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Tous les avis de

Dans quartier ordinaire, on trouve une rue ordinaire, et dans cette rue ordinaire, des maisons les unes à côté des autres. Et dans chaque maison, il y a des habitants qui ne se connaissent pas. Au n°15, il y a Camille, chez qui il y a un boucan d’enfer, qui n’ose pas parler à M.Rivières, grand avocat prestigieux ; de l’autre côté il y a un énorme dragon, qui en réalité est une souris qui se déguise, effrayée par le voisin d’en face, un chat (végan). Mais un beau jour, une suite d’événements vont faire se rencontrer tous ces voisins remplis de craintes et de préjugés les uns sur les autres…

Merci voisin est un album dans l’aire du temps. Aujourd’hui, chacun d’entre nous vit sa petite vie, dans son petit chez soi, sans prendre le temps d’aller vers ceux que nous côtoyons au quotidien. Nous préférons nous juger les uns les autres plutôt que de tisser des liens.

Dans cette rue, chacun est un peu solitaire et malheureux dans son coin ; la méfiance que ressentent ces voisins les uns vis-à-vis des autres les isolent. Le jour où enfin, ils osent faire un pas vers l’autre, ils se rendent alors compte qu’ils peuvent être heureux tous ensemble.

Les illustrations, sans être très originales, sont accessibles et les personnages animaux plutôt attachants.

Cet album sympathique véhicule de belles valeurs sur l’entraide, la découverte des autres, les rencontres.

Un ours sans histoire

De Christian Merveille et Laurent Simon

Un ours vit une petite vie tranquille dans la forêt sans qu’il ne lui arrive jamais rien. Un jour, lors de sa promenade, il croise tout un tas d’animaux à qui il arrive de drôles d’histoires : un oisillon tombé du nid, un castor coincé dans son barrage, un loup qui a une épine dans le pied… L’ours leur apporte à chacun une aide précieuse, mais il est triste : à lui, il ne lui arrive jamais d’histoire ! Jusqu’à ce qu’une rumeur se faufile dans la forêt sur un ours très altruiste sans histoire…

Cet album tendre est un beau récit sur l’entraide et les trajectoires de vies qui s’entremêlent. Chaque animal vit sa vie mais ils ont tous besoin de l’ours pour les secourir. Et finalement, si toute la forêt se mets à parler de l’ours, ce n’est pas parce qu’il a vécu une aventure extraordinaire mais bien par la somme de tous ses petits gestes pour aider ses compagnons.

Les illustrations sont au diapason du récit : apaisantes, délicates, les belles nuances de couleurs de la forêt mettent en exergue cette force tranquille qui émane du personnage principal. Et l’ours en lui-même paraît très bienveillant, à l’écoute, peut-être un brin mélancolique.

Cette histoire calme et réconfortante nous offre une pause de douceur bienvenue.

June a grandi enfermée dans son palais, loin du monde, attendant le jour, l’évènement magique au cours duquel elle va tenter de ne faire qu’un avec l’Animal : son totem. Ses cheveux ont été nattés, une belle parure a été posée sur ses épaules. Elle a été préparée depuis la naissance pour ce jour : tel est son destin. Son enveloppe charnelle reste dans le palais et son esprit s’entremêle à son animal totem. Elle va quitter le palais pour la première fois de sa vie. Le lien va-t-il se créer ? Ce conte chamanique nous fait voyager dans un univers mystique et mystérieux. June est très attachante car une grosse attente pèse sur ses épaules, une mission qui la dépasse. Elle a été protégée, choyée, emprisonnée presque dans cet ultime objectif, lier son esprit à l’animal. Son corps, son emploi du temps, son esprit ne lui appartiennent pas, comme une critique féministe en filigrane qui revisite la figure archétypale de la princesse des contes de fée. L’épreuve se passe, June réussit haut la main et pourtant, un goût amer lui reste. Sa vie tout entière était dédiée à ce moment : une fois passé, que lui reste-il ? Les couleurs très flash, en opposition, rose fluo sur fond bleu de l’illustration rendent bien l’opposition entre la princesse/fillette « objet » et ce qu’elle traverse et découvre pendant son épreuve : la vie sauvage, les grands espaces. Les illustrations de Justine Brax se déploient sur toute une page comme l’esprit de la princesse. Elles sont puissantes, évocatrices, et rendent hommage à la culture chamanique de nombreux peuples à travers le monde. Par son message métaphorique et son texte poétique mais parfois un peu dense, cet album sera à proposer à des enfants à partir de 6 ans.

La famille Vasylenko est très impressionnante. Iels sont nombreux·ses : 12 enfant·es et 2 parent·es ! Chaque jour, iels sortent braver la nature sauvage à la recherche de l’aventure. Et chaque jour, Oktobre reste à la maison. Comme ses frères et sœurs, il rêve de devenir un grand aventurier, mais il préfère l’aventure dans les livres, loin du monde froid, boueux, humide de l’extérieur. Et surtout, Oktobre a très peur d’un monstre nommé « la nature sauvage ». « C’est une expression, un endroit », lui explique papa. Mais rien à faire, Oktobre n’arrive pas à surmonter sa peur. Arrivera-t-il à s’armer de courage pour aller faire la connaissance de cette intimidante nature ?

Les illustrations rendent cet album fort attirant : le trait graphique et géométrique de Steve McCarthy, les couleurs automnales attirent l’œil et nous plongent tout de suite dans cette aventure de vie sauvage tant aimée par famille Vasylenko. Les grands yeux d’Oktobre sont très expressifs et l’on ressent bien les émotions qui le traversent.
Ensuite, il nous offre un beau texte, sensible, sur les peurs et les émotions des enfant·es.
Cette famille atypique est tellement accro à l’aventure qu’iels deviennent drôles malgré elleux : pour nous, lecteur·rices, les voir patauger dans l’eau sous la pluie ne donne pas vraiment envie de les suivre ! Nous comprenons bien Oktobre à qui ça ne plaît pas trop.
Toutefois, les relations familiales sont bienveillantes et créent un espace apaisant autour du petit garçon. Les parents recueillent ses inquiétudes et en discutent avec lui, plutôt que de les mettre de côté.
Finalement, c’est une rencontre inattendue qui aidera Oktobre à surmonter ses peurs et offre un final poétique à cette histoire.

Une petite fille japonaise nous parle de sa grand-mère Hanabishi. C’est le nom qu’on donne aux personnes qui fabriquent des feux d’artifice. C’est une des rares femmes à pratiquer ce métier, dangereux, technique, et artistique aussi. Alors, la petite fille la questionne sans s’arrêter et sa grand-mère lui explique : les feux d’artifice, mais aussi la physique et l’astronomie, et également sa propre histoire.

Hanabishi nous offre un beau récit sur la transmission et le lien intergénérationnel. Cet album nous donne l’occasion également d’en savoir plus sur cet art japonais, le hanabi, et ces personnes qui exercent le métier d’artificier. Il s’agit de créer des œuvres d’art dans le ciel, en mélangeant les couleurs et les formes ; la grand-mère hanabishi fait alors ses recherches et ses essais à la peinture, sur une feuille noire. Il faut ensuite faire des calculs mathématiques complexes et maîtriser les lois de la physique pour tirer ces feux d’artifices et produire exactement ce qui était prévu.
Le sujet permet à l’illustratrice de s’exprimer à l’aquarelle et au crayon à travers une belle palette de couleurs ; elle s’inspire également de la flore japonaise afin de nous faire voyager dans ce beau pays : On retrouve au fil des pages l’érable rouge ou encore le cerisier du Japon.
Ce bel album nous émerveille, nous attendrit et nous fait découvrir un art et une culture. Une grande réussite !

Au bord d’un étang vivent deux lapins peintres : lapin peintre jour et lapin peintre nuit. Leur travail consiste à peindre le reflet du ciel sur l’étang. Lapin peintre jour aime peindre les changements de lumière avant un orage, l’arbre qui se penche, le vol d’un oiseau. Lapin peintre nuit aime peindre le noir de la nuit qui chaque soir est différent. Un matin, une pie mécanique vient se percher dans l’arbre et amène avec elle un gros nuage noir. Au bout de plusieurs jours, les lapins peintres décident de monter sur leur étrange machine afin de découvrir l’origine de ce gros nuage. Ils s’engagent alors dans un voyage extraordinaire…
Ce livre nous offre un univers onirique, foisonnant. Il nous parle de la beauté de l’art, de l’étrangeté des machines, du récit qui s’emmêle les pinceaux. Il nous fait voyager dans un monde où l’abstrait et le réel rentrent en collision, à la manière « d’Alice aux pays des merveilles ». Par son côté steampunk, le sens du récit résiste un peu à la lecture. Y’a-t-il un message caché sur le danger des machines, la pollution ? Libre à chacun de se faire une idée.
Les textes de Simon Priem sont empreints d’une poésie grave et subtile. Le texte est loin d’être explicite et amènera sans aucun doute de nombreuses questions.
Stéphane Poulin, à qui l’on doit le non moins extraordinaire album « Les mûres », nous entraîne dans un univers doux et apaisant. La maitrise de sa technique de peinture à l’huile nous offre des illustrations époustouflantes. L’équilibre des couleurs, la justesse des détails suscitent beaucoup d’émotions.
« Les lapins peintres » est un album incroyable sur les pouvoirs de l’imaginaire et de la peinture.

Un album comme j’en vois passer quelques fois, peu souvent, qui restera gravé dans ma mémoire pour longtemps.

Qu’il y a-t-il sur la lune ? Il y a un guichet, et derrière ce guichet, il y a Jean. Régulièrement, des pensées en tout genre apparaissent : une trompette biscornue, un 10 sur 10, un souvenir de vacances ou un avion tout neuf. Alors Jean les classe, les range, en prend bien soin. Un jour, une petite fille apparait. « Elle n’a rien à faire sur la lune », se dit Jean, « elle doit repartir ». Mais il a beau la catapulter, la coller dans une fusée, l’accrocher à une étoile filante, rien à faire, la petite fille revient toujours ! Alors, petit à petit, Jean va apprendre à cohabiter et à transmettre son drôle de métier…

« Le guichet de la lune » est un bel album mélancolique et onirique. Il pose la question : où s’en vont les pensées lorsque les gens sont dans la lune ? Cette histoire pourrait sortir tout droit de l’imagination d’un·e enfant·e, et c’est en cela que le texte de Charlotte Bellière est très touchant.
Dès le départ, le·la lecteur·rice est intrigué par Jean, et ce qu’il fabrique sur la lune. Au fil des pages, le mystère se délie et ses activités deviennent fascinantes. Le guichetier semble toutefois chagriné d’être parfois désœuvré, car les humains rêvent de moins en moins. C’est pourtant essentiel, de prendre le temps de souffler, s’évader, laisser ses pensées filer !
Les illustrations de Ian de Haes sont douces et la colorisation est magnifique. Le choix des nuances de jaune et bleu est très réconfortant et nous rappelle bien sûr notre beau satellite, la lune.

Cette histoire est parfaite pour les enfant·es qui aiment passer du temps dans la lune et la tête dans les étoiles, qui aiment rêver, tout simplement.

Elan et sa famille habitent une maison dans la forêt. Tous les soirs après le repas, Elan leur raconte une histoire. Un jour, il se trouve à court d’idée. « Et si tu nous lisais un livre ? » propose sa femme. Mais Elan n’a pas de livre ! Ni Ourse, sa voisine, ni Blairelle, ni Renard, ni aucun·e autre animal·e de la forêt. Elan se rend à la bibliothèque municipale et revient avec une belle pile de livres. Tous les animaux de la forêt viennent écouter les histoires d’Elan, mais bientôt sa maison est trop petite. Alors, une idée germe dans sa tête…

« Le bibliobus » est un album très mignon qui célèbre le plaisir de lire. Nous faisons un petit bon dans le passé à travers l’illustration vintage, des animaux anthropomorphes, tous ces éléments qui nous rappellent telle une madeleine de Proust, les albums de notre enfance.
Inga Moore nous rappelle à quel point la lecture est un loisir agréable, à consommer sans modération. Le récit porte des belles valeurs comme l’entraide, la solidarité, l’amitié. Certain·es trouveront peut-être l’histoire un peu mièvre, mais je dirais plutôt qu’elle offre une petite pause pleine de douceur, tel un bonbon réconfortant et apaisant.

Le bibliobus est un bel hommage aux bibliothèques et aux bibliothécaires : il était difficile pour moi de passer à côté !

Après "Déluge" et "Marmelade" ou encore "La fête des crêpes", nous retrouvons l’autrice illustratrice suédoise Cecilia Heikkilä avec beaucoup de bonheur.

Un matin, petit ours interroge son grand-père ours à propos d'une carte postale accrochée sur son frigo. « C’est un endroit merveilleux », répond grand-père ours, « il se situe de l’autre côté de la mer, entre des montagnes de glace et des lacs sans fond. Il s’agit… du dernier avant-poste. » Petit ours a alors très envie d’y aller. Grand-père est d’accord, mais il faut un peu de préparation pour partir à l’aventure. Et un beau matin, les voilà embarqués pour le plus beau voyage de leur vie…

Ce bel album nous parle de voyage, de lien intergénérationnel, de désillusion aussi, et d’écologie. Il invite à la rêverie. Il donne envie de quitter sa maison et de s’en aller vers des endroits lointains et inconnus. Partir en voyage, c’est se confronter à la réalité des choses, parfois assez éloignée de ce qu’on avait imaginé. C’est aussi faire des rencontres et découvrir des lieux merveilleux.
Les illustrations toutes en douceur nous transportent à travers des paysages magnifiquement illustrés, aux sublimes couleurs pastel. Au fil des pages qui se tournent, on ressent comme une belle bouffée d’oxygène.

Cet album paisible, réconfortant, est un petit nuage très agréable à déguster en ce froid mois de février.

Voici un livre à compter. Mais attention ! Il faut bien suivre la consigne : ici, on compte jusqu’à 1 ! et que jusqu’à 1 ! Sur la première page, ce n’est pas trop compliqué. Il y a une pomme : on peut donc la compter. Mais sur les autres pages, l’exercice se corse…

Ce livre rempli d’humour prend le contrepied des autres livres « pédagogiques » à compter, qui garnissent les étagères des librairies et bibliothèques en littérature jeunesse. En effet, ici, il s’agit plus de trouver le détail unique dans chaque page (et le compter), et d’observer les illustrations amusantes et colorées.

Le narrateur s’adresse directement à son·sa lecteur·rice et cela en devient un livre-jeu.

Finalement, on ne peut s’empêcher de braver les interdits et comptant tout ce qui se trouve dans le livre et en cela cet album est particulièrement réussi !