernière années.
Toutes celles et ceux qui ont eu un chien et l'ont aimé, se reconnaitront dans cette œuvre aux magnifiques illustrations.
Toutes celles et ceux qui ne comprennent pas que l’on puisse pleurer un animal de compagnie, pourront s'ils/elles le souhaitent prendre le temps de se plonger dans cet album qui en quelques pages seulement, explique à lui seul ce deuil, souvent malheureusement balayé d’un revers de main par la société.
Cette œuvre n’est pas triste pour autant, est simplement juste et belle.
Conseils lecture
Papa Ours est heureux avec sa fille Elma, ils vivent au jour le jour dans un univers d’amour et de paix. Malheureusement cette quiétude est mise à mal le jour des 7 ans de la petite humaine. Il est temps pour Papa Ours, malgré ses peurs, d’accompagner Elma pour un long voyage... Beaucoup d’émotions se dégagent de ce magnifique album. De par ses illustrations qui sont d’une incroyable beauté. Sur papier coloré, Léa Mazé utilise gouaches, crayons de couleur et encres afin de donner vie et d’insuffler des ambiances particulières à chaque scène. Son trait est fin et délicat, il enchantera bon nombre de lecteurs. Enfin le scénario est mystérieux et tendre à la fois. Nous accompagnons Papa Ours et sa petite Elma dans un voyage dont nous ne connaîtrons pas tout de suite le dénouement (suite et fin dans le tome 2). De très petits indices ponctuent le récit, mais ne laissent pas la place à de hâtives conclusions. Au delà de cette frustration, nous sommes touchés de plein fouet par l’amour que se portent les deux personnages. Les marques d’affections se multiplient aux grés des événements et nous ressentons cette complicité, cette connivence familiale. À regarder Papa Ours perdu dans ses pensées, ses craintes et ses peurs, vous comprendrez qu’Ingrid Chabbert, par son écriture et sa mise en scène, a réussi à rendre ces personnages bien vivants. Tellement vivants que nous tremblons pour eux. « Elma, une vie d’ours » est à n’en pas douter un futur classique de la bande dessinée jeunesse. - Michaël
Momo est un magnifique Border Collie, blanc et noir. Momo est surtout très facétieux : il aime beaucoup se cacher ! Alors son maître, le photographe Andrew Knapp, a saisi les occasions d’immortaliser ces moments amusants dans un très bel imagier. A nous de retrouver Momo dans toutes sortes de situations sur la page de droite : à la fête foraine, au jardin, à la librairie où encore à l’école ! Sur la page de gauche, différents objets à chercher sont présentés, sans jamais oublier Momo, sa drôle de tête et ses grands yeux expressifs.
A travers cet album, Andrew Knapp nous propose un cherche-et-trouve adapté aux plus petits. Les photographies sont claires et lisibles, les objets à retrouver, des objets du quotidien que les enfants auront plaisir à chercher. Le chien Momo rends cette expérience vraiment sympathique : il paraît si gentil, et nous regarde (ou plutôt son maître, qui prends la photo) avec tellement d’intensité qu’on ne souhaite qu’une chose : s’amuser avec lui !
Les couleurs vives, la composition et la qualité des photographies séduiront à coup sûr les jeunes enfants et Momo deviendra l’un de leurs compagnons préférés.
Bee a dix-huit ans. Elle a décidé, pour l'été, de traverser les Etats-Unis à bicyclette. Mais après seulement une journée de voyage, elle est contrainte de s'arrêter dans un motel, son vélo réduit en miettes dans un accident. Elle rencontre alors Cyrus, mystérieux homme d'entretien aux curieuses habitudes : dérober des médicaments aux clients et retoucher les tableaux qui ornent les murs des chambres.
La traversée avortée d'un pays à vélo se transforme ici en récit initiatique nous faisant accompagner Bee dans son passage de l'adolescence à l'âge adulte. Des sentiments neufs, le sexe, la drogue, la vie en marge et le goût du risque : un voyage haut en couleurs ! - Michaël
Après "Déluge" et "Marmelade" ou encore "La fête des crêpes", nous retrouvons l’autrice illustratrice suédoise Cecilia Heikkilä avec beaucoup de bonheur.
Un matin, petit ours interroge son grand-père ours à propos d'une carte postale accrochée sur son frigo. « C’est un endroit merveilleux », répond grand-père ours, « il se situe de l’autre côté de la mer, entre des montagnes de glace et des lacs sans fond. Il s’agit… du dernier avant-poste. » Petit ours a alors très envie d’y aller. Grand-père est d’accord, mais il faut un peu de préparation pour partir à l’aventure. Et un beau matin, les voilà embarqués pour le plus beau voyage de leur vie…
Ce bel album nous parle de voyage, de lien intergénérationnel, de désillusion aussi, et d’écologie. Il invite à la rêverie. Il donne envie de quitter sa maison et de s’en aller vers des endroits lointains et inconnus. Partir en voyage, c’est se confronter à la réalité des choses, parfois assez éloignée de ce qu’on avait imaginé. C’est aussi faire des rencontres et découvrir des lieux merveilleux.
Les illustrations toutes en douceur nous transportent à travers des paysages magnifiquement illustrés, aux sublimes couleurs pastel. Au fil des pages qui se tournent, on ressent comme une belle bouffée d’oxygène.
Cet album paisible, réconfortant, est un petit nuage très agréable à déguster en ce froid mois de février.
Goliath n’est pas comme les autres enfants, il est grand, très grand, voir très très grand et cela le peine. Il est différent…
Ximo Abadía, auteur espagnol dont j’admire l’œuvre propose avec cet album un récit touchant empli de sagesse et de beaucoup de tendresse. Il évoque le thème de la différence, du mal être et de comment trouver sa place dans la société. Loin d’être triste, le récit se transforme en quête initiatique dont chaque scène est une impressionnante rencontre. En cela son travail graphique est remarquable, il juxtapose les formes, les matières pour rendre des tableaux d’une extrême efficacité. Très peu de couleurs sont utilisées, les mêmes page après page, savamment dosées et distillées afin d’offrir différentes ambiances, différentes émotions à l’histoire.
Goliath est un géant et heureusement pour nous, son amour aussi alors, il serait dommage de s’en priver !
Il était une fois Lou, jeune homme gringalet, parti en quête de la princesse Ronces. Après une première rencontre pleine de promesses, les deux jeunes gens s’étaient engagés à se retrouver, mais l’hiver et la forêt ont effacé toute trace de la princesse. Ronces connaît parfaitement les bois et ses habitants, parmi lesquels elle a grandi et règne. Aussi, pour retrouver sa dulcinée, Lou s’adjoint l’aide de la fée Margot. Cette dernière lui conte l’histoire de la princesse, convoitée par son père, le roi Lucane, et forcée à se cacher pour lui échapper. Vous aurez reconnu dans cette dernière phrase la trame de « Peau d’âne ». Et pourtant, c’est du côté de Grimm (et non de Perrault) que Stéphane Fert a puisé son inspiration : la princesse est futée, indépendante, forte, et se débrouille (elle) sans l’aide d’une fée… L’auteur livre ici sa version, féministe et terriblement sensuelle, du conte de notre enfance. Des touches d’humour bienvenues allègent cette histoire cruelle, enrichie et ponctuée de nombreux rebondissements. Pour la première fois à la plume et au dessin, Stéphane Fert déploie dans « Peau de mille bêtes » tout son talent. Il met à profit cette double casquette et creuse le récit aussi par ses choix graphiques et chromatiques. L’art qu’il déploie dans ses cases, magnifiques et inventives, illumine cette histoire déjà maintes fois racontée et ici brillamment réinterprétée. Bref, un gros coup de cœur pour cette petite merveille de bande dessinée ! Ados, adultes, retombez en enfance et succombez pour votre plus grand plaisir de lecture, au talent de conteur de Stéphane Fert. - Michaël
La famille Vasylenko est très impressionnante. Iels sont nombreux·ses : 12 enfant·es et 2 parent·es ! Chaque jour, iels sortent braver la nature sauvage à la recherche de l’aventure. Et chaque jour, Oktobre reste à la maison. Comme ses frères et sœurs, il rêve de devenir un grand aventurier, mais il préfère l’aventure dans les livres, loin du monde froid, boueux, humide de l’extérieur. Et surtout, Oktobre a très peur d’un monstre nommé « la nature sauvage ». « C’est une expression, un endroit », lui explique papa. Mais rien à faire, Oktobre n’arrive pas à surmonter sa peur. Arrivera-t-il à s’armer de courage pour aller faire la connaissance de cette intimidante nature ?
Les illustrations rendent cet album fort attirant : le trait graphique et géométrique de Steve McCarthy, les couleurs automnales attirent l’œil et nous plongent tout de suite dans cette aventure de vie sauvage tant aimée par famille Vasylenko. Les grands yeux d’Oktobre sont très expressifs et l’on ressent bien les émotions qui le traversent.
Ensuite, il nous offre un beau texte, sensible, sur les peurs et les émotions des enfant·es.
Cette famille atypique est tellement accro à l’aventure qu’iels deviennent drôles malgré elleux : pour nous, lecteur·rices, les voir patauger dans l’eau sous la pluie ne donne pas vraiment envie de les suivre ! Nous comprenons bien Oktobre à qui ça ne plaît pas trop.
Toutefois, les relations familiales sont bienveillantes et créent un espace apaisant autour du petit garçon. Les parents recueillent ses inquiétudes et en discutent avec lui, plutôt que de les mettre de côté.
Finalement, c’est une rencontre inattendue qui aidera Oktobre à surmonter ses peurs et offre un final poétique à cette histoire.
La terre des fils fait incontestablement partie des meilleurs titres 2017. Gipi (pourtant pas habitué au genre) nous conte une histoire post-apocalyptique d’une rare efficacité. Les personnages sont abrupts, directs, violents, mais pas dénués de réflexion. Dans un univers âpre, ils agissent pour leur survie sans laisser paraître de sentiments. Pourtant les sentiments sont bien présents, sous-jacents, et inéluctablement jailliront… L’illustration est magnifique, désespérée, sans couleur, sans aplat, au trait vif, hachuré et élégant. Un petit joyau de la bande dessinée italienne à découvrir. - Michaël
Gaspard est berger et en est fier. Il aime sa liberté, ses montagnes et ses moutons, mais déteste par dessus toute cette bureaucratie qui lui a imposé la cohabitation avec le loup. Cet animal sauvage qui tue et rend fou les troupeaux. Cet animal qu’il voudrait voir disparaître afin de retrouver paix et sérénité. Alors, au détriment de la loi, il se lance dans un combat à l’issue duquel ne restera que l’un ou l’autre... Jean-Marc Rochette nous gratifie une nouvelle fois d’un très beau récit « montagnard ». Nous retournons donc, après « Ailefroide », au cœur du Massif des Écrins, dans la vallée du Vénéon. Si l’alpinisme était à l’honneur dans le premier album, « Le loup » aborde un aspect différent, plus universel, celui de la difficile cohabitation entre économie et environnement. Sous la forme d’un duel entre un loup et un berger Jean-Marc Rochette dénonce cette aberration qui nous conduit tous sur des sentiers dangereux. Il ne charge pas les bergers, qui sont eux aussi victimes du système économique dans lequel l’Homme modifie et/ou détruit la biodiversité. Le loup, l’animal, le berger, l’humanité : chacun sa place, chacun mérite de vivre et c’est bien ce message qui nous est envoyé. Nos héros à deux ou quatre pattes sont beaux et fiers, ils représentent la nature, chacun à leur façon, ils essayent de vivre, survivre dans un milieu difficile. Ce très beau récit est composé d’illustrations très fortes, de paysages glacials et bénéficie d’un découpage savamment orchestré, distillant rythme et action. « Le loup » est une ode à la nature, à la tolérance. Il serait regrettable de s’en priver, mais souhaitable de le partager. - Michaël
‘Petit traité du jardin punk’ est un manifeste vibrant qui nous invite à repenser notre relation avec la nature. Éric Lenoir nous guide à travers une approche de jardinage révolutionnaire, où la nature reprend ses droits et où l’effort humain se fait discret.
Ce livre est une ode à la biodiversité et un appel à l’action pour toustes celleux qui cherchent à créer un espace vert plus sauvage et authentique.
Un incontournable pour les amoureux·ses de la nature et les rebelles du jardinage !
Rebecca Dautremer est une autrice illustratrice que l’on ne présente plus. Son travail a été de multiples fois primé dans de nombreux salons, et la réputation de la maman de L’amoureux, de Princesses ou encore de Cyrano n’es pas galvaudée. Son travail, subtil, poétique, se reconnaît du premier coup d’œil. Elle signe avec son dernier album, Les riches heures de Jacominus Gainsborough, un véritable coup de maître. Dans cet album, Rebecca Dautremer nous donne à voir le récit d’une vie, celle de Jacominus Gainsborough. Ce petit lapin va grandir à son rythme et trouver sa place petit à petit dans le monde. Il traverse des joies et des peines, des moments de doutes, des blessures mais fait aussi de belles rencontres. A la manière d’une fresque philosophique, l'autrice nous brosse la vie bien remplie d’un héros ordinaire. Jacominus est bien entouré, d’une famille nombreuse, d’amis présents et de l’amour de sa vie. Il n’a pas vécu que des moments faciles, mais quand au crépuscule de sa vie, Jacominus se retourne, il peut être heureux du moment qu’il a passé auprès de ces êtres qui lui sont chers. Les illustrations sont d’une maîtrise incroyable et pleines de références picturales, littéraires qui pour certaines nous échappent certainement ; la mise en couleur, douce et équilibrée, les détails foisonnants font que nous pouvons nous plonger des heures dans cet album hors du commun, le relire 10 fois, nous aurions toujours quelque chose de nouveau à découvrir. L’équilibre avec le texte, empli de mélancolie, de mots justes, et bien sûr de poésie, fonctionne merveilleusement. Voici un album tel que vous aurez peu l’occasion d'en voir : tout un univers riche et foisonnant qui nous laisse un goût doux amer quand l’on referme, trop tôt, la dernière page du livre de la vie de Jacominus Gainsborough.
Gioia a 17 ans. Elle n’est pas comme les autres. Dans sa bulle elle discute avec Tonia, une amie imaginaire. Elle écoute en boucle les Pink Floyd, collectionne dans un carnet les mots étrangers intraduisibles et se passionne pour la photographie en ne prenant que des gens de dos. Au lycée on la surnomme miss rabat-joie. Elle vit dans un contexte familial difficile. Un jour, elle fait par hasard la connaissance d’un jeune homme : Lo. Comme elle, il est solitaire, collectionne des cailloux dans un bocal, joue aux fléchettes seul le soir dans un bar. Avec lui Gioia va découvrir des émotions jusqu’ici jamais ressenties. Mais voilà, celui-ci disparait sans laisser de traces. La jeune fille est alors prise de doutes. Aurait-elle imaginé cette relation ? Serait-elle folle comme le pense ses parents ou la psy ? Gioia est déterminée à retrouver son amour perdu et à mettre au clair les zones d’ombres qui planent autour de cette histoire. Notre héroïne sera aidée par quelques complices : son professeur de philosophie et confident, une gérante de bar et un vieux monsieur.
Dans ce premier roman, Enrico Galiano traduit très bien le mal-être de l’adolescente, ses interrogations, ses doutes et ses espoirs.
En plongeant dans le monde de Gioia on perd souvent le sens de la réalité et de l’imaginaire tant la frontière entre les deux y est infime.
Les ados se retrouveront dans ce thriller psychologique, écrit avec fluidité et humour. Les personnages sont très attachants, mystérieux et sont confrontés à des réalités aussi brutales que quotidiennes. Une sensibilisation à la violence, l’alcoolisme, le harcèlement…On retiendra également un message de tolérance et d’ouverture d’esprit.
J’ai lu ce livre rapidement, prise dans le fil des événements et l’envie page après page d’en connaître le dénouement.
En 110 pages, avec beaucoup de talent, Yamen Manai nous décrit une société tunisienne post « révolution du Jasmin » désabusée et abîmée, une société médiocre et rustre où la violence est omniprésente.
En s’appuyant sur son personnage qui en est depuis toujours la victime, il décrit les mécanismes de cette violence avec intelligence et décrypte comment depuis des siècles elle est un des piliers du modèle patriarcal tunisien.
Au-delà de la critique social, à travers son héros l’auteur nous interroge également sur la condition de victime et de bourreau, sur les notions d’humanité et de respect de soi. Grâce à sa rencontre avec un chien nous allons assister à la métamorphose du personnage principal, dont la clairvoyance va devenir redoutable.
Alors si vous ne craignez pas de voir ce qui se cache derrière les cartes postales des hôtels à touristes du front de mer, venez découvrir le quotidien plombant des habitant·es déshérité·es des banlieues périphériques et leurs bassesses ! Vous verrez, le dépaysement est assuré !
Il y a de la tragédie carthaginoise dans ce génial petit roman et aussi du Victor Hugo qui disait fort à propos « Ursus et Homo étaient liés d’une amitié étroite. Ursus était un homme, (Homo était une lessive, non je plaisante), Homo était un loup. »
Que vous inspire cette citation du célèbre auteur ? Dans deux heures je ramasse les copies. Bonne chance !
Barbara n’est pas une adolescente comme les autres. Solitaire et parfois violente, elle ne fait pas l’unanimité dans son école. Ses histoires de géants et autres créatures n’arrangent rien, la faisant passer pour folle aux yeux de ses camarades. La blessure qu’elle cache en elle pourrait expliquer son comportement, mais comment la comprendre, l’approcher, elle qui se bat si furieusement contre des moulins à vent... IKG est un comics sans super-héros, mais avec une héroïne du quotidien qui lutte contre les tourments de la vie. Sans rien en dévoiler, l’intrigue est maligne, nous entraînant sur une fausse piste pour mieux nous ramener à la réalité. Barbara est étonnante de caractère, de furie et de tendresse. Elle est merveilleusement bien croquée par l’artiste Ken Niimura qui insuffle une énergie folle à cette œuvre originale. Un très bon moment de lecture qui engendrera à n’en pas douter discussion et débats. - Michaël
Il est rare qu’en bibliothèque on vous parle de plaisir. Il y a bien sûr le le plaisir de la lecture, du partage, de la découverte et c’est déjà bien. Pourtant il est un plaisir un peu plus tabou, sujet de certains livres, qui est tu. C’est dommage quand même... il est plus facile de parler de choses horribles comme de crimes, de guerres et ou encore d’ignominies de toutes sortes, que de choses qui font du bien, de sexualité, pour ne pas dire le mot « SEXE » ! Pourtant, depuis quelques années les livres sur le sujet se multiplient, se diversifient et apportent bon nombre de conseils pour un plein épanouissement. « Jouissance Club » est sans nul doute devenu une référence en la matière. Sa force est de s’adresser aux femmes comme aux hommes et d’aborder l’art du plaisir sexuel dans la plus grande des simplicités. Les femmes comme les hommes apprendront à se donner ou à donner du plaisir, et donc seul·e ou avec partenaire. Grâce à des illustrations épurées, Jüne Plã, artiste aux multiples talents et connue pour son compte Instagram « Jouissance Club », explique efficacement différentes pratiques, techniques sexuelles. Cependant, limiter cet ouvrage à un simple manuel d’éducation sexuelle serait dommage, car c'est un vrai travail de déconstruction des stéréotypes, des idées reçues et des clichés. Jüne Plã ne parle pas d’une, mais des sexualités, car elle est différente selon chacun·e : asexuelle, hétérosexuelle, homosexuelle, bisexuelle, pansexuelle, mais toujours et le plus important, dans le respect mutuel. « Jouissance Club » est un livre important, fondateur, qu’il serait dommage de dédaigner. - Michaël