Conseils lecture
Alan, auteur en mal de reconnaissance, vient de perdre son ami d’enfance. Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, sa compagne en profite pour lui annoncer qu’elle le quitte pour quelqu’un de plus mature et surtout de plus talentueux. Alors forcément au bord de la piscine de ses voisins, qu’il entretient pendant leurs vacances, Alan à la sensation, comme Isabelle Adjani dans son petit pull marine, d’avoir touché le fond.
Mais qu’à cela ne tienne il va rebondir et s’imposer une discipline de samouraï pour écrire le roman de sa vie et reconquérir l’être aimé ! Malheureusement, rien ne se passe comme prévu. Alan est aux antipodes d’un maître de guerre japonais et ses bonnes résolutions sont tout sauf faciles à tenir. Un peu maladroit, plutôt inadapté socialement, roi de la procrastination, habité par des tocs et angoisses multiples, il a plus du anti-héros que l’inverse.
Son existence guidée par les faux pas et les quiproquos devient vite décalée, totalement loufoque et hilarante sous la plume de Fabrice Caro. L’auteur nous livre un roman plein d’humour qui dépeint avec beaucoup de justesse l’incongruité et l’absurdité des rapports sociaux et affectifs qui régissent parfois nos vies.
Enfin c’est un réel plaisir d’accompagner le quotidien d’Alan, personnage plein d’autodérision et particulièrement attachant avec son côté bancal et désabusé.
Si vous avez encore envie de rire vous pouvez également découvrir les bandes dessinées de l’auteur disponibles pour la plupart à la médiathèque.
En 110 pages, avec beaucoup de talent, Yamen Manai nous décrit une société tunisienne post « révolution du Jasmin » désabusée et abîmée, une société médiocre et rustre où la violence est omniprésente.
En s’appuyant sur son personnage qui en est depuis toujours la victime, il décrit les mécanismes de cette violence avec intelligence et décrypte comment depuis des siècles elle est un des piliers du modèle patriarcal tunisien.
Au-delà de la critique social, à travers son héros l’auteur nous interroge également sur la condition de victime et de bourreau, sur les notions d’humanité et de respect de soi. Grâce à sa rencontre avec un chien nous allons assister à la métamorphose du personnage principal, dont la clairvoyance va devenir redoutable.
Alors si vous ne craignez pas de voir ce qui se cache derrière les cartes postales des hôtels à touristes du front de mer, venez découvrir le quotidien plombant des habitant·es déshérité·es des banlieues périphériques et leurs bassesses ! Vous verrez, le dépaysement est assuré !
Il y a de la tragédie carthaginoise dans ce génial petit roman et aussi du Victor Hugo qui disait fort à propos « Ursus et Homo étaient liés d’une amitié étroite. Ursus était un homme, (Homo était une lessive, non je plaisante), Homo était un loup. »
Que vous inspire cette citation du célèbre auteur ? Dans deux heures je ramasse les copies. Bonne chance !
Ce matin Pablo l’éléphanteau est triste, il ne se trouve pas beau et voudrait changer de couleur, en finir avec le gris. Il profite d’une balade dans la savane avec son ami l’oiseau, pour lui demander son avis concernant le pelage qui lui irait le mieux. Sur chaque double page, nous découvrons la nouvelle envie de Pablo (girafe, serpent, vache…) accompagnée de la réaction de son compagnon. Le fil de l’histoire est très simple à suivre et crée l’impatience de voir la prochaine transformation. Les illustrations sont colorées et dynamiques. Ce duo improbable apporte une véritable bonne humeur.
Cet album plein de tendresse est très touchant et drôle. Il nous rappelle, au travers des personnages, nos inquiétudes et questionnements vis-à-vis du paraître et de la quête d’identité. Serions-nous plus belle·aux, plus apprécié·es sous une autre apparence ? Ces pensées concernent aussi la vie des enfants.
L’amitié est également bien présente entre les deux héros. Le petit oiseau n’hésite pas à donner son avis à Pablo avec sincérité quitte à parfois le vexer.
Finalement, le plus important est d’être entouré·e par l’amour de ces proches, quels que soient nos choix.
Ce sont des enfants, pour la plupart orphelins, mais tous sans le sou et dans la misère. Ils vont trouver en leur compagnon Colas, un espoir, un guide vers une vie meilleure. Ce nouvel horizon ne pourra cependant se faire sans sacrifices, car en l’année 1212, la foi est omniprésente et la seule « façon » d’atteindre le paradis est de partir en croisade défendre le tombeau du Christ. Ces enfants vont suivre un guide, mais peut-être pas celui qu’ils croyaient...
Inspiré de faits réels, ce fait divers dont très peu d’écrits subsistent, nous est conté par Chloé Cruchaudet et constitue un pan méconnu de l’histoire de France. Si la fin de cette croisade fait encore débat parmi les historiens, l’auteure s’en approprie une version et nous livre un récit épique à la dramaturgie parfaite. L’innocence et la naïveté des enfants sont un élément central de la trame et constituent le fil conducteur du récit. Un rejet du monde adulte, par qui tous les maux arrivent, est une des réflexions de l’œuvre. L’enfant serait-il supérieur à l’adulte du fait de son innocence ? Par delà cette question philosophique, la manipulation des masses du fait de l’ignorance et de l’inculture est également un sujet abordé qui fait écho encore aujourd’hui dans notre société. L’arc narratif est quant à lui savamment écrit, les personnages attachants nous font vivre différentes émotions : on s’attriste, on s’amuse et on s’inquiète. Le tout est parfaitement illustré par un trait fin et précis dont les volumes sont rehaussés d’une palette à l’ambiance « clair obscur » grâce à l’utilisation d’encres et de fusains. 172 magnifiques planches à découvrir dans un récit de haute tenue. - Michaël
Après une première partie très dure qui décrit la cruauté, les codes de la violence en milieu carcéral, on est soulagé pour Joseph qui va enfin retrouver sa liberté;mais à quel prix !
La" robinsonnade" qui s'ensuit est un vrai régal, un rapport à la nature magnifique ! Mais aussi une lutte contre la solitude : plus d'ennemi mais plus personne à aimer.
Et la grande question existencielle : peut-on vivre seul ?
De très beaux moments de lectures telle l'évocation de la longue et patiente approche de l'animal à apprivoiser.
Mon coup de coeur de cette rentrée !
C.
"Léon Blum, une vie héroïque" de Philippe Collin est une œuvre exploratrice de la vie d'un homme qui a su, malgré les épreuves, rester fidèle à ses convictions : aider les plus démunis.
Leader courageux et déterminé, il a navigué dans les eaux tumultueuses de la politique avec intégrité et conviction.
Sa vie est un témoignage de résilience et de force de caractère, des qualités dont nous avons tant besoin aujourd'hui.
Vous pensez connaître l’histoire de Blanche-Neige ? Vous croyez que la princesse serait assez naïve pour croquer dans une pomme offerte par une sorcière ou que ce prince, assez louche, embrasserait, sans son consentement, une jeune fille endormie ? Et les prénoms des sept nains, vous croyez réellement qu’une mère appellerait son enfant Atchoum, Grincheux ou Simplet ? Ce roman va faire fondre vos certitudes !
Le début de ce conte est le même : un chasseur à bien été envoyé par la méchante belle-mère pour tuer Blanche-Neige et lui rapporter son cœur. Pour le reste, on vous a menti !
Dans la version de Côme D’Onnio, Blanche-Neige est une cheffe d’entreprise qui se bat pour de meilleures conditions de travail. Elle est végétarienne et laisse les nains s’occuper des tâches ménagères et de la cuisine. La belle-mère se retrouve cuisinière d’un « Déj-carriole » (l’ancêtre du food-truck), et espère bien réussir à empoisonner la princesse. Le prince charmant ? eh bien, il n’est finalement pas si important… Je ne vais pas vous en dévoiler plus : pour connaître toute la vérité, croquez vite dans ce livre à pleines dents !
C’est une lecture très drôle à l’humour décapant, avec une histoire originale et moderne qui aborde des thèmes importants comme l’écologie, le respect animal, les stéréotypes, le droit des femmes ou encore le monde social et économique. Les personnages revisités ont de la personnalité, de la persévérance et même la reine se révèle attachante.
En bonus, on trouve à la fin du roman les deux recettes inventées par la reine : « les croquettes de chou-fleur » et « le brownie au chocolat vegan rudement bon ». Miam !
En 1973, Glenn a 13 ans lorsque ses parents décident, à cause de résultats scolaires moyens, de l’envoyer en pensionnat au manoir Chartwell, école privée reconnue pour son sérieux et sa rigueur. Là-bas il va apprendre la vie en collectivité, se faire des amis, mais également découvrir la face sombre de l’humanité. À l’instar de ses camarades, il sera victime de pédocriminalité : une proie bien trop facile pour le directeur d’établissement dont les boniments et le charisme n’éveilleront jamais aucun soupçon…
Il fallait beaucoup de courage à Glenn Head pour enfin dévoiler son histoire, son drame et tous ces drames. Il a eu cette force, cette volonté de révéler au monde entier son mal-être, cette blessure profonde qui ne guérira peut-être jamais. Œuvre exutoire, elle est aussi œuvre de salut public, puisqu’elle permet de comprendre, de mieux appréhender et donc de mieux aider les victimes de pédocriminalité. L’auteur nous parle du manoir et de son monstre, mais il ne s’arrête pas là puisqu’il continue son récit jusqu’à plus tard, en 2011, ou à cinquante ans, il trouve enfin un peu de repos dans son esprit et son corps meurtris. Voilà une des forces de ce témoignage, ne pas ce contenter d’un moment, mais bien de suivre au fil des années Glenn Head dans sa construction en tant qu’homme, en tant qu’individu. Il décrit ses relations avec ses parents et leur déni de toute cette histoire. Il nous parle de son mal-être qu’il oubliera régulièrement, à la faveur d’une bonne cuite. Il évoque, sans équivoque, ses relations avec la gente féminine, qu’il ne saura jamais vraiment aimer, accepter. Par moment, nous recroisons également d’anciens camarades de Glenn et tout comme lui, les années ont passé, sans la moindre flamme, éteinte trop rapidement.
Oui, il fallait du courage, mais aussi beaucoup de talent pour s’ouvrir de la sorte et partager ces horreurs dans un album sans voyeurisme et à la portée de tous et toutes.
"Mourir (ça n'existe pas)" est un titre particulier, à l'atmosphère étrange, mais qui prend aux tripes et tout son sens à chaque page lue.
Au pays imaginaire, les créatures sont nombreuses. Elles attendent impatiemment d’être choisies par un.e enfant pour devenir leur meilleur ami. Beekle, lui, attend depuis longtemps et ça le rend triste. Si bien qu’un jour, il décide d’inverser les rôles et de trouver par lui même son enfant. Pour cela, il doit réaliser l’impensable : partir pour le monde réel... Little Urban nous propose de découvrir un personnage original et attachant : Beekle, l’ami imaginaire. Cette créature sensible et expressive, dont le graphisme « simplifié » permet à chacun de se l’approprier, pourrait devenir une référence jeunesse incontournable. Abordant des thématiques importantes de l’enfance - la solitude, l’amitié et sans en avoir l’air, la créativité - le récit nous plonge dans notre propre enfance et l’angoisse de se faire un tout premier ami. Subtil et efficace, cet album est magnifiquement illustré. Habile mélange de peinture digitale et traditionnelle, les planches de Dan Santat sont des fresques minutieuses dont la composition, la mise en scène sont bien pensées. Dans les premières pages de ses aventures, Beekle apparaît tout petit, souvent dans un coin de l’illustration, écrasé par le décor et certainement sa solitude. Puis au fur à mesure, il trouve sa place et le cadrage se resserre sur lui, montrant ainsi sa prise de confiance. Beekle à besoin d’un.e ami.e : et si vous veniez l’emprunter à l’Espace COOLturel ? - Michaël
Yeowoo a 5 ans lorsque ses parents, le jour de son anniversaire, lui annoncent leur séparation. Depuis ce triste jour, elle vit avec sa tante et son grand-père sans jamais aucune nouvelle de sa maman et à peine plus de son père.
Se sentant abandonnée, elle ne sera jamais vraiment en paix, toujours en colère et repliée sur elle-même. Elle ne liera pas de lien affectif avec ses nouveaux tuteur·rices, ni ne se fera de nouveaux ami·es. Cependant, la jeune renarde va rencontrer Paulette, un poule sans poussin qui, attendrie par le caractère revêche de Yeowoo, va la prendre sous son aile…
Yunbo, autrice sud-coréenne, nous propose un récit plein de charme et de tendresse dont le thème, l’abandon, est traité avec beaucoup de justesse. Cette petite renarde - les personnages de cette œuvre sont anthropomorphes – est, malgré son sale caractère, attachante. On se prend vite d’affection pour cette petite fille dont la vie a basculé sans qu’elle en comprenne les raisons. Ses colères, ses bouderies, mais aussi ses émerveillements sont autant de moments forts partager, le personnage en deviendrait presque réel tant les situations sont crédibles et plausibles. Paulette, la poule, n’est elle-même pas en reste, puisqu’elle aussi possède une personnalité rare, délicate, tournée vers le partage et l’entraide. Ce duo, pour le moins étonnant, poule et renarde, trouve un équilibre parfait entre fougue et calme, colère et apaisement. La transmission de l’adulte vers l’enfant se fait petit à petit et, témoins privilégiés, nous observons Yeowoo s’épanouir pour devenir enfin elle-même.
Yunbo est aussi une dessinatrice talentueuse. Ses illustrations, aux traits fins et minutieux, sont expressives et aquarellées parfaitement, donnant ainsi beaucoup plus de douceur et de relief à cette bande dessinée.
« Seizième printemps » est une bande dessinée jeunesse, récit complet de 112 pages qui plaira aux enfants avides de découvertes et d’œuvres différentes.
En protégeant la Terre, Abraham Slam, Golden Gail, Barbalien, le Colonel Weird et son robot Talky-Walky, Madame Dragonfly et Black Hammer, ont trouvé la mort dans une terrible explosion. 10 ans après, ces super-héros ne sont plus qu’un lointain souvenir, des légendes urbaines, des histoires que l’on racontent aux enfants... Et pourtant, loin de notre monde, ils sont là, résignés, prisonniers d’un univers prison, n’espérant qu’une seule chose, qu’on vienne les délivrer... S’il y a un comics de super-héros à lire absolument en ce moment, c’est bien la série Black Hammer. Pourquoi ce titre et pas plutôt un issu du mainstream ? Parce qu’elle possède de nombreux atouts. Pour commencer, elle est écrite par Jeff Lemire qui est certainement l’un des plus, si ce n’est le plus talentueux, scénaristes de bandes dessinées de ces 10 dernières années. Chaque récit qu’il développe est un bijou d’actions et d’émotions. Black Hammer ne déroge pas à cette règle. L’histoire est captivante et se découvre d’album en album sous le prisme des différents personnages. Nous découvrons page après page la personnalité de nos héros, certain plus mystérieux et/ou inquiétants que d’autres. Chaque vie, destin est un récit dans le récit, des histoires qui alimentent l’Histoire. Nous retrouvons donc des personnages aux destins variés qui n’ont, à par être des super-héros, rien en commun, mais qui vont devoir apprendre à vivre ensemble pour le meilleur comme pour le pire. Voilà ce qui rend cette aventure unique. Loin d’être manichéenne, la trame est subtile et elle nous plonge dans la psyché humaine, une véritable analyse de nous-même. Cette série est, pour le lecteur averti, un hommage aux illustres séries de super-héros. On y retrouve un peu de l’âme de Spider-Man, de Daredevil, du Batman, de Swamp Thing et de bien d’autres encore. Des références disséminées par-ci par-là, mais qui ne nuisent pas à la compréhension de l’œuvre. Jeff Lemire s’est associé à Dean Ormston pour le dessin. Cet illustrateur fait des merveilles avec un style rétro, mais surtout un découpage dynamique et efficace. Pour terminer, Black Hammer a remporté en 2017 l’Eisner award de la meilleur nouvelle série aux Etat-Unis, preuve - s’il en est encore besoin - de sa qualité. Alors, si vous aimez les bandes dessinées de super-héros, vous allez adorer, et si vous n’aimez pas, vous allez adorer quand même. - Michaël
Conseils lecture
Amoureux de l’humour par l’absurde,
ce titre est fait pour vous ! Geoffroy Monde, nous régale se saynètes
toutes plus drôles les unes que les autres. Du duel insolite de deux cowboys,
en passant par la triste condition de vie des génies de lampes magiques et en n’oubliant
pas, clin d’œil à notre profession, de faire régner le silence dans les
bibliothèques, l’auteur nous surprend par une écriture décalée, dont la chute
tombe au bon moment, le tout sublimé d’illustrations atypiques. Un vrai moment
de joie pour passer l’automne. - Michaël
Les Flores, de mères en filles, sont maudites : tous leurs hommes, maris et fils, meurent prématurément.
1918 au Brésil, dans le Nordeste, où le droit des femmes n'est pas reconnu, une lignée de dentellières résiste grâce à leur métier. Nous découvrons particulièrement Inês Flores, la narratrice et son amie Eugênia, mariée contre son gré à 15 ans. Malgré leur éloignement, elles trouvent le moyen de communiquer grâce à un code caché dans la broderie, le but étant d'aider Eugènia à s'extirper de l'emprise de ce mariage.
En parallèle, en 2010, nous suivons Alice, militante féministe à Rio. Celle-ci reçoit la visite d’une tante éloignée qui lui transmet un voile de messe en dentelle. À travers ce présent mystérieux, symbolisant la soumission, la jeune fille va se plonger dans l'histoire de sa famille et le combat mené cent ans plus tôt pour l'émancipation féminine.
Ce roman qui fait le lien entre les générations, délivre de beaux messages sur la sororité, la lutte des femmes pour leur place dans la société et leur liberté. Il brosse les portraits touchants d’audacieuses héroïnes, aspirant aux mêmes valeurs, chacune à leur époque.
Angélica Lopes, habituellement récompensée en littérature jeunesse, signe ici son tout premier roman pour adultes.
Ce premier roman, librement inspiré d’une histoire vraie, retrace la fuite d'une jeune nonne dans l’Angleterre du XIVᵉ siècle.
Avec la complicité de quelques sœurs, Joan simule sa propre mort afin de s’évader du couvent de Saint-Clément d’York, dans le Yorkshire, où elle est cloîtrée depuis l’enfance, suite au décès de ses parents. Commence alors pour elle une vie d’aventures, de plaisirs et de découvertes, qui la mènera jusqu’à Londres. Mais elle devra veiller à échapper à la vengeance de l’impitoyable abbesse, prête à tout pour la retrouver.
Dans le contexte historique du Moyen Âge, on prend plaisir à suivre l’épopée de cette femme exceptionnelle, dont la soif de liberté, de plaisir et de connaissance dépasse la peur. Joan de Leeds est une héroïne observatrice, volontaire et attachante, entourée de personnages hauts en couleur.
L’écriture délicate mêle humour et poésie pour offrir un roman d’émancipation captivant et inspirant, mettant en lumière une protagoniste féminine lumineuse.
La fin imaginée par l’auteur laisse planer un mystère sur le destin de Joan — on aimerait savoir ce qu’elle devient.
Une très belle lecture autour d’un fait réel méconnu.
Gabriel, homme au tempérament bien trempé, réussit à racheter le domaine forestier équatorial perdu il y a plusieurs générations par sa famille. Son but est de lui rendre son prestige d’antan et par-delà même, celui de son lignage. Dans son rêve, il va entraîner ses deux aînés qu’il connaît à peine, Mathilde et Simon. Il les arrache à leur mère, les sépare de plus de 5000 kilomètres pour leur faire découvrir un nouveau monde : l’Afrique. Cette nouvelle relation père/enfants, qui plus est dans un milieu inconnu, ne se fera certainement pas sans fracas, mais aveuglé par son égoïsme, Gabriel ne verra pas le drame qui se joue sous ses yeux. Après la lecture de cet album, récit complet en un volume, qui peut encore dire que la bande dessinée n’est pas de la littérature ? Pierre-Henry Gomont est un auteur qui manie la plume avec habileté et magnificence. En quelques lignes, il nous happe dans son univers. Son habileté à jouer avec les mots est l’un des points forts de l’artiste, mais son talent d’illustrateur n’est pas en deçà. Son trait est vivant et dynamique. Nous oscillons entre de pleines pages sauvages montrant la jungle équatoriale et des scènes plus intimistes entre les personnages où le style expressionniste de l’auteur fait mouche. Le récit est quant à lui certes passionnant, mais aussi émouvant. Véritable saga, nous assistons au lent, mais inévitable, éclatement de la structure familiale. Les relations entre les personnages sont fortes, on y ressent l’amour comme la haine, la peine comme la joie. Cela est dû au-delà de la qualité du dessin, à la justesse des caractères et de la psychologie des personnages. Une certaine forme de liberté se dégage de l’œuvre et au final, également beaucoup d’amour pour ce père par trop excessif... Lisez cette œuvre, découvrez cet auteur hors norme, vous ne pourrez que tomber sous son charme. - Michaël
Halfdan Pisket est fils d’immigré. S’il vit aujourd’hui au Danemark et réalise des bandes dessinées sans craindre la censure et/ou la prison, c’est en grande partie grâce à son père. Turc-arménien ou Arméno-turc, son père a quitté il y a longtemps son village natal situé dans la zone frontalière instable entre la Turquie et l’Arménie. A une époque, toutes les religions et coutumes y cohabitaient en paix. Depuis le génocide arménien, un climat de défiance et d’instabilité s’est installé. Des évènements dramatiques se sont enchaînés et ont rendu son père amer et haineux. Cette situation l’a poussé à partir vers d’autres cieux où de meilleurs lendemains lui semblaient promis, mais ailleurs et exilé, sera-t-il mieux considéré ? Élaborée à partir d’interviews du père de l’auteur et d’anecdotes de sa vie dans les années 60-70, cette histoire difficile dépeint le quotidien d’un homme déchiré par la guerre et l’occupation d’une part et ses convictions et sa soif de liberté d’autre part. Avec ce témoignage, il dénonce les maltraitances subies par les minorités et l’accueil difficile réservé aux peuples déracinés. Un témoignage choc et prenant, appuyé par un dessin expressif au noir profond. Récit complet en 3 volumes. - Michaël
Être orphelin à l’âge de 8 ans n’est pas chose facile, mais penser que rien ne puisse-être pire est une fâcheuse erreur ! Notre jeune héros va l’apprendre à ses dépends lorsqu’une malheureuse rencontre va le transformer en souris. Toutefois, pour surmonter toutes ces épreuves, il pourra compter sur son exubérante mamie qui lui réserve bien des surprises... Classique jeunesse de la littérature écrit en 1983, « Sacrées sorcières »captive encore de nos jours les enfants. Pour cela Roald Dahl a utilisé une recette magique à base d’émotions, d’humour, d’héroïsme et de magie. Il a saupoudré le tout d’effluves de mystères et de frissons, pour en faire une œuvre culte et appréciée par tous les enfants, petits et grands. Adapté ce chef d’œuvre sans en perdre le parfum n’est pas forcément aisé, mais Pénélope Bagieu s’en est sorti à merveille. Le ton du récit adapté est bien présent, les ingrédients sont tous là et il ne restait qu’à rendre ce monde tangible à travers des illustrations. Cette fois encore, elle réussit à donner corps et vie aux personnages, sans les dénaturer. Les sorcières sont effrayantes et les souris trop mignonnes. Une belle performance d’autrice qui n’a pas eu peur de s’attaquer à un monstre de la littérature jeunesse. - Michaël
Le 17 mars 2020, en pleine crise du COVID-19, le président de la République annonce pour des raisons sanitaires le confinement du peuple français, et cela pour une durée encore indéterminée. Pour José, Caro et leurs enfants va commencer une nouvelle expérience de vie, ou comment passer ensemble 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, sans perdre la tête.
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Fortu, comme à son habitude, nous livre un témoignage très personnel sur son vécu de cet isolement. Bien évidemment, l’humour est le moteur de cette œuvre, mais sous des aspects « blaguaire », il pousse à la réflexion et nous interroge sur notre société et nos modes de consommation. Il nous met devant nos contradictions sans s’exclure lui même de l’équation. « Journal d’un confiné » est un titre humoristique qui peut être lu par tous. 55 gags réalisés en temps réel, une véritable performance d’auteur qui est à signaler. L’Espace COOLturel est heureux de vous faire découvrir ce titre en exclusivité. Nul doute qu’il sera au-delà, une œuvre de référence.
Tom a peur, c’est son premier jour dans sa nouvelle école. Alors, pour le rassurer son papa lui dit maladroitement : « Les grands garçons ne pleurent pas. » Fort de ce conseil, Tom ne pleura pas, mais en chemin… Jonty Howley nous offre une histoire touchante, pleine de tendresse et d’émotion. Il décrit simplement, mais avec justesse, l’image que notre société nous impose de la masculinité. Un homme ça doit être fort, ça ne montre pas ses émotions et surtout ça ne pleure pas ! Poncif qui a la vie dure ! Et pourtant, en quelques pages Jonty Howley réussit à détruire ce modèle archaïque. Il laisse les hommes, les garçons s’exprimer et montre toute leur sensibilité. Loin des clichés, il dépeint une relation sans préjugés entre un père et son fils, saine et surtout sincère. Cet album ne s’arrête pas là, car l’enfant apprendra également que les larmes versées ne sont pas toujours de tristesse, mais qu’elles peuvent être de natures différentes selon les situations. Jonty Howley illustre également son récit et nous transmet toute sa sensibilité par des dessins tendres à la technique irréprochable. Pas de « larmes de crocodile » avec ce titre, mais un réel coup de cœur. - Michaël
Un ours sans histoire
De Christian Merveille et Laurent Simon
Un ours vit une petite vie tranquille dans la forêt sans qu’il ne lui arrive jamais rien. Un jour, lors de sa promenade, il croise tout un tas d’animaux à qui il arrive de drôles d’histoires : un oisillon tombé du nid, un castor coincé dans son barrage, un loup qui a une épine dans le pied… L’ours leur apporte à chacun une aide précieuse, mais il est triste : à lui, il ne lui arrive jamais d’histoire ! Jusqu’à ce qu’une rumeur se faufile dans la forêt sur un ours très altruiste sans histoire…
Cet album tendre est un beau récit sur l’entraide et les trajectoires de vies qui s’entremêlent. Chaque animal vit sa vie mais ils ont tous besoin de l’ours pour les secourir. Et finalement, si toute la forêt se mets à parler de l’ours, ce n’est pas parce qu’il a vécu une aventure extraordinaire mais bien par la somme de tous ses petits gestes pour aider ses compagnons.
Les illustrations sont au diapason du récit : apaisantes, délicates, les belles nuances de couleurs de la forêt mettent en exergue cette force tranquille qui émane du personnage principal. Et l’ours en lui-même paraît très bienveillant, à l’écoute, peut-être un brin mélancolique.
Cette histoire calme et réconfortante nous offre une pause de douceur bienvenue.
Rose est un garçon doux et attentionné. Il a été élevé parmi les danseuses du cabaret « Le jardin » dont la propriétaire n’est autre que sa mère. Il est le chouchou de ces dames, leur petit bourgeon. Il aime porter de belles robes et par dessus tout, il aime la danse et se produire sur scène. Rose est beau et talentueux et ne va pas tarder à attirer le tout Paris... « Le jardin » est une œuvre à l’image de son personnage, douce et positive. Il en émane une sensation de bien-être indescriptible, sans nul doute véhiculée par des personnages tous et toutes bienveillant·es. L’histoire est simplement belle, ne verse jamais dans le mélodrame, bien au contraire. A l’opposé de nombreux titres, elle ne s’intéresse qu’à la meilleure version de l’humanité. Pas besoin de drame pour faire un récit fort et poignant, « Le jardin » nous le prouve de la plus belle des manières. Rose est un personnage transgenre dont la bonté et l’innocence rendent le monde meilleur. L’autrice, Gaëlle Geniller, n’explore pas l’intimité de son jeune héros, elle n’entre pas dans ce jeu d’où naissent inéluctablement les clichés. Chacun·e conclura comme elle/il le souhaite ce récit. Les illustrations, proches d’un film d’animation, sont magnifiques, pleines de détails et d’éléments directement sortis des années 20. Les couleurs, aux contrastes éclatants, rayonnent et mettent en lumière le trait fin et délicat de l’autrice. « Le jardin » s’adresse à un large public et va rapidement trouver sa place dans le cœur de chacun·e. - Michaël
Stress a 37 ans, il est réalisateur et a une idée en tête, concevoir un film sur son quartier « Le panier », ou plus exactement sur ce qu’il était avant la « gentrification », quand sa bande et lui zonaient sur un banc en fumant des joints, un quartier populaire. Celui qui accueillait toute la misère de Marseille, loin des clichés d’aujourd’hui, vitrine de l’office de tourisme.
Stress, il voudrait tirer le portrait de cette époque révolue, retrouver ses potes et leur demander de témoigner, avant que son ancien quartier ne devienne définitivement un Disneyland pour les touristes que vomissent les paquebots chaque jour. Seulement Stress passe ses soirées de fêtes en fêtes vaguement à la recherche de financements pour son projet, parce que le fond du problème c’est qu’il est trop intransigeant avec les autres et pas assez avec lui-même… En attendant, quand il a besoin de thune il filme des mariages orientaux dans les quartiers nord.
Un merveilleux voyage à Marseille et dans le temps, fait d’allers-retours entre la ville d’hier et celle d’aujourd’hui. Une écriture percutante à l’image de ce personnage sans concessions. Un récit qui vous emporte et une force narrative du quotidien, les odeurs, la bouffe, les fringues, la musique, des habitudes et des attitudes décryptées à la loupe. Deux sociétés antagonistes, celle des pauvres d’hier, sans papiers, et des riches d’aujourd’hui, bobos, artistes, Parisiens immigrés, qui cohabitent à quelques années de distance. Un travail d’ethnographe moderne et une grande histoire d’amour, celle du héros et de sa ville qu’il voit changer, comme lui à l’aube de la quarantaine, et peu à peu oublier son passé. Un magnifique roman empreint de la nostalgie de celui qui quitte son pays malgré lui.
Il y a le delta de l’Ebre, les hérons, les grenouilles, les roseaux et les rizières. Il y a ces hommes et ces femmes, la terre chevillée au corps, terre nourricière, terrain de jeu pour les plus jeunes, immense espace de liberté, chaîne et boulet au pied pour les adultes asservis depuis toujours à la noblesse locale, qui n’en a que le nom et non l’âme.
Entre front républicain, guerre civile et dictature de Franco, se dessinent les vies de trois générations de femmes, dans les eaux calmes ou parfois troubles du marais, dans la tempête qui point sur l’océan. Des vies souvent dures, âpres et cruelles, des existences où cohabitent souffrances, amour et espoir, celui d’un monde plus juste et moins totalitaire.
Au fil de l’eau, de l’onde du vent sur sa surface, comme un frisson dans les roseaux, l’autrice fait une description très sensible des personnages, de leurs sentiments et aussi des paysages. De la nature, d’une terre en équilibre sur la ligne d’horizon où les destins basculent.
Un magnifique récit d'une justesse exceptionnelle. Un roman universel et intemporel à la hauteur des plus grands classiques de la littérature, comme si l’on apercevait en reflet, dans l’eau du delta, les montagnes de « Pour qui sonne le glas ? ».
Lorsque le jeune Bobby Bailey se présente au centre de recrutement de l’armée des USA, il ne s’attend pas à être envoyé vers un mystérieux programme top secret appelé "projet Prometheus", qui recherche des jeunes recrues sans attaches…
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Débuté dans les années 1980, cette oeuvre monumentale de Barry Windsor-Smith trouve enfin sa conclusion dans un magnifique album d’environ 400 pages. Cet auteur, star dans son pays, reconnu pour son travail sur Conan le barbare et également pour ce qui restera comme l’un de ses chef d’œuvres : Wolverine : l’arme X, revient enfin en France avec ce titre dantesque. Pas de super-héros ici, « simplement » des personnes aux histoires différentes et pourtant liées. « Monstres » est un récit noir, dur, âpre sur l’humanité et cette face monstrueuse dont elle fait parfois, trop souvent, preuve. Cette monstruosité qui prend différentes formes et aux causes multiples. Ce récit brosse le portrait, chapitre après chapitre, de chaque protagoniste du drame qui se joue sous nos yeux. Nous voyageons dans le temps, apprenons à les connaître et lorsque le puzzle est enfin assemblé, à leur dire au revoir dans une fin absolument magnifique. Le scénario est intense et profond, captivant de bout en bout, il ne laisse absolument pas indifférent. Le dessin, tout de noir et blanc, est fidèle au style de l’artiste. Rude et hachuré, il est réalisé à l’encre et à la plume.
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« Monsters » est donc un voyage épique couvrant deux générations d'histoire américaine dont les thèmes - traumatisme, destin, conscience et rédemption - se croisent dans un récit unique et singulier.
Ava est une jeune fille intrépide et pleine de joie. Elle vit dans la jungle et s’y amuse beaucoup. Lorsqu’une comète s’écrase non loin de chez elle, son tempérament la pousse à aller voir de plus près cette roche venue de l’espace. Mais, à sa grande surprise, elle y découvre Moon, un extraterrestre…
Quel magnifique album ! À sa découverte, à son ouverture, une seule exclamation nous accompagnait : « Wouah »
« Wouah ! » pour cette belle histoire sur l’amitié, la différence, et ce regard bienveillant que l’on peut porter sur l’autre — l’étranger — et sa façon de l’accueillir, de partager.
« Wouah ! » aussi pour les magnifiques planches de Mark Janssen, qui, dans un album grand format, nous en mettent plein les yeux. Un univers sauvage, foisonnant d’une faune et d’une flore extraordinaires, drapé d’un manteau de couleurs chatoyantes.
« Wouah ! » encore pour cet extraterrestre qui ne ressemble à aucun autre et qui mérite vraiment le détour tant sa trombine est adorable.
« Wouaaah ! » pour cet album splendide et touchant du début à la fin, tout simplement !
Ava est une jeune fille intrépide et pleine de joie. Elle vit dans la jungle et s’y amuse beaucoup. Lorsqu’une comète s’écrase non loin de chez elle, son tempérament la pousse à aller voir de plus près cette roche venue de l’espace. Mais, à sa grande surprise, elle y découvre Moon, un extraterrestre…
Quel magnifique album ! À sa découverte, à son ouverture, une seule exclamation nous accompagnait : « Wouah »
« Wouah ! » pour cette belle histoire sur l’amitié, la différence, et ce regard bienveillant que l’on peut porter sur l’autre — l’étranger — et sa façon de l’accueillir, de partager.
« Wouah ! » aussi pour les magnifiques planches de Mark Janssen, qui, dans un album grand format, nous en mettent plein les yeux. Un univers sauvage, foisonnant d’une faune et d’une flore extraordinaires, drapé d’un manteau de couleurs chatoyantes.
« Wouah ! » encore pour cet extraterrestre qui ne ressemble à aucun autre et qui mérite vraiment le détour tant sa trombine est adorable.
« Wouaaah ! » pour cet album splendide et touchant du début à la fin, tout simplement !
Lip dip paint : la technique du marquage aux lèvres. C’est le refrain qu’entonne chaque nouvelle ouvrière de l’usine de montres de luxe USRC afin de peindre le cadran de ces petites merveilles. Edna entonne avec insouciance et confiance ce nouveau mantra lorsqu’elle rejoint les établis de l’usine en 1918 auprès de Grace, Katherine et de quelques autres. Une osmose se crée entre les « ghost girls », silhouettes luminescentes dansant au sein de la nuit et de la prohibition. Phosphorescentes, elles le sont devenues car la peinture fournie par leurs patrons est composée de radium, qui lentement les empoisonne. Facile de les suivre dans la nuit... Edna, dont la santé commence à vaciller, trouve de l’aide auprès du médecin de l’usine testant de nouvelles prophylaxies et de quelques beaux esprits indépendants. L’occasion de s’interroger sur le système d’exploitation mis en place sans le consentement de ses petites mains. Avec ses crayons de couleurs, savamment limités à un camaïeu vert radium (forcément !) et violet, Cy nous plonge dans l’univers de ces jeunes ouvrières américaines sacrifiées sur l’autel du ‘progrès’. La beauté des planches alliée à la fraîcheur de ces jeunes femmes offrent un contraste saisissant avec le cauchemar qui s’annonce et envahit les pages au fil du récit. Un bel hommage qui rend justice à ces femmes bien souvent mortes dans la misère et l’indifférence collective parce qu’anonymes et pauvres.