Voyages
Au départ il y a un objet étrange, un album regroupant 369 photos d’identité d’un homme caméléon. Parfois moustachu, parfois barbu, en costume de ville, puis en tenue de stewart, souriant ou le cheveu hirsute et le visage déformé, ce personnage semble brouiller les pistes, nous perdre dans un labyrinthe de miroirs où ses mille facettes se répondent à l’infini.
Immanquablement son mystère et son originalité éveille notre intérêt, il est magnétique, il nous attire, on veut connaître l’histoire de cet homme et comprendre sa démarche. Qui est-il ? d’où vient-il ? quel est sa profession et qu’est-ce qui l’a poussé à concevoir ce projet ?
C’est à toutes ces questions que va tenter de répondre l’auteur, il aura la tâche ardue, à partir de ce simple objet, de remonter le fil de l’existence de son sujet : Jacob. Il devra trouver la réalité qui se cache derrière ces photos qui laissent entrapercevoir un personnage hors du commun.
C’est dans cette aventure que nous suivons avec entrain Christophe Boltanski. Avec acharnement à la manière d’un naturaliste, il va tout au long du récit, récolter les caractéristiques d’un spécimen si particulier « Jacob ». Mais arrivera-t-il pour autant à retisser le lien entre toutes ces photos qui constituent le puzzle de sa vie et surtout percera-t-il le mystère de cet étrange album ? Autant de questions auxquelles vous trouverez une réponse, où pas, en lisant ce roman immersif au cœur de « Jacob » ?
Au-delà de l’enquête haletante que mène l’auteur, par ailleurs journaliste, ce roman délivre un très beau message : aucune vie n'est insignifiante ou dérisoire, sous la patine du temps, des habitudes et du quotidien se cache la force d'un combat de l'instant qui fait de chacun·e de nous un·e être d'exception, un·e être particulier·e qui met à contribution tous les moyens dont elle·il dispose pour survivre et exister, ce qui constitue en soi un acte héroïque et louable.
Lou a 50 ans. Antiraciste, bouddhiste et ancien professeur d’université, il est aujourd’hui chauffeur de taxi dans le Mississippi protestant et conservateur du Ku Klux Klan. Bien sûr Lou a tout du anti-héros, il est forcément aigri (on le serait pour moins que ça), légèrement tendu (faut dire qu’il s’enquille des journées de 12 à 15 heures dans une caisse pourrie en buvant du Redbull) et passe donc son temps à faire des doigts d’honneur à tout-va (ce qui vous me direz n’est pas très politiquement correcte pour un bouddhiste).
Donc Lou pourrait-être un abruti lambda vulgaire, détestable et violent car sa situation personnelle n’est vraiment pas reluisante et qu’il faut bien trouver un exutoire quelque part. Mais Lou est tout l’inverse car il est plein de paradoxes et que fondamentalement il est dépourvu de méchanceté mais pas de dérision. C’est ce qui rend ce personnage fort attachant et c’est pour ça que je vous invite à partager quelques courses avec lui.
Partez à la rencontre de passagers plus déglingués les uns que les autres, à la découverte de l’Amérique ultra-libérale et de ses laissés-pour-compte ! Laissez-vous conduire par Lee Durkee, à la manière d’un John Fante ou d’un William Faulkner contemporain, sur les routes désargentées du Sud des Etats-Unis !
Dans le même esprit je vous invite, également, à découvrir l’œuvre de John Fante et notamment « demande à la poussière » et à voir « Taxi Driver » de Martin Scorsese ou « Taxi Blues » de Pavel Lounguine. Enfin, Rayon BD vous pouvez aussi emprunter à la Médiathèque « Taxi ! » d’Aimée De Jongh et « Yellow Cab » de Chabouté (adapté du roman éponyme de Benoît Cohen).
Bon voyage au pays de Donald et Mickey sous méthamphétamine (âmes sensibles s’abstenir).
Un lundi, un petit garçon trouve un tout petit ours polaire dans son jardin. Si petit qu’il tient dans sa main. Le mardi, le tout petit ours a un peu grandi : alors le petit garçon le dépose dans sa poche. Arrivé au mercredi, ne tient plus dans la poche : il est temps de ramener petit ours chez lui. Alors nos deux amis s’en vont faire un long voyage…
Tout petit ours est un album d’une très grande tendresse. Richard Jones signe une très jolie histoire d’amitié entre ce petit garçon et ce petit ours. L’amour qu’ils se portent l’un à l’autre les fait grandir tous les deux : l’ours grandit physiquement, et le petit garçon s’émancipe également. Même quand notre ours polaire aura atteint sa taille adulte, dépassant depuis longtemps le petit garçon, il restera « Mon tout petit ours ».
Les illustrations à la gouache ainsi que le choix des couleurs pastel appuient le propos très doux du récit. A travers les expressions du garçon et de l’ours, le lecteur saisit toute la force de la relation indéfectible qui lie les deux personnages.
« Il était si petit qu’il tenait dans ma main. Je sentais son cœur battre sous sa fourrure de nuage blanc. »