Conseils lecture
Un ourson explore son univers et ses sens à quatre pattes : les herbes qui chatouillent, les graviers qui piquent, la flaque d’eau qui mouille…
Au fur et à mesure de son parcours, l’ourson s’aventure presque jusqu’au bout du monde : mais est-il si loin que ça ? Le retour va se faire sur deux jambes pour retrouver des bras réconfortants. A travers cet album, Gaëtan Dorémus nous livre une belle histoire sur l’apprentissage de la marche chez les jeunes enfants, avec toutes les découvertes et les appréhensions que cela entraîne. Les illustrations et les couleurs sont surprenantes car elles se démarquent de ce qu’on a l’habitude de voir dans un album pour les plus petits. Dans un environnement coloré, le petit ourson est superbement croqué dans ses attitudes tantôt pataudes, tantôt enjouées, tantôt déséquilibrées au gré de ses pérégrinations.
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Un album original et fort, qui aborde avec douceur ce moment charnière dans la vie des tout-petits.
Le bonheur se cache au fond de chacun·e de nous, mais également partout autour. Le bonheur est-il dans la nature qui nous entoure ? partager un repas avec ses ami·es, rire aux éclats, est-ce ça le bonheur ? Ou bien sentir battre son cœur, être amoureux·ses ? Être entouré·e de ceux et celles qu’on aime ? Et pourquoi passer sa vie à le chercher, à en vouloir toujours plus, alors qu’il se trouve juste sous nos yeux ?
Dans cet album aux illustrations foisonnantes et chatoyantes, Peggy Nille nous offre une réflexion à hauteur d’enfant sur le thème du bonheur. Tout au long du récit, la/le lecteur·rice suit les questionnements philosophiques d’un petit pingouin. Avec beaucoup de poésie, l’autrice passe un message : à quoi bon s’épuiser à courir après le bonheur, quand parfois il suffit d’apprécier ce que l’on a déjà pour être heureux ?
Les illustrations oniriques et colorées sont une invitation à la rêverie et à l’observation. Les paysages nordiques, la banquise, la taïga ou les fonds marins sont luxuriants. Les lecteur·rices pourront s’amuser à retrouver les petits détails qui s’y cachent car « Chercher le bonheur » est également un cherche-et-trouve.
« Chercher le bonheur » est une belle porte d’entrée pour amorcer une discussion sur le sujet du bonheur avec son enfant ou tout simplement, passer un joli moment de lecture et de jeu en famille.
Ciprian et sa famille sont des « Ursaris », des dresseurs d’ours. Ils gagnent misérablement leur vie en se produisant dans les villages roumains. Là-bas ils sont peu considérés, voire détestés et maltraités. Piégés par la mafia locale, ils se retrouvent clandestinement en France, à Paris, où il doivent « travailler » pour le compte de ces crapules. Loin de l’idée qu’ils se faisaient de notre pays, ils vont alors toucher le fond et devoir s’humilier pour survivre. Pourtant une lueur d’espoir va naître lorsque Ciprian découvre par hasard un jeu inconnu : les échecs... Adaptation du roman éponyme de Xavier-Laurent Petit, « Le fils de l’Ursari » trouve son inspiration dans notre réalité ; il condense deux faits réels, afin d’en extirper un récit tendre et brutal. L’auteur dénonce l’exploitation humaine et l’inaction de nos politiques face à un système mafieux. Tous cela engendre de la méfiance et bien évidemment la haine de l’autre. Le récit n’est pas triste pour autant car l’auteur nous parle de bonté, de valeurs et du coup d’espoir. Ce récit est un message d’ouverture d’esprit. Il s’adresse aux enfants, à partir de 9 ans, mais a très bien sa place dans les titres pour adultes, tant il est efficace et engendre la réflexion. A sa sortie, le roman a gagné le Prix Sorcières 2017 et le Prix des Lycéens allemands 2018. Nul doute qu’avec cette adaptation en bande dessinée, plus que réussie, le récit a encore de beau jour devant lui et va toucher un plus large public. - Michaël
Dans certains récits, il arrive que des enfants disparaissent dans des mondes étranges et fantastiques où ils endossent le rôle de sauveur. Ils y deviennent des légendes et l’histoire ce termine en happy-end. Très bien... mais entre temps que s’est-il passé pour les parents, les proches de ces enfants disparus ?
« Ceux qui restent » est une histoire singulière et étonnante qui prend le contre-pied des œuvres fantastiques classiques. Cette fois, nous ne voyageons pas avec les enfants mais restons à quai avec ces parents morts d’inquiétude et suspectés de choses atroces par la police et une certaine presse à scandale. Tous les ingrédients d’une BD réussie sont réunis dans cette fable oscillant entre polar et fantastique. L’histoire est habillement écrite, ménageant des moments forts en suspense et émotions. Vous serez également charmé par les illustrations d’Alex Xöul, fluides et agréables, qui adoucissent l’atmosphère inquiétante du récit. Un récit envoûtant et inattendus en provenance de la belle Espagne. -Michaël
« La forêt » est un très beau titre, tant dans la forme que dans le fond. En seulement 25 illustrations, 1 par page, Thomas Ott réussit l’exploit de nous transporter dans son univers. Pas de texte, simplement des images riches et profondes qui nous guident le long d’un récit onirique sur l’acceptation du deuil. Ici un jeune garçon, triste pendant une veillée funèbre, s’évade pour rejoindre la forêt voisine. Durant sa promenade, d’étranges phénomènes font leur apparition jusqu’à une bien étrange rencontre…
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Ce récit intimiste, aux allants mélancoliques, porte un message de vie et d’espoir, semblant
peut-être facile, mais utile et nécéssaire à entendre : la vie continue…
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Si l’histoire est belle, les illustrations le sont tout autant. D’un magnifique noir et blanc, elles sont réalisées à la carte à gratter, technique ô combien difficile dont Thomas Ott est devenu un des maîtres. Avec un cutter japonais des lignes sont grattées dans la couche noire qui recouvre un carton blanc. Thomas Ott créé donc ses images en « dessinant » en blanc sur un fond noir, avec des petites touches de grattage successives. Un travail extrêmement minutieux lors duquel l’artiste n’a pratiquement pas droit à l’erreur.
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Cette oeuvre est remarquable et nous sommes heureux de vous la proposer.
« Ça va pas la tête ou quoi ? » est un album jeunesse au ton très humoristique, écrit par un habitué du genre qui en devient, album après album, le spécialiste de « l'humour pour les petit·es ».
Seulement pour les enfants ? Bien sûr que non ! Il arrive toujours à surprendre ses lecteur·rices quel que soit leur âge. Ici encore, il parvient à nous amuser avec trois fois rien : des yeux, un nez, une bouche et des formes multiples.
Cela fonctionne à merveille jusqu’au final, une chute savamment orchestrée.
Cet album est drôle, coloré, rythmé… et surtout plein d’intelligence. À lire, relire et partager sans modération !
1937 : Tuduo, jeune orphelin, survit à la façon d'un Oliver Twist en faisant la manche dans les rues de Shanghai. Yaya, riche petite fille de l'un des plus gros diamantaires de la région, ne vit quant à elle que de rêves. Alors que tout semblait les séparer, les bombardements de l'aviation japonaise sur la ville vont les rapprocher et les lier d'amitié. Livrés à eux même dans une cité dévastée, Tuduo va prendre sous son aile la petite fille perdue et lui promettre de retrouver ses parents, quitte à aller jusqu'à Hong Kong. Le voyage s'annonce périlleux car dans un pays en guerre les dangers sont multiples et Yaya, insouciante, ne se montre guère prudente sur ses origines et attire ainsi de nombreuses convoitises. - Michaël
Le Grass Kingdom, est le nom donné aux terres des frères Robert, Bruce et Ashur. Sur cette étendue, ils accueillent à bras ouvert qui le souhaite, mais avec quelques règles tout de même : le respect et l’entraide. Depuis de nombreuses années, ils vivent ainsi, en totale autarcie, refusant les lois et le monde extérieurs. Alors que les problèmes se multiplient avec le shérif du comté, une vieille affaire sordide refait surface. Dans cette communauté où l’entraide et la loyauté sont de mise, tout laisse à penser que se cacherait parmi eux un tueur en série... Lorsque l’on parle de bandes dessinées américaines, on pense inévitablement aux super-héros, oubliant que le comics est avant tout une multitude de genres et de styles. Bien sûr les Américains ont inventé les super-héros, mais ils ont également développé le média bande dessinée en apportant des codes et une narration modernes. Matt Kindt est l’un des auteurs du Nouveau Monde les plus en vue actuellement. Il compose une œuvre qui jusqu’à présent est un sans faute, et avec toujours plus d’exigence. Grass Kings dépeint le quotidien d’Américains moyens, plongés dans une utopie, mais rattrapés par la réalité. Chaque personnage, chaque témoin a son histoire, différente, mais liée au Grass Kingdom. Ces terres sont d’ailleurs un personnage à part entière, car tel un cours passionnant, nous assistons au début des différents chapitres à son histoire. Terres peuplées par les indiens, puis par les colons, terres nourries par la violence et le sang des hommes. Le récit est passionnant, brutal sans être dénué de réflexion et de compassion. Vous aimerez également le travail pictural d’un tout jeune illustrateur qui, sans copier ses illustres prédécesseurs, nous rappelle le travail de Jeff Lemire (à découvrir rapidement si vous ne le connaissez pas). Un travail remarquable utilisant la technique de l’aquarelle. Grass Kings est en polar sérieux qui vous fera vibrer et dont l’intégralité se tient en trois volumes. - Michaël
Dans un futur pas si éloigné que cela, la société « Tomorrow Foundation » met au point un procédé révolutionnaire dans l’intelligence artificielle : elle crée les premiers humanoïdes doués de conscience. Carbone et Silicium sont les premiers d’une longue série de robots, mais peut-on encore être considéré comme une machine lorsque l’on a des émotions et des envies de liberté ?... Mathieu Bablet s’attaque à un sujet maintes fois évoqué dans la littérature de science-fiction. Loin de s’en détacher, il tire pourtant son épingle du jeu en réalisant une œuvre dense et emplie d’une certaine sagesse. Pas de combats de genre ou d’intelligence artificielle collective, mais une réflexion sur ce qu’est l’humanisme. Il met en exergue notre nature profonde réfrénée, policée et en contradiction avec le concept sociétal du vivre ensemble. Carbone et Silicium vont, sur près de 300 ans, apprendre de leurs pairs, choisir chacun des chemins différents, mais pour quelle conclusion ? Mathieu Bablet est un auteur dit « complet », il réalise également les illustrations de ce pavé d’environ 260 pages. Son style est classique et réaliste et son découpage sobre. L’ensemble forme une œuvre remarquable rehaussée par le choix d’une édition de toute beauté au dos toilé. Bien plus qu’une fiction, cette œuvre est un vrai sujet de philo à méditer... - Michaël
Le Dr Dunne pourrait-être un dentiste comme les autres s’il n’avait un penchant pour la douleur… Son sadisme aurait pu rester dans l’ombre s’il n’avait pas rencontré cette jeune fille au charmant sourire ferraillé… Passion, crimes et rebondissements rythment ce récit à l’illustration rétro, mais au charme certain. Augustin Ferrer Casas, par son récit, réussit à nous tenir en haleine jusqu’au bout. Il joue avec nos nerfs en nous envoyant sur de fausses pistes. Alors si vous ne savez pas quoi lire pendant les vacances, mettez-vous cette histoire « sous la dent », elle vous comblera, à n’en pas douter.
Au cours d’une après-midi en compagnie de sa fille, le narrateur évoque les réminiscences de son enfance, passée en compagnie animale. Gambadant avec sa petit Lila au cœur de Mexico, l’une des villes les plus polluées au monde, l’auteur mêle des récits indiens à l’imaginaire de son enfant pour nous émerveiller du miracle qu’est la nature... Nous rappeler que « nous sommes une partie de la nature, et elle fait partie de nous » et de ce constat simple, qu’il nous faut la respecter, la protéger. Cette bande dessinée n’est pas uniquement le message d’un père à sa fille sous la forme d’une fable, mais celui d’un citoyen soucieux de son environnement autant que de ses proches, exprimant sa peur de l’avenir incertain de la planète et de l’héritage légué à nos chérubins. François Olislaeger illustre son récit sobrement, principalement en noir et blanc, en nous gratifiant par endroit de magnifiques doubles pages, peignant la beauté sauvage. Véritable ode à la vie et à la nature, il dresse un constat alarmant des actions humaines sur l’environnement. Il dénonce, mais ne se pose pas pour autant en chantre de l’écologie innocent, car lui comme nous, sommes coupables d’inaction et en quelque sorte de lâcheté. A l’heure où les politiques n’agissent peu ou pas, il est important d’exprimer nos inquiétudes pour qu’elles soient entendues et que ces voix, nos voix, qui se multiplient, puissent entrer en action et changer notre monde. Écolila est un récit plein de sagesse qu’une bibliographie vient étayer, à destination des plus curieux désireux de poursuivre cette réflexion écologique. - Michaël
Marco est un renard qui se pose plein de questions sur le vaste monde. Pourquoi les arbres de parlent pas ? Où va le soleil lorsqu’il disparaît dans l’océan ? Mais lorsqu’il pose la question à ses camarades renard, ceux-ci lui répondent : « mais quel est le rapport avec la blanquette de poulet que nous sommes en train de cuisiner ? »
En quête de réponses, et de sens à sa vie, Marco le renard s’embarque pour un voyage presque sans retour à bord du bateau-cerf. Pour compagnons, il aura un équipage drôlement constitué : des cerfs et des biches qui ne savent pas naviguer, des pigeons qui ont soif d’aventure mais ne savent pas travailler… que va trouver Marco au bout de son aventure ?
A travers cet album, Dashka Slater nous embarque dans une histoire erratique, qui balance le lecteur au gré des questionnements de Marco le renard et des aventures qu’il vit à bord du bateau-cerf. Le récit fait la part belle à l’amitié qui se noue entre les protagonistes : comment faire pour trouver un ami ? se demande Marco. L’histoire lui réponds de plusieurs manières : autour d’un repas, d’une aventure en commun, ou tout simplement en lui posant des questions…
Les illustrations des frères Fan nous rappellent une époque pas tout à fait révolue de la littérature jeunesse : celle d’un dessin assez réaliste, friande d’anthropomorphisme, fourmillant de détails. Les couleurs assez sombres, dans les tons gris / marron, donnent une ambiance mélancolique à l’histoire.
Nos trois auteurs nous offrent un album surprenant, onirique et philosophique, laissant de nombreuses questions ouvertes ; A charge au lecteur, petit ou grand, d’y apporter les réponses qu’il veut.
Conseils lecture
« Avec toi, papa… » est un album tendre et empreint d’émotion.
Chaque double-page illustre un moment unique de complicité que la petite héroïne partage avec son papa.
Des instants précieux, où se tissent des liens forts et sincères, où les gestes et les regards en disent plus que les mots.
Des moments simples du quotidien – une bataille d’oreillers, faire un gâteau, une balade sous la pluie – mais qui, pour l’enfant, prennent une dimension inoubliable.
Ces souvenirs doux et chaleureux accompagnent la petite fille dans sa construction, dans son regard sur le monde et sur elle-même.
Et plus grande, ces instants magiques resteront gravés, non seulement dans sa mémoire, mais aussi dans celle de son père…
Souvent en écoutant avec délectation les chroniques de Clara Dupond-Monod sur France-Inter, je me disais qu’il faudrait que je lise un de ses livres mais j’hésitais toujours de peur d’être déçu par ses romans et que cela ne me gâche le plaisir de l’entendre. Comme son dernier ouvrage « S’adapter » avait eu le prix Femina, je me suis finalement lancé.
Au départ je dois dire que la perspective de passer 170 pages en compagnie d’un enfant souffrant d’un lourd handicap, lui interdisant de voir, de bouger et de parler, ne suscitait pas en moi un enthousiasme de dingue, mais que nenni ! c’était sans compter sur le talent de l’autrice qui vous accompagne avec délicatesse dans ce bouleversement familial.
Au rythme lent de la montagne cévenole de sa flore et de sa faune omniprésentes, Clara Dupont-Monod nous dépeint avec justesse et pudeur comment la naissance d’un enfant handicapé va déconstruire une cellule familiale et comment chacun de ses membres va être impacté par cette arrivée. Puis comment au fil du temps le puzzle de ces vies contrariées va doucement se réassembler pour que chacun trouve ou retrouve une place.
Un livre particulièrement bien construit, sensible et fragile qui vous emporte dans un tourbillon d’émotions.
Un titre tout simplement tendre et mélancolique, qui traite de l’amour, du deuil et surtout de la vie. Loïc Clément et Anne Montel nous offrent un récit jeunesse d’une réelle beauté, l’écriture à la première personne affirme un récit intimiste et les aquarelles, magnifiques, enrichissent la tendresse des personnages. Une nouvelle fois la bande dessinée jeunesse permet l’émergence d’une telle pépite qui s’adresse aux petits mais également aux adultes. - Michaël
Depuis toujours les chat·tes fascinent, félins sauvages, indépendant·es mais également câlin·es et tendres à leurs heures. Avec ce très bel album on découvre ou redécouvre 11 poèmes ou extraits de la littérature, passant par Baudelaire, La Fontaine ou bien encore Lewis Caroll. Les textes sont aussi variés que leurs auteurs. Face à ces écrits onze illustrateur·rices contemporain·es proposent dans leurs différents styles un portrait se mariant avec l’écrit.
Cette magnifique galerie d’images et de mots ravira bien sûr les amoureux·ses des matous et charmera aussi sans nul doute les autres.
« Petits portraits de chats » est un ouvrage inclassable. C’est à la fois un album, sans histoire, que l’on peut lire au gré de ses envies et au hasard des pages, un livre d’art que l’on regarde pour ses magnifiques illustrations, ou bien encore un recueil de poèmes.
J’ai beaucoup aimé la multiplicité des styles de ce livre, qui met à l’honneur avec malice et modernité, la poésie, genre souvent oublié.
Un très bon moment de lecture cocooning.
Les deux volumes du cultissime « Idées noires » de Franquin sont enfin réunis dans une intégrale. Considérés à juste titre comme des chefs-d’œuvre du neuvième art, les différents récits qui le composent sont toujours aussi percutants et d’actualité, même s’ils ont été écrits dans les années 80. L’écologie, l’humanisme, la guerre sont autant de sujets qui nous préoccupent encore aujourd’hui. En utilisant l’humour avec brio, Franquin fait un constat sombre, mais réaliste, de notre société. Sans sermon, sans jugement ni remède miracle, il nous livre simplement des vérités, libre à nous de nous les approprier ou pas. « Idées noires » est une œuvre intemporelle, héritage du génie qu’était Franquin, à classer parmi la meilleure des littératures. - Michaël
On aborde ce récit par la découverte en plein terrain vague d'une épave de voiture dans laquelle reposent les cadavres d'un homme et de son chien. L'histoire qui s'achève si tristement nous est alors contée à travers le regard de ce chien, arrivé bébé au sein d'une famille heureuse, proche de son maître, unique personne à s'occuper réellement de lui, et content de partir avec cet homme pour un périple en voiture. Ce voyage, le dernier, est ponctué de rencontres, d'accidents, de joies simples et de douleurs brutes.
Outre l'histoire d'amour universelle qui peut lier un homme à son chien, c'est la mort de la société traditionnelle japonaise qui nous est ici contée : une société dans laquelle l'individualisme remplace petit à petit la force des liens familiaux, où le travail de toute une vie n'a plus de valeur et pour laquelle la maladie est devenue motif d'exclusion ; cette société (qui est aussi la nôtre) au cœur de laquelle un homme peut mourir seul, sans aide, sans soins et pour finir sans identité, mais entouré et rassuré par l'amour et la fidélité indéfectibles (par-delà la mort même) de son chien. - Michaël
Gioia a 17 ans. Elle n’est pas comme les autres. Dans sa bulle elle discute avec Tonia, une amie imaginaire. Elle écoute en boucle les Pink Floyd, collectionne dans un carnet les mots étrangers intraduisibles et se passionne pour la photographie en ne prenant que des gens de dos. Au lycée on la surnomme miss rabat-joie. Elle vit dans un contexte familial difficile. Un jour, elle fait par hasard la connaissance d’un jeune homme : Lo. Comme elle, il est solitaire, collectionne des cailloux dans un bocal, joue aux fléchettes seul le soir dans un bar. Avec lui Gioia va découvrir des émotions jusqu’ici jamais ressenties. Mais voilà, celui-ci disparait sans laisser de traces. La jeune fille est alors prise de doutes. Aurait-elle imaginé cette relation ? Serait-elle folle comme le pense ses parents ou la psy ? Gioia est déterminée à retrouver son amour perdu et à mettre au clair les zones d’ombres qui planent autour de cette histoire. Notre héroïne sera aidée par quelques complices : son professeur de philosophie et confident, une gérante de bar et un vieux monsieur.
Dans ce premier roman, Enrico Galiano traduit très bien le mal-être de l’adolescente, ses interrogations, ses doutes et ses espoirs.
En plongeant dans le monde de Gioia on perd souvent le sens de la réalité et de l’imaginaire tant la frontière entre les deux y est infime.
Les ados se retrouveront dans ce thriller psychologique, écrit avec fluidité et humour. Les personnages sont très attachants, mystérieux et sont confrontés à des réalités aussi brutales que quotidiennes. Une sensibilisation à la violence, l’alcoolisme, le harcèlement…On retiendra également un message de tolérance et d’ouverture d’esprit.
J’ai lu ce livre rapidement, prise dans le fil des événements et l’envie page après page d’en connaître le dénouement.
En ces temps anciens, la paix est très fragile. Toutes les races - Hommes, Trolls, Dieux etc. - vivent loin les uns des autres, ce qui évite de nombreux conflits. Malheureusement, des signes de mauvaise augure sont annonciateurs de malheurs. Une nouvelle guerre semble sur le point de faire basculer le monde dans les ténèbres. A moins que le courage d’une bande de joyeux lemmings ne chamboule les plans d’un destin qui s’annonce bien sombre. Voici une nouvelle fois un titre jeunesse de grande qualité : de l’action, de l’humour, du suspense et du courage... Bref, de quoi ravir un large public. Crisse, auteur prolifique de sagas fantastiques pour ado/adultes, nous conte, sans raccourci ni facilité, un récit de haute tenue. Les éléments s’enchaînent parfaitement et nous tiennent en haleine jusqu’à la fin de l’album. L’illustration de Fred Besson plaira à n’en pas douter, avec des dessins soignés et classiques, facilement lisibles pour les plus jeunes. Seul petit bémol, devoir attendre la suite ! - Michaël
Dans un village croate, le jeune Jacob vie une enfance des plus banale jusqu’au jour où son frère David disparaît.
Adapté d’une nouvelle de Olja Savicevic Ivancevic, « Les Pédés » est un drame familial. Entre non-dits et innocence, le récit nous entraîne dans une famille déchirée par l’incompréhension et les silences. Les auteurs nous livrent une œuvre forte, dure, mais ô combien nécessaire pour lutter contre les discriminations. Pour finir, un petit mot sur les magnifiques illustrations en noir et blanc de Danijel Zezelj qui valent à elles seules la peine d’ouvrir cet album. - Michaël
Bernard Mélois, célèbre sculpteur sur émail, a fait de sa vie une œuvre d’art.
Se sachant condamné par un cancer, le père de famille compte bien orchestrer ses funérailles et en faire un ultime moment de fête.
Pendant quelques semaines, nous allons suivre Clémentine, ses sœurs et sa mère dans la préparation de ce départ. Commander un cercueil et le peindre en bleu, émailler la croix, vider l'atelier de tous ses objets émaillés pour que l'artiste puisse retourner une dernière fois dans son antre, choisir les musiques de la cérémonie d'enterrement…
En se lançant à corps perdu dans les dernières volontés de Bernard, ses proches souhaitent rendre hommage à l’artiste qu’il était, mais surtout au mari et père idéal.
Chaque détail des préparatifs est l’occasion de plonger dans l’histoire et les souvenirs de cette famille unie par l’amour et la joie.
Un récit intime, très touchant, qui aborde avec humour, simplicité et tendresse des thèmes profonds comme le deuil et la transmission à travers l’art.
« Alors c’est bien » est une lecture qui résonne avec chaleur et humanité, nous rappelant la beauté de la vie même dans les moments difficiles. Une belle invitation à réfléchir sur ce qui compte vraiment.
Élodie Font nous partage sa vie sentimentale dans cette bande dessinée grâce aux crayons de Carole Maurel.
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Les amateur·rices de podcast ont peut-être déjà écouté Élodie leur raconter une partie de son histoire sur Arte radio : celle de son long coming in. Coming in ?… Le coming out, c’est se déclarer homosexuel·le, le dire à ses ami·es, sa famille… le coming in, c’est le reconnaître, de soi à soi. Et pour Élodie Font, qui détestait le mot lesbienne, cette acception a été un cheminement difficile, parsemé d’idées noires, mais aussi terriblement lumineux. Elle nous le raconte ici avec beaucoup d’humour, faisant des allers retours entre les pensées et la vie de la jeune Élodie d’hier et celle d’aujourd’hui.
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L’adaptation graphique de ce récit de vie par Carole Maurel ajoute, à coups de couleurs savamment dosées, un surplus de vie et d’universalité à cette histoire très personnelle et touchante. Car si pour certain·es, s’aimer est inné, pour d’autres (et iels sont nombreux·ses) c’est le travail de toute une vie ou d’une grande partie de celle-ci, que d’apprendre à s’aimer…
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C’est aussi pourquoi nous avons parfois le plaisir de découvrir, de lire leurs histoires à la fois douloureuses, magnifiques et magnifiées, comme c’est le cas dans cette bande dessinée.
« La forêt » est un très beau titre, tant dans la forme que dans le fond. En seulement 25 illustrations, 1 par page, Thomas Ott réussit l’exploit de nous transporter dans son univers. Pas de texte, simplement des images riches et profondes qui nous guident le long d’un récit onirique sur l’acceptation du deuil. Ici un jeune garçon, triste pendant une veillée funèbre, s’évade pour rejoindre la forêt voisine. Durant sa promenade, d’étranges phénomènes font leur apparition jusqu’à une bien étrange rencontre…
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Ce récit intimiste, aux allants mélancoliques, porte un message de vie et d’espoir, semblant
peut-être facile, mais utile et nécéssaire à entendre : la vie continue…
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Si l’histoire est belle, les illustrations le sont tout autant. D’un magnifique noir et blanc, elles sont réalisées à la carte à gratter, technique ô combien difficile dont Thomas Ott est devenu un des maîtres. Avec un cutter japonais des lignes sont grattées dans la couche noire qui recouvre un carton blanc. Thomas Ott créé donc ses images en « dessinant » en blanc sur un fond noir, avec des petites touches de grattage successives. Un travail extrêmement minutieux lors duquel l’artiste n’a pratiquement pas droit à l’erreur.
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Cette oeuvre est remarquable et nous sommes heureux de vous la proposer.
Simon est psychanalyste depuis de nombreuses années. Un matin, au petit-déjeuner, il casse un bol. Cet acte en apparence anodin va être le déclencheur d’une remise en question profonde.
Simon écoute les problèmes des autres sans jamais penser aux siens. Bientôt, il prend conscience que le fil des maux de ses patients tisse une chrysalide, certes protectrice, mais qui l’empêche de se déployer.
L’idée d’un voyage se projette à l'horizon et Simon rejoint les rivages d'une île aux confins de la planète.
Immergé dans une nouvelle culture où tout est simplicité, grâce et délicatesse, il redécouvre l'essentiel. Un univers propice à l’introspection, ce qui lui permettra, peut-être, de s’ouvrir au monde.
Le rythme de ce livre vous emporte tendrement, les mots et les phrases de Jeanne Benameur tressent une étoffe chatoyante qui vous enveloppe et vous berce. Un très beau texte, où l'amitié, l'amour, l'art et la psychanalyse s'entremêlent harmonieusement.
Paola Pigani, écrivaine et poétesse, glisse nos pas dans ceux d’une jeune immigrée hongroise à Lyon en 1929.
Souhaitant fuir la vie paysanne et misérable de son pays elle se retrouve rapidement confrontée à un autre type de labeur tout aussi avilissant, celui des usines textile de l’est de la France.
Avec un grand sens du détail l’autrice nous décrit les conditions de travail inhumaines de la main d’œuvre en 1929. Conditions qui vont de surcroît encore se dégrader avec la crise économique qui vient d’éclater aux Etats-Unis.
La force de son récit est de nous faire découvrir la grande Histoire à travers le quotidien de ses personnages, ce qui la rend plus réelle, plus palpable. A travers leurs parcours l’autrice nous plonge au cœur de la lutte entre fascisme et communisme qui verra en France l’avènement du Front Populaire et du gouvernement de Léon Blum. Emportés par cet élan de solidarité on se met à rêver d’une société plus juste ou les êtres seraient tous égaux, où la démocratie française tiendrait enfin les promesses faites en 1789.
Un très beau travail d’autrice où la fluidité des mots s’oppose à la cadence des machines. Ou la souplesse et l’élégance de l’écriture redonnent aux personnages une apparence humaine, eux que le système relègue à la condition de bêtes de somme. Paola Pigiani dépeint avec talent la métamorphose de ces ouvrier·ères qui par la lutte reprennent peu à peu possession de leurs vies et y gagnent, plus que l’amélioration de leurs conditions de travail, une dignité.
Enfin ce roman a le mérite de nous rappeler que les immigré·es d’hier sont les Français·ses d’aujourd’hui et qu’iels ont lutté pour les avantages sociaux dont nous bénéficions encore, alors même qu’iels étaient victime de discrimination et de racisme.
Lana, le temps d’un court séjour, revient avec son père en baie de l’Aquicorne. C’est en ce lieu qu’elle est née, mais a également perdu sa mère durant une terrible tempête. Ce tragique événement a provoqué son départ pour la ville, loin des agitations de la côte. Pourtant, c’est bien ici qu’elle se sent le mieux, pleinement entière, en parfaite harmonie avec la nature. Hélas, cet environnement est fragile et la pêche intensive provoque des dégâts irrémédiables qu’elle ne saurait ignorer, surtout lorsque les créatures féériques en appellent à son aide...
Les éditions Bliss nous font découvrir un nouveau titre d’une jeune autrice néo-zélandaise qui a fait ses armes dans le webcomics : Katie O’Neill. Elle développe, depuis plusieurs années déjà, un univers enfantin, riche de magie et de créatures étranges. Ses récits, toujours bienveillants, parlent de tolérance, d’entraide et d’environnement. Ces thématiques si chères à son cœur, lui sont sources d’inspiration et de partage. L’enfant va découvrir au fil de sa lecture un récit certes captivant, facile de compréhension, mais surtout doté de valeurs positives et universelles.
Katie O’Neill est également une autrice complète, son texte est illustré par ses soins. Son trait, à mi-chemin entre le comic book et le manga, plaira à n’en pas douter au jeune public. « La baie de l’Aquicorne » fait partie de ces livres qui, sans en avoir l’air, transmettent les clés pour un avenir meilleur.
« Le petit illustré de l’intimité » est une série de deux petits livres au contenu riche et instructif. Chaque volume présente un sexe : la vulve pour l’un, le pénis pour l’autre.
Ces titres permettent d’aborder librement et surtout sans tabous les questions de sexualité. Ils traitent aussi bien de l’organe en tant que tel, mais aussi du genre, du consentement et d’égalité.
Les illustrations, précises et détaillées permettent de connaitre son corps pour mieux le comprendre, mieux l’appréhender.
Deux titres importants, à lire, à faire lire, à discuter avec vos enfants pour certainement un meilleur épanouissement...