McNaught, Jon
Andrew et Suzie, sa petite sœur, accompagnent leur mère dans ce qui semble être davantage un pèlerinage familial que de véritables vacances. À Kingdom Fields, petite bourgade de bord de mer, il n’y a rien à faire, sinon tromper l’ennui en se créant ses propres souvenirs.⠀
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Lire les œuvres de Jon McNaught, c’est redécouvrir et réapprendre les codes de la bande dessinée. C’est se dire que ce média est tellement inspirant et libre qu’il est source d’innovation constante. Cet artiste est de cette trempe, celle des innovateurs : il a compris la force narrative du neuvième art, se l’est accaparé pour nous en proposer sa version, sa vision. Il offre ainsi des œuvres riches en émotions, contemplatives et/ou tout simplement méditatives. Elles sont rythmées par une gestion du temps anormalement lente, de la « slow attitude » pour ainsi dire. Attention, on ne s’ennuie pourtant dans ses histoires, à aucun moment. « L’été à Kingdom Fields » ne déroge pas à la règle et ce qu’on pourrait penser comme un banal récit de vacances est bien plus. Telle une madeleine de Proust, il ouvre une porte sur nos souvenirs, notre passé. Les personnages du récit parlent peu : un ado qui voudrait être ailleurs, une mère qui a besoin de se retrouver et une petite encore innocente, bref, des portraits que l’on connaît, qui nous parlent. Oui, il y a peu ou pas de dialogue, pourtant le récit n’est pas muet pour autant, la bande son est bien présente, sous forme d’onomatopées, elle occupe l’espace scénique à la manière d’un quatrième personnage. Comme dans la vraie vie où les sons et les bruits nous entourent, mais que nous n’entendons plus par habitude, l’auteur les retranscrit et accentue ainsi encore plus cet effet d’immersion. Jon McNaught utilise, pour dessiner son histoire, des gaufriers de 20 petites cases, entrecoupées par moment d’illustrations pleines pages. Il se permet de zoomer sur des détails, écouter des gouttes tomber de la paroi d’une grotte, afin de créer cette ambiance unique. Sa palette de couleur est limitée à un jeu d’ombres et de lumières, oscillant entre des nuances de bleu et de saumon. ⠀
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« L’été à Kingdom Fields » est une douceur à savourer autant de fois que possible. - Michaël