Conseils lecture
Sacha et Charlie sont frères, ils ne s’entendent pas très bien. Enfin, c’est surtout Sacha qui ne supporte pas la présence de son petit frère et lui fait bien savoir. Un accident va les séparer, tous deux vont se retrouver dans un monde étrange, peuplé de monstres, et où leur survie ne dépendra que d’une seule chose : le pardon...
A regarder cet ouvrage et principalement les illustrations, nous pourrions facilement penser qu’il s’agit d’un titre destiné à un jeune lectorat. Détrompez-vous : même si le duo d’auteurs a déjà œuvré avec brio pour la littérature jeunesse, ce titre est destiné à tous les publics. L’intrigue est extrêmement bien ficelée, jouant sur deux narrations : on suit l’errance de Sacha puis celle de Charlie, à tour de rôle. L’ambiance est inquiétante voir pesante, tant on sent que quelque chose de plus profond est sous-jacent. Chaque récit se lie à l’autre, chaque action influe sur la destinée de l’un pour au final, les réunir. Une fin qui nous fait sortir de l’imaginaire pour nous renvoyer la réalité en pleine face. Une fin qui aborde un thème difficile et nous propose, non pas une solution ou une réponse, mais une voie à suivre. Alors lorsque l’on regarde à nouveau les magnifiques aquarelles d’Anne Montel, on se dit que les auteurs ont sciemment proposé ce style juvénile pour lier le monde des adultes à celui des enfants afin de faire lecture commune et ainsi permettre le partage, le débat. Un récit maîtrisé de bout en bout qui ne vous laissera pas insensible par son rythme, ses illustrations et sa thématique. - Michaël
Une petite fille et sa maman passent devant une dame assise sur le sol portant un bébé dans les bras. Jour après jour, la petite fille s’attriste de la situation, elle ne comprend pas le malheur et voudrait seulement prendre un autre chemin pour ne plus les voir, pour ne plus y penser…
« Sans détour » est un album jeunesse d’une grande sensibilité. Déjà, par la thématique qu’il porte, la pauvreté. Aussi par son texte, écrit à la première personne, la petite fille nous parle de son ressenti, nous fait part de ses interrogations. Les mots, les phrases sont choisis avec minutie, ils, tels des haïkus, nous entraînent avec eux, nous guident dans cette histoire pleine de vécu. Ensuite, cet album est magnifiquement illustré par Tom Haugomat, véritable maître de l’aplat et de la scénographie. Comme à son habitude, il utilise une palette restreinte de couleurs, le résultat est tout simplement beau, époustouflant.
Il se dégage de ce titre beaucoup d’émotions, certes de la tristesse, mais le final est tout autre, il ouvre sur des valeurs que tous et toutes devrions partager : l’entraide et la bienveillance. Une belle leçon de vie.
Dans un appartement bourgeois Parisien, au cœur de la chaleur d’aout, deux couples se retrouvent autour d’un dîner. L’invitation vient d’Etienne, un avocat érudit, sûr de lui, séducteur et prêt à tout pour obtenir ce qu’il désire.
Claudia, sa femme, timide maladive, a passé la journée aux fourneaux. Autant pour servir un repas parfait à ses hôtes, que pour cacher son mal-être. Elle est terrorisée à l’idée de participer à cette soirée. « Elle se demande si elle parviendra un jour à résoudre cette contradiction : elle voudrait se rendre invisible et pourtant, elle leur en veut terriblement à tous de la rendre invisible ».
Les invité·es, des ami·es d’Etienne, ne semblent pas très enthousiastes non plus. Iels arrivent d’ailleurs séparément. Johar est une femme de pouvoir, carriériste. Tunisienne d’origine modeste, elle a gravi tous les échelons de la réussite. Rémi, lui, est professeur d’économie en prépa. Mariés depuis plusieurs années, leur relation qui s’est ancrée entre routine et vie professionnelle s’effiloche.
Dans ce huis clos pesant, les personnages sont également prisonnier·es de leurs vies respectives. De l’apéritif au dessert, tout ne va pas être si parfait. La tension monte, chacun et chacune, rumine ses objectifs, ses secrets… Les rares échappées sur le balcon pour prendre l’air, fumer ou téléphoner, suffiront-elles à faire redescendre la température et l’atmosphère épicée ?
Cécile Tlili, nous brosse aussi le portrait de deux femmes en apparence totalement opposées, mais qui finalement se rejoignent dans la prise en main de leur destin.
Un premier roman très intense. Sororité, sexisme, maternité, vie de couple, travail, trahisons, mensonges, secrets et remises en question, sont les ingrédients subtilement dosés de « Simple dîner ». Un régal.
« Un simple Diner » a reçu le prix littéraire Gisèle Halimi 2023.
Adam Strange, super-héros terrien, est connu pour ses exploits sur la planète Rann. Là-bas, il a endossé le rôle de chef de guerre, luttant et vainquant une terrifiante invasion extraterrestre. Son histoire et ses combats, il les raconte dans un livre au succès fulgurant. Cependant, la véracité de ses dires est mise à défaut par un lecteur, lui reprochant l’omission de nombreux massacres d’innocent·es… Quelques heures plus tard, ce même lecteur est retrouvé assassiné.
« Strange adventures » n’est pas un récit de super-héros traditionnel, non, il s’apparente plus à un récit de guerre dont il est difficile de parler sans trop en dévoiler. Cependant, lorsque l’on referme cette œuvre monumentale de 364 pages d’enquête, de rebondissements et d’émotions, nous restons sans voix, épuisé·es par cette lecture exigeante, par la trame implacable qui nous tient et ne nous libère que bien après avoir refermé ce livre. Cette force narrative est l’apanage des auteur·rices états-unien·nes qui jouent avec nos nerfs pour mieux les tordre, mieux nous essorer. « Strange adventures » est une étude, un questionnement sur la guerre, les choix, les actes et leurs conséquences.
Côté illustrations, deux artistes se partagent le travail : l’un pour la partie du récit se déroulant dans le présent, l’autre pour la partie située dans le passé. Cette dualité de style permet aux lecteur·rices de voyager facilement dans le temps, mais aussi d’apprécier en parallèle, le travail de deux artistes de qualité.
« Strange adventures » est un bien plus qu’un récit de super-héros, il est un questionnement sur notre humanité… rien que cela !
Michel, 19 ans, commence son apprentissage en coiffure dans le salon de Gérard. Il apprend les gestes et savoir faire de son métier auprès de Carole, une jolie blonde peu farouche. Le jeune homme inexpérimenté qu’il est, succombe évidemment à son charme...Etre coiffeur lui vaut quelques moqueries dans la cité, mais lui permet de se rapprocher facilement de la gent féminine et d’apprendre à la connaître. Notre jeune homme va donc découvrir – avec quelques difficultés mais surtout beaucoup de bonheur – qu’il n’a pas besoin d’être un apollon ou un séducteur pour toucher le cœur des femmes. Et surtout de celle qui - à son grand étonnement – lui plaît de plus en plus (malgré sa couleur ratée). Sylvain Cabot signe ici un titre plein de tendresse à l’atmosphère rétro. Un petit morceau de vie – de quartier et de jeune adulte – dans un lieu on ne peut plus banal, mais où chacun à force de petites attentions portées à l’autre, trouve sa place et se sent bien. Sylvain Cabot et son héros Michel partagent ceci : savoir enjoliver la vie à coup de couleur et de pinceau. N’hésitez donc pas, au salon Dolorès & Gérard, vous passerez un doux moment en bien agréable compagnie. - Michaël
Lip dip paint : la technique du marquage aux lèvres. C’est le refrain qu’entonne chaque nouvelle ouvrière de l’usine de montres de luxe USRC afin de peindre le cadran de ces petites merveilles. Edna entonne avec insouciance et confiance ce nouveau mantra lorsqu’elle rejoint les établis de l’usine en 1918 auprès de Grace, Katherine et de quelques autres. Une osmose se crée entre les « ghost girls », silhouettes luminescentes dansant au sein de la nuit et de la prohibition. Phosphorescentes, elles le sont devenues car la peinture fournie par leurs patrons est composée de radium, qui lentement les empoisonne. Facile de les suivre dans la nuit... Edna, dont la santé commence à vaciller, trouve de l’aide auprès du médecin de l’usine testant de nouvelles prophylaxies et de quelques beaux esprits indépendants. L’occasion de s’interroger sur le système d’exploitation mis en place sans le consentement de ses petites mains. Avec ses crayons de couleurs, savamment limités à un camaïeu vert radium (forcément !) et violet, Cy nous plonge dans l’univers de ces jeunes ouvrières américaines sacrifiées sur l’autel du ‘progrès’. La beauté des planches alliée à la fraîcheur de ces jeunes femmes offrent un contraste saisissant avec le cauchemar qui s’annonce et envahit les pages au fil du récit. Un bel hommage qui rend justice à ces femmes bien souvent mortes dans la misère et l’indifférence collective parce qu’anonymes et pauvres.
Saul Karoo est un homme respecté dans son travail. Il est « script doctor » : on fait appel à lui pour améliorer le scénario d’un film. Un éventuel navet peut, sur ses conseils, se transformer en véritable chef-d’œuvre. Aussi brillant soit-il, il est un domaine où il n’excelle pas : les relations humaines. Son mariage est un échec, il ne parle pas à son fils et son penchant pour l’alcool et sa désinvolture en font un personnage difficilement fréquentable. Sa vie va basculer le jour où il découvre, en visionnant les rushs d’un film à sauver, une actrice qui sans le vouloir va lui rendre une force qu’il ne soupçonnait plus et donner un nouveau but à sa vie... Frédéric Bézian adapte avec talent le roman à succès « Karoo » de Steve Tesich. On y retrouve la même tonalité, les mêmes ressentis que dans le récit original, l’histoire d’une vie et du chemin à mener pour lui donner sens. En quelque sorte notre histoire à tous, mais chacun avec ses propres démons. Saul pense trouver le repos et réécrivant, manipulant l’histoire de ses proches comme si son métier lui donnait le pouvoir de jouer avec les destins de chacun. Cependant, la vie n’est pas un scénario que l’on peut modifier à souhait ; elle est surprenante, incontrôlable et il va l’apprendre à ses dépens. Si le récit est captivant, le style graphique de Bézian l’est tout autant : trait fin, haché, voire nerveux à l’image du personnage. Quelques aplats de couleurs viennent rompre par moment la monotonie du noir et blanc dominant et créent la sensation de rythme. La partie graphique est en parfaite adéquation avec le texte, l’un et l’autre se sublimant. « Karoo » est un récit subtil sur l’âme humaine et une œuvre romanesque à découvrir. - Michaël
Entrez dans le journal de Piranèse, qui vit dans une maison tellement immense qu’il n’a pas réussi à compter le nombre de pièces qu’elle contient. Cette maison, il l’explore. Il note, il analyse, il cherche à comprendre ; et, de temps en temps, il y croise l’Autre, scientifique à la recherche du « grand savoir ». Un jour, Piranèse découvre l’existence d’un troisième habitant dans ce palais labyrinthique. Sa réalité et ses certitudes en sont bouleversées… Et de plus grandes questions subsistent pour nous lecteurs : Où vivent-ils ? Ce monde est-il réel ? Comment expliquer l’inexplicable ?
Susanna Clarke y répondra avec brio dans un récit très bien ficelé qui prendra une toute nouvelle dimension, un récit qui étonne sans cesse, décontenance, et même manipule parfois. L’autrice pose au passage quelques questions philosophiques passionnantes sur la vérité et la réalité. Un roman troublant, original, unique.
Les renardeaux s’amusent dans la neige sous l’œil protecteur de leur maman. Mais soudain, ils ont disparu ! Elle s’inquiète, les cherche… Et en retrouve un, puis deux, puis trois... Amandine Momenceau nous propose de passer un moment rempli de tendresse avec son album habilement illustré. L’illustration en elle-même est réalisée en papier découpé, dans des tons pastels et crème, qui retranscrivent bien l’épais et moelleux manteau de neige dans lequel évolue la petite famille renard. Les animaux sont expressifs, vivants, sautillant joyeusement. Mais un deuxième niveau de découpe vient se rajouter, dans les pages elles-mêmes, apportant jeu de "cherche et trouve" et suspense tout au long du récit. Cette autrice nantaise nous donne à lire un album enveloppant, rassurant, idéal pour passer un moment de douceur avec les petits.
Voici une série jeunesse humoristique très réussie. Fabrice Parme nous raconte les histoires d’une petite fille riche, pleine d’énergie et de malice qui a tendance à s’ennuyer… Et de là, viennent les problèmes… Subtil mélange entre «Les petites filles modèles» et «Les petites Canailles», les récits d’Astrid Bromure sont drôles, pêchus et nerveux. Écrit avec finesse et élégance, chaque album est un récit complet et tient en haleine jusqu’au bout, car si l’humour est présent, il n’est que le vecteur d’histoires extraordinaires pleines de malice et de tendresse. Du très grand Parme, mais nous n’en attendions pas moins d’un très grand auteur/illustrateur. - Michaël
L'auteur, autiste Asperger, nous raconte avec humour sa participation au jeu de Questions pour un champion. Roman drôle construit sur le rythme de l'émission télévisée, situation cocasses. Le lecteur se glisse aussi dans les coulisses de l'émission. Clins d'oeil critiques de la part de ce personnage, sans ihnibition qu'est l'auteur. Et, pour ceux qui aiment : l'occasion de répondre aux multiples questions. Un réel divertissement, mais aussi l'occasion d'aborder la différence à travers le vécu d'Olivier Liron
C.
Durant une soirée, elle l’a rencontré, ils se sont parlé, ont beaucoup dansé et ils se sont aimés. Pourtant un soir, il disparaît sans un mot. Elle le cherchera longtemps et finira par le retrouver, lui, l’ours qu’elle aime. Alors ils se sont parlé, ont beaucoup dansé et ils se sont aimés. Encore, il partira, toujours sans un regard, mais cette fois, elle le suivra... Vincent Bourgeau, auteur jeunesse talentueux, compère le plus souvent d’Éric Ramadier, nous offre un récit pour adulte original et d’une rare beauté. Son récit structuré sur environ 300 pages, n’offre que très peu de mots et laisse place à l’illustration. De pleines pages aux tons doux, aux cadrages maîtrisés, permettent une lecture et une compréhension fluides. Le trait minimaliste et faussement tremblotant installe une ambiance contemplative et apaisante. Le récit est une histoire d’amour peu commune : celle d’une femme éperdument amoureuse. Classique me direz-vous ! Sauf que présentement l’homme est un ours. Parabole de la douceur féminine contre la dureté masculine, certainement pas. Juste une fable moderne sur les sentiments, le vide et l’absence comblés par l’amour et l’apparition du mystérieux, du fantastique. Beaucoup se retrouveront dans la mélancolie de l’héroïne, sur ce qui est et ce qui aurait pu être. La sincérité de l’œuvre nous touche au plus profond de notre être et le final nous emporte, grâce à une prouesse technique, dans la valse éternelle des sentiments. - Michaël
Conseils lecture
Dans ce récit autobiographique, Aimée De Jongh nous raconte quatre histoires, quatre rencontres ayant pour point commun un chauffeur de taxi. Assise à l’arrière d’une voiture, elle nous fait parcourir le monde, de Paris à Los Angeles en passant par Washington ou encore Jakarta. Chacun de ces hommes délivre son histoire, tant bien que mal, à l’autrice pleine de vie et de gaieté. Des moments d’intimité rares ou se crée, au fil des conversations, un lien unique de confiance mutuelle.
⠀
« Taxi ! » est un récit court, un huit clos empli d’humanité qui fait du bien ! - Michaël
Lucien est, comme son modèle le célèbre aventurier de l’étrange Harry Price, passionné d’histoires étranges, remplies de monstres et autres revenants. Alors, lorsque lui et sa famille emménagent dans une nouvelle ville, sa première envie, bien avant de se faire des amis, est de trouver les phénomènes paranormaux que pourrait bien abriter cette petite bourgade... « Lucien et les mystérieux phénomènes » est une série jeunesse d’aventure pseudo-fantastique, mais qui traite avant tout d’environnement et d’écologie. Sans y paraître, elle permet à l’enfant de prendre conscience de la société de consommation, de la surproduction et des problèmes que cela entraîne. Bien sûr, c’est subtil car enrobé par une passionnante enquête paranormale. Notre jeune héros est accompagné de sa maligne petite soeur, ce qui permet à chaque enfant de s’identifier et se projeter dans le récit. Le thème de l’amitié est également bien présent dans l’album, cela est certes moins original, car assez courant en bande dessinée jeunesse. La réussite de ce titre vaut également par les illustrations d’Alexis Horellou, dont le trait fin et délicat, aidé par des couleurs aux tons orangés, crée une atmosphère étrange et mirifique. Notons également l’hommage rendu par les auteurs à Harry Potter, mais surtout à Vincent Price, célèbre acteur américain de film d’horreur qui a inspiré Tim Burton et dont vous avez déjà certainement au moins une fois entendu la voix grave, celle du clip Thriller de Michael Jackson. Un premier album convaincant et maintenant la suite, vite... - Michaël
Plus rien ne semble vraiment intéresser Adam, il est pour ainsi dire blasé de tout. Il voudrait un peu de changement, mettre du piment dans sa vie. La rencontre avec une mystérieuse jeune femme va le combler, mais bien au delà de ce qu’il espérait... Bien au delà de ce qu’un esprit sein pourrait endurer jusqu’à le pousser dans les méandres de la folie... « Presque Lune », éditeur rennais, nous gratifie une nouvelle fois, après « Beverly » et « Dansker », d’un excellent titre. Mystérieux, angoissant et à l’intrigue captivante, « Tumulte » est une pépite anglaise à découvrir absolument. Ce récit fait la part belle à la psychologie, principalement au Trouble Dissociatif de l'Identité. Nous sommes littéralement captivé par cette histoire dont l’intrigue morcelée se dévoile page après page, sans divulguer aucun indice auparavant. La narration est maîtrisée de bout en bout, les artistes utilisent très peu de cases, 5 à 6 par planches. Ils multiplient les cadrages serrés, gros plans et très gros plans. Par ce biais ils créent une ambiance inquiétante et énigmatique. Une grande partie de l’œuvre nous est contée par le narrateur, Adam, le héros de l’histoire. Cette technique permet de créer un lien direct entre lui et le lecteur, d’en être en quelque sorte le confident et je dois dire que cela fonctionne à merveille. L’illustration est également au niveau de l’intrigue, elle la sert, voire la sublime. Michael Kennedy aux traits noirs et épais, utilise une gamme chromatique réduite, pas de nuances, ni de gris, juste des plaquages pour faire disparaître les blancs. C’est beau et terriblement efficace. Je ne saurais que trop vous conseiller cette œuvre et ces auteurs qui vous mèneront bien au- delà d’une simple lecture. Un plaisir ! - Michaël
Depuis la mort de son père, Pierre est le « Veilleur des brumes », le seul capable d’entretenir le barrage protégeant la ville d’un mortel brouillard. Sa responsabilité et son savoir pourraient en faire un citoyen respecté, mais il n’en est rien. Le temps a passé depuis la grande catastrophe et les mémoires se sont peu à peu effacées, aujourd’hui il n’est surtout considéré que comme un enfant timide, le fils d’un fou. Pourtant, la brume est bien réelle, toujours là et lorsqu’elle réussit une percée dans le barrage, Pierre est le seul préparé à la stopper... Adaptation d’un court métrage aux multiples récompenses « Le veilleur des brumes » est un récit fantastique échevelé aux nombreux rebondissements. Proposé comme un titre jeunesse, son intrigue et ses différents niveaux de lectures, en font en réalité un album tout public. Chacun·e trouvera en lui une résonance familière, propre à sa sensibilité. Famille, amitié, mais aussi courage et responsabilité sont quelques-uns des thèmes abordés au détour de cette palpitante aventure. Au fil de l’histoire, le mystère s’épaissit et l’intensité dramatique va crescendo. On vibre à chaque page, envahi d’émotions, tantôt gaies, tantôt tristes. Le repos émotionnel ne nous sera accordé qu’au clap de fin et encore puisque les effluves de ce moment passé resteront en vous quelques temps après. Les illustrations, peintures numériques, sont merveilleuses. Elles sont indissociables du texte et représentent un élément narratif d’une rare puissance combiné à une mise en scène cinématographique. Plongez sans hésiter dans cette saga étrange, unique, un classique en devenir. - Michaël
Durant la Grande Dépression, trouver un travail relève du miracle. Alors lorsque John Clark, jeune photographe, décroche un contrat pour la FSA (Farm Security Administration), sa joie est immense, d’autant qu’il associe ainsi passion et travail. Pourtant sa mission - aller photographier la misère qui règne dans la région sinistrée d’Oklahoma, ravagée par les tempêtes de poussière - va profondément le bouleverser et le pousser à se remettre en question. Cette œuvre de fiction à caractère historique focalise particulièrement notre attention sur une région des États-Unis très meurtrie par la crise économique des années 1930. Elle met en lumière la dramatique crise climatique provoquée par l’agriculture intensive, plus méconnue. La région du Dust Bowl (« bassin de poussière ») connaît à cette période une grande sécheresse qui aggrave et multiplie les tempêtes de poussière. Ces phénomènes hors norme, inimaginables dans nos contrées, sont dévastateurs. Les terres sont inexploitables et la vie, la survie, relève du miracle. La Farm Security Administration, l’agence gouvernementale américaine créée pour combattre la pauvreté rurale, a développé un programme de documentation photographique d’une ampleur unique, témoignage précieux de la vie des Américains de l’époque. Grâce à cela, Aimée De Jongh livre un récit dur, âpre, qui surprend, questionne et dénonce principalement la manipulation des médias, des images, toujours à la recherche du bon cliché, du sensationnel. Lorsque l’on ferme ce livre, une pensée émue nous traverse pour ces femmes, ces hommes, leur courage et résonnent en nous les mots de John Steinbeck : « ils ont le sang fort ». - Michaël
Comme toutes les jeunes filles de son âge, Raina, 11 ans, passe le plus clair de son temps à rêvasser et à chahuter avec ses frères et sœurs. Son entrée en sixième s'est passée tout naturellement : elle a des amies, d'assez bonnes notes et se sent bien dans ses baskets. Pourtant, un malheureux accident va bouleverser cet équilibre. Une mauvaise chute casse à jamais ses deux dents de devant. Défigurée, la jeune fille va alors subir de nombreuses opérations ainsi que le port d'appareils tous plus horribles les uns que les autres. Son calvaire de presque 5 ans va profondément modifier sa personnalité et de ce fait, sa relation aux autres. En pleine adolescence, comment avoir confiance en soi et dire à l'être aimé ce que l'on ressent avec de fausses dents et du fil de fer plein la bouche ?
Sensible et drôle, cette histoire peut, si vous avez une dent contre les dentistes, vous réconcilier avec eux. Et si, tout comme notre héroïne/auteure, vous avez des problèmes de dentition, elle vous redonnera le sourire et l'envie de croquer la vie à pleines dents. - Michaël
Il y a 20 ans, par une singulière journée, le Roi a mystérieusement disparu. Castelmaure, le château, s’est entouré d’une tempête maléfique et des milliers d’enfants sont étrangement né·es... Cette histoire, conte oral, doit être retranscrite pour ne pas être oubliée. Cette mission de collecte est celle du mythographe, qui parcourt le pays en tous sens à la recherche des contes et légendes des campagnes. Pourtant, cette fois, il pourrait bien faire partie de l’histoire... Lewis Trondheim et Alfred, artistes talentueux, s’associent pour nous livrer une fresque fantastique, moyenâgeuse et diaboliquement efficace. Le récit, truffé de rebondissements, nous tient en haleine jusqu’à la dernière page. Chaque personnage est guidé·e par son innocence et/ou un sentiment de rédemption, et emprunte des chemins escarpés. Au final, toutes ces routes n’en formeront plus qu’une, pour le meilleur ou pour le pire, dans une conclusion éclatante. Les illustrations d’Alfred fleurent bon le Moyen âge, décors et costumes, sans oublier sa palette de couleurs, nous imprègnent de cette époque pour nous immerger complètement dans le récit. Diantre ! Que voici une œuvre promptement menée, qui n’attend qu’un peu d’attention de votre part, alors n’hésitez pas, accordez-lui un peu de votre temps. - Michaël
La bande dessinée est un médium qui possède la faculté de pouvoir prendre des sentiers aussi variés qu’inimaginables. Souvent sources d’incroyables fictions, elle œuvre également dans le domaine de la connaissance et de la mémoire. Le titre « Wannsee » est une œuvre froide, glaciale : les plus férus en histoire auront compris de quoi il retourne, les autres vont découvrir un pan important et incontournable de notre histoire contemporaine. Cette œuvre relate les faits à l’origine de l’une des pages les plus honteuses de l’histoire des Hommes : la solution finale. « Wannsee » ou plutôt, la conférence de Wannsee, réunit le 20 janvier 1942 dans la villa Marlier à Berlin, quinze hauts responsables du Troisième Reich, délégués des SS, des ministères et du parti nazis, pour mettre au point l'organisation administrative, technique et économique de la « solution finale de la question juive », voulue par Hitler. À partir d’authentiques rapports, l’auteur partage cet ignoble moment où notre humanité a laissé place à la folie. Le sujet est certes difficile, voir écœurant, mais le raconter est nécéssaire afin d’instruire et peut-être donner suffisamment d’armes intellectuelles pour ne pas revivre une telle ignominie. Fabrice Le Hénanff s’attaque donc à un sujet difficile, mais il le traite avec clarté et justesse. Le thème si horrible nous ferait presque oublier la forme si réussie de cette bande dessinée : de magnifiques crayonnés rehaussés d’aquarelle aux couleurs froides et tristes, comme le fut cet hiver 1942. - Michaël
A la récré, les enfants ne parlent que d’une chose : de la maîtresse qui a un bébé dans le ventre ! Comment est-ce possible ? Comment a-t-il fait pour arriver jusque-là ? Bien évidemment certains enfants ont déjà la réponse, même si leur histoire semble quelque peu éloignée de la réalité. D’autres connaissent mieux le sujet, mais il reste quelques interrogations. Lou, quant à elle, sait, même si pour elle, l’histoire est un peu différente, mais c’est sa vraie histoire… De nombreux albums parlent de la conception et/ou de la naissance d’un enfant. Très rares sont ceux qui traitent de la PMA, la procréation médicalement assistée. « Am Stram Graine » fait partie de ces derniers. Efficacement et sobrement, Anne-Catherine Le Roux explique aux enfants le mystère de la conception, mais en plus, elle raconte son histoire à travers les mots de cette petite fille. Sans grand discours et avec des mots simples, elle aborde une thématique qu’elle connaît par cœur et qui est souvent très mal connue, même du public adulte. Grâce à son récit, son témoignage, elle met des mots, des images et des sentiments sur un parcours qui peut s’avérer compliqué lorsque l’on souhaite un enfant. Elle parle également d’identité, qui on est vraiment ? Que veut dire être parent ? La filiation ? Elle donne matière à réflexion, mais plus que tout, Anne-Catherine Le Roux, donne des clés de compréhension et d’ouverture d’esprit. Elle est accompagnée dans sa tâche par Jules, illustratrice au trait épuré et aux couleurs chatoyantes, dont les planches sont aussi efficaces que le texte. Voici un album rare et incontournable pour combattre les préjugés et rendre le monde plus ouvert. - Michaël
2151 : l’humanité vit dans 7 mégalopoles tandis que la nature reprend ses droits sur le reste de la planète. La surexploitation des ressources de la Terre au début du 21e siècle et les désordres qui s’ensuivirent ont décimé la population. Le seul et dernier espoir des hommes pour un monde meilleur : la conquête spatiale. La plupart en rêvent, Youri non, car sa mère, Simone, prépare son départ pour une mission spatiale sans retour, SOON. Le scénario échafaudé par Thomas Cadène et Benjamin Adam est fouillé et confère à cette bande dessinée une intensité qui se révèle petit à petit. Dans ce récit d’anticipation, il est bien évidemment question d’écologie et de l’urgence à changer nos habitudes de consommation. Mais il nous interroge aussi et surtout sur ce qui nous fait aller de l’avant, partir à l’aventure, donner du sens à nos actions et à nos vies. Ce qui fait d’un simple citoyen un bon fils, un homme amoureux, un père attentif, ou d’une mère une femme aimante et conquérante. Le graphisme créé par Benjamin Adam est sublime et participe de cette profondeur. Il alterne illustrations en bichromies sur fond noir pour relater la conquête spatiale et sur fond blanc pour narrer l’histoire de Youri. Ainsi, il donne corps à cette dualité, être et devenir, qui oriente chacun de nos gestes et crée le monde de demain. « Soon » est un beau récit d’anticipation à la fois sombre et lumineux qui fera de vous un lecteur comblé. - Michaël
Souvent on me demande si nous avons des « romans graphiques », ce à quoi je réponds systématiquement : « De la bande dessinée, mais bien sûr ! ». Vous l'aurez compris, pour moi ce terme est souvent inapproprié et est surtout employé pour se détacher du terme générique « bande dessinée » qui véhicule malheureusement encore aujourd'hui de nombreux clichés. Mais il arrive parfois qu'entre nos mains nous détenions un livre hybride, doté d'un délicat mélange de textes et d'illustrations, imbriqués les uns aux autres et ne pouvant exister l'un sans l'autre. « Radioactive » fait partie de ces livres qui sont le parfait exemple de ce qu'est le vrai « Roman graphique ». Son esthétisme, son partie pris graphique, composé de peintures, de photographies et de cyanotypes en fait une oeuvre éblouissante et inspirante. Son propos, une biographie de Marie et Pierre Curie, est passionnant. Nous suivons ce couple hors du commun, de leur rencontre jusqu'à leur mort. Nous réalisons la grandeur de leurs travaux, de leurs découvertes et comprenons pourquoi encore aujourd'hui, ils sont admirés dans le monde entier. Certes par moment, le texte peut paraître technique, scientifique, mais il reste tout de même abordable. Le fil conducteur de l'oeuvre est de mettre en parallèle deux forces invisibles, la radioactivité et l'amour, cela fonctionne plutôt bien, même si scientifiquement parlant, elles ne sont pas comparables. « Radioactive » est une oeuvre rare, exigeante et profondément humaine qui a été le premier roman graphique sélectionné dans la catégorie non-fiction du National Book Award.
Paul est fatigué de toujours se faire gronder par sa maman. Alors pour en finir avec cela, il décide de partir vivre seul dans une autre maison. Très vite la solitude et l’ennuie se pointent, aussi, lorsqu’un chat s’invite chez lui, Paul ne refuse pas de l’héberger, ni même pour le chien, encore moins pour le cochon et que dire à tous ceux qui arrivent… Les éditions Cambourakis nous proposent un charmant et amusant album suédois. L’autrice Barbro Lindgren écrit une histoire qui prend essence dans le quotidien et en fait un récit extraordinaire. Quel est l’enfant qui n’a pas rêvé un jour d’habiter seul sans avoir ses parents sur le dos ? L’autrice, maligne, ne donne pas pour autant victoire à ce garnement, mais conclut à merveille son texte par une mignonnette pirouette. Les illustrations d’Emma AdBage sont atypiques, son esthétisme va en faire hurler plus d’un car ici point de perspectives ou de décors majestueux, non, juste le principal et des personnages avec des « gueules », des tronches qui feront rire par leurs attitudes et leurs postures. Une vraie leçon de dessin, à l’apparence faussement enfantine et à la mise en scène irréprochable. Petit conseil, lorsque vous sentez la moutarde vous monter au nez et que vos enfants en ont assez de vous, venez passer un peu de temps à la médiathèque : il y a de beaux albums à lire ensemble, et les colères se transformeront en câlins (garantie à 75%). - Michaël
Jaromil, trompettiste, « nègre à moitié », a le Jazz à l’âme.
Un jour il reçoit dans sa boite aux lettres, un colis contenant : un courrier, des cassettes audio, un disque ‘’ Mo’ Better Blues’’ du groupe ‘’The Brandford M. Quartet’’, et la photo troublante d’un homme lui ressemblant trait pour trait.
Bouleversé par cet héritage du père qu’il n’a jamais connu, il part en quête de réponses et écrit à sa fille chérie pour lui dire, tout lui dire.
Marc Alexandre Oho Bambe, est poète, écrivain et slameur (connu sous le nom de Capitaine Alexandre).
Ces trois univers se retrouvent parfaitement dans la construction de ce livre.
La narration de l’histoire du musicien est entrecoupée de poèmes, de lettres pour Indira sa fille et des enregistrements de son père.
‘’Souviens-toi de ne pas mourir sans avoir aimé ‘’, aborde des sujets forts comme la paternité, l’absence, la solitude, l’amour, le racisme, la vie de tournée. Avec toujours en toile de fond le Jazz.
J’ai adoré cette lecture, entre roman et poésie. Je me suis laissée embarquée par le style atypique de l’auteur, ses personnages touchants, son ode à l’amour et à la musique.
Un magnifique récit puissant et émouvant.
Que dire de plus après un titre qui résume à lui seul le contenu de cette œuvre ? Peut-être, excusez du peu, évoquer le remarquable travail de l’auteur qui réussit simplement, mais avec beaucoup d’humour, à parler du racisme au sens large du terme. Il présente l’humanité et ses rapports conflictuels qu’elle a toujours entretenu avec cet·te « autre », qui n’est pourtant qu’elle-même !? Le racisme, la xénophobie ou encore les stéréotypes, les préjugés et autres discriminations sont autant de thèmes abordés dans ce livre, vulgarisés et combattus comme il se doit. Cette bande dessinée n’est pas que pour les enfants, elle est destinée à tous et toutes, tant son fond fait écho à la vie de tous les jours et va à l’encontre de cette immonde bêtise qui inonde le champs politique et certains médias.
⠀
Ce titre est à découvrir dans votre Espace COOLturel, au rayon BD « tout public » et on vous la conseille chaleureusement ! - Michaël
Les dinosaures aussi ont des problèmes de santé : pour y remédier, ils se rendent à l’hôpital des dinosaures. Diplodocus, stégosaures et autres tyrannosaures viennent consulter le docteur Trodon qui leur fait passer une multitude d’examens, allant du scanner pour mesurer la taille de leur cerveau, aux radios pour voir comment leur squelette est constitué. Cet album, à la croisée de la fiction et du documentaire, mêle humour, petites histoires et informations passionnantes à propos de ces dinosaures qui fascinent toujours autant petits et grands. L’approche est extrêmement originale, ludique et mêle de manière totalement loufoque et avec succès jargon médical et univers des dinosaures. Hye-Won Kyung revient sur leur anatomie, expliquant par exemple pourquoi le stégosaure a des plaques sur le dos, ou bien pourquoi les maiasaura sont d’excellents parents. Les illustrations, très bien réalisées, donnent vie à ces animaux du Mésozoïque avec une mention spéciale pour les belles planches de squelettes dans lesquelles l’autrice-illustratrice s’en est donné à cœur joie.