Conseils lecture
Paul est fatigué de toujours se faire gronder par sa maman. Alors pour en finir avec cela, il décide de partir vivre seul dans une autre maison. Très vite la solitude et l’ennuie se pointent, aussi, lorsqu’un chat s’invite chez lui, Paul ne refuse pas de l’héberger, ni même pour le chien, encore moins pour le cochon et que dire à tous ceux qui arrivent… Les éditions Cambourakis nous proposent un charmant et amusant album suédois. L’autrice Barbro Lindgren écrit une histoire qui prend essence dans le quotidien et en fait un récit extraordinaire. Quel est l’enfant qui n’a pas rêvé un jour d’habiter seul sans avoir ses parents sur le dos ? L’autrice, maligne, ne donne pas pour autant victoire à ce garnement, mais conclut à merveille son texte par une mignonnette pirouette. Les illustrations d’Emma AdBage sont atypiques, son esthétisme va en faire hurler plus d’un car ici point de perspectives ou de décors majestueux, non, juste le principal et des personnages avec des « gueules », des tronches qui feront rire par leurs attitudes et leurs postures. Une vraie leçon de dessin, à l’apparence faussement enfantine et à la mise en scène irréprochable. Petit conseil, lorsque vous sentez la moutarde vous monter au nez et que vos enfants en ont assez de vous, venez passer un peu de temps à la médiathèque : il y a de beaux albums à lire ensemble, et les colères se transformeront en câlins (garantie à 75%). - Michaël
Une mère s’adresse à son enfant tout au long de son premier jour de classe. Elle évoque leur séparation, et toutes les activités qu’elles feront chacune de leur côté. Toutefois, elles seront liées ensemble par le fil des pensées qu’elles s’enverront durant la journée.
Cet album permet d’aborder le sujet de la séparation avec beaucoup de poésie, et de rassurer l’enfant lors de son entrée à l’école. Il trouve son originalité dans le parallèle fait sur chaque double page : on y voit d’une part la maman au travail, et de l’autre, la petite fille dans sa classe.
Les illustrations au crayon de couleur et le choix des couleurs pastel apportent beaucoup de douceur à l’album. Cela crée une ambiance feutrée, comme un cocon, qui apaise et rassure. On ressent à travers les personnages de la maman et de la petite fille toute la tendresse et l’amour qui transcende les lieux et qui les lie tout au long du récit.
« Peu importe où tu seras… Je penserai à toi. Je t’enverrai un bisou. Tu me le renverras »
Benoît Cohen, réalisateur de films et de séries, vit depuis environ un an à New York. Afin de s’immerger totalement dans cette nouvelle culture et pourquoi pas aussi, en tirer un scénario, il décide de devenir chauffeur de taxi. Loin de se douter vers quelle destination le mènera cette aventure, il découvre un monde de rudesse, de stress, mais fait aussi des rencontres improbables, inspirantes…
⠀
« Yellow Cab » est une bande dessinée adaptée du roman éponyme et de l’histoire vraie du réalisateur français Benoît Cohen qui s’est immergé pendant plus de trois mois dans le quotidien d’un chauffeur de taxi à New York. Le résultat est édifiant par le contraste qui existe entre la réalité et l’image « romantique » que l’on en a tous. Peut-être quelques belles histoires de temps en temps, mais non, le plus souvent, un milieu sans humanité où les seuls maîtres mots sont pour les uns, le profit et pour les autres, le mépris. Passionnant et instructif, le récit est une critique acerbe de notre société, mais aussi une approche des moyens de développer son imagination, sa créativité par le mode de l’immersion. Deux thématiques s’entrecroisent donc, se complètent pour restituer un témoignage unique.
⠀
Christophe Chabouté adapte avec brio cette oeuvre. Il la met en scène, en vie par des illustrations en noir et blanc de toute beauté et aux cadrages vertigineux. Il y distille par sa réécriture différentes couleurs, tantôt mélancoliques, tantôt pleines d’espoir.
⠀
« Yellow Cab » est une bande dessinée documentaire qui, grâce aux tableaux de Christophe Chabouté, nous fait voyager dans cette ville tant fantasmée. Bonne balade et n’oubliez pas le pourboire ! - Michaël
Petit voyou notoire, il n’est pas bien méchant, mais toujours à tremper dans différentes magouilles. Ce qui le motive, c’est faire plaisir à sa bourgeoise qui sait se montrer très aimante lorsqu’elle est pleine d’oseille. Alors, lorsqu’un plan simple se présente à lui, il ne se pose pas beaucoup de questions et fonce tête baissée. Hélas, cette fois-ci il aurait du y réfléchir à deux fois avant de pousser cette porte qui va l’entraîner dans une aventure diabolique... Difficile de vous parler de cette œuvre sans en dévoiler trop, je resterai donc assez évasif dans le contenu du récit. Sachez simplement qu’il s’agit d’une adaptation du roman de Franz Bartelt « Le jardin du Bossu » et qu’il résonne tel un film de Georges Lautner aux dialogues de Michel Audiard. L’histoire est originale et parfaitement menée, le suspense va crescendo jusqu’à un final terriblement efficace. Les illustrations et l’utilisation du noir et blanc ajoutent à l’atmosphère de cet album, lui donnant un petit côté rétro non dénué de charme. Les dialogues aux répliques affutées sont un délice de lecture. « La cage aux cons » est un huis clos captivant et envoûtant, un très beau titre pour commencer cette nouvelle année. - Michaël
Dans un royaume lointain, vit une petite princesse très intelligente. Elle passe ses journées enfermée dans sa tour à dévorer des livres. Ses parents s’en inquiètent : « qui va prendre en charge le royaume quand nous ne serons plus là ? et notre retraite ? ». Ils aimeraient lui présenter un prince à marier mais la petite princesse en baskets ne s’y intéresse pas. Ce qu’ils ne savent pas, c’est que leur fille, dans ses livres, apprend beaucoup de choses, comme vaincre un dragon ou fabriquer un antipoison ! Bien vite, la princesse va devoir mettre ses compétences à profit car voilà qu’un énorme monstre poilu à 6 yeux débarque et attaque le château… « Encore une histoire de princesses » me direz-vous ; oui, mais originale ! Par le prisme de la passion pour la lecture et du féminisme, on s’attache particulièrement à notre héroïne. Cette princesse n’a pas besoin de prince pour l’aider à faire ses choix ou à prendre en charge le royaume ! Indépendante, sûre d’elle et pleine de ressources, c’est un beau modèle de personnage qui est proposé aux enfants dans cet album. Les illustrations de Tristan Gion sont un régal pour les yeux. On y retrouve une palette de couleurs vives et très harmonieuses en même temps ; son dessin est rempli de références à l’histoire ou à la mythologie nordique et nous fait voyager. De plus, avec ses cheveux bleus et sa clé à molette dans la poche, aucun doute, notre petite lectrice est vraiment ancrée dans l’ère du temps !
Cette belle histoire parlera assurément aux amoureu.se.s des livres, en tout cas, moi, elle me touche droit au cœur !
Il a vraiment de la chance d’avoir une petite fille aussi gentille, car sans elle, le pauvre, sa vie ne serait certainement pas aussi belle ! Enfin, ça, c’est elle qui le raconte... Marie-Agnès Gaudrat nous propose une charmante histoire qui s’avère aussi amusante qu’originale. Le narrateur n’est autre que l’enfant, cette petite fille qui nous parle, nous raconte que la vie de son père ne serait pas exactement la même si elle n’était pas là. Cette jeune présomptueuse nous expose les moments de vie qu’elle partage avec son paternel et les bienfaits qu’elle lui apporte. Ces exemples sont superbement illustrés par Amélie Graux, qui utilise les crayons de couleur à merveille. Ces dessins ne sont pas que parfaitement réalisés, ils reflètent également ce que serait certainement la réalité et contrebalancent avec les dires de l’enfant. Par un système malicieux de rabat, nous ne découvrons ces vérités qu’une fois la ritournelle passée et nous nous surprenons à rire de ces situations. Un élément important de l’album est l’utilisation du père, car longtemps absent de la littérature jeunesse : il trouve ici un rôle à sa mesure, tendre et complice. Cet album séduira les enfants, les mamans, mais surtout les papas qui, à n’en pas douter, se retrouveront dans ce personnage. - Michaël
Être bandit de grand chemin n’est pas une sinécure, encore plus lorsque l’on est quelque peu distrait et assez gaffeur. Après un braquage réussi avec son frère, Chris a enterré leur butin, mais au petit matin, il ne se rappelle plus où. Du coup que faire, si ce n’est le retrouver coûte que coûte... Lancé comme un train à grande vitesse, ce western parodique ravira petits et grands. Le récit est truffé de scènes humoristiques et surtout inattendues. Nos personnages prennent indéniablement les mauvaises décisions, on le sait, on le sent et pourtant, ils nous surprennent. Graphiquement, le travail de Rémi Farnos est assez étonnant. Il multiplie les cases, offrant sur plusieurs pages des gaufriers chargés en mouvement. Par moment, pour calmer le tout, une illustration pleine page vient casser le rythme, permettant au lecteur un peu de répit et la possibilité de contempler les vastes étendues de l’Ouest américain. Chose rare, nos personnages n’ont pas de visages, leur expressivité vient de leur attitude, de leur comportement, presqu’à la manière des mimes, surjouant, mais jouissifs. « Calfboy » est un titre totalement loufoque que l’on dévore avec délectation et qui, pour ceux qui ont eu la chance de la voir, rappellera la mythique série d’animation « Panique au village ». Un album qui met de bonne humeur ne peut être qu’à partager ! - Michaël
Une petite fille s’apprête à toucher un papillon posé sur une fleur, mais l’auteur la prévient : elle risque de déclencher des catastrophes en séries ! on appelle ça l’effet papillon… Cet album très rythmé et plein de situations rocambolesques explique aux enfants comment un simple battement d’ailes de papillon peut déclencher une tornade à l’autre bout de la planète. Si cette notion peut leur paraître floue, ils s’amuseront néanmoins de l’enchainement des circonstances, amenées avec humour. Les illustrations sont joyeuses et colorées, contrebalançant efficacement les situations catastrophiques qui s’enchainent avec fatalisme sur nos pauvres animaux (très expressifs). Le genre du conte de randonnée est exploité avec brio par Philippe Jalbert, qui clôt cet album avec une chute délicieuse. A déguster de toute urgence !
La lutte contre la maltraitance animale est un sujet qui alimente les débats dans notre société. Aussi juste soit-elle, elle remet en cause bons nombres de croyances et/ou de pratiques plus ou moins barbares.
Alors, à raison, if faut se demander ce qu’est la maltraitance animale et où commence-t-elle ? Le débat est ouvert…
« Sandrine et Flibuste » et « Les droits des animaux en questions » sont deux titres qui abordent le sujet. L’un par des minis récits en bande dessinée où avec humour et cynisme, l’autrice aborde des thèmes explosifs comme l’élevage intensif, le broyage à vif ou encore la chasse à courre. Elle interroge en cela le rapport de domination de l'humain sur l'animal.
L’autre titre a une approche plus scientifique et juridique. Il va nous conter l’histoire de l’humanité et son rapport avec ce monde animal dont elle oublie souvent qu'elle en est. Il va s’attarder également sur le cadre juridique, l’animal est-il une chose, un meuble ? Les avancées de ces dernières années en matière de droit et le chemin qu’il reste encore à parcourir pour offrir à l’ensemble du vivant la vie qu’il mérite.
Gandhi a dit : « On peut juger de la grandeur d'une nation et ses progrès moraux par la façon dont elle traite les animaux. »… Alors où en est-on ?
Réchauffement climatique,révolution numérique,intelligence artificielle,et immortalité. L'auteur, tout en jouant avec les codes du roman d'anticipation, nous met en garde contre une socité du tout numérique et de profit au dépens de l'humain. Le récit n'est qu'un prétexte pour endre compte de l'avancée du pouvoir des GAFA. A lire de toute urgence. - Catherine
Après 3 ans d’absence, l’auteur du très remarqué « Saudade », nous revient avec un album d’une toute autre teneur. « Faille temporelle » est un recueil d’illustrations atypiques réalisées à l’origine pour un challenge personnel : faire 200 dessins en 200 jours. Ce défi, Fortu l’a brillamment relevé en y apportant une touche supplémentaire, distillant à chacune de ses toiles une âme unique, rendant le tout indépendant, mais pourtant indissociable. Grâce à ses scénettes, Fortu nous interpelle, nous interroge et nous questionne sur le monde et notre humanité. C’est par moment drôle, quelquefois offusquant, souvent absurde, mais toujours écrit avec subtilité et intelligence. Chaque illustration, d’un noir et blanc sobre et au trait photographique épuré, est un appel à la réflexion. « Faille temporelle » est album qui fait réfléchir et qui est présenté pour la première fois dans une médiathèque, votre Espace COOLturel. - Michaël
Conseils lecture
Dans l'ombre, un éléphant reste allongé, toute la journée, rempli de chagrin. Les autres animaux se mettent en tête de le divertir : ils lui racontent des blagues, lui font un numéro de swing-cancan ou lui apportent son plat préféré, de délicieuses feuilles d'acacia. Mais rien n'y fait : l'éléphant reste dans l'ombre, muet, maussade. Quand un jour, une petite souris vient s'assoir à côté de lui. Elle ne cherche pas à distraire ou à consoler l'éléphant, elle veut juste être à côté de lui pour se reposer un petit peu... et lui raconter son histoire. A travers cet album, Nadine Robert et Valerio Vidali nous parlent d'un thème peu commun en littérature jeunesse : celui de la dépression. Sans moralisme et sans aborder le sujet avec des réponses toutes faites, c'est plutôt avec douceur et subtilité que .le duo s'empare de la question Au début de l'album, l'opposition est marquée entre l'éléphant, dans l'ombre, seul avec son chagrin et sa douleur, et les autres animaux qui figurent sur des pages colorées, en plein soleil. L'arrivée de la souris est marquée par une palette de couleurs plus nuancée et coïncide avec le coucher de soleil et le lever de lune, qui se transformera en clé à la fin du récit, comme annonciatrice d'un nouvel espoir. La technique de l'illustration et de la colorisation utilisée, inspirée du pointillisme, apporte de la douceur au propos. Ce bel album doux nous rappelle qu'il n'y a pas de recette miracle pour faire face à la tristesse des autres. Parfois, ce qui est nécessaire, c'est de tomber sur la bonne petite souris.
Bien décidées à recommencer une nouvelle vie après une douloureuse séparation, Caroline et sa fille Marion emménagent dans la vieille demeure familiale de bord de mer. Marion, délaissée par sa mère, occupée à se reconstruire, va s'improviser exploratrice et déceler sur cette côte déchirée de bien étranges mystères. En effet, curieuse par nature, elle va découvrir d'étonnantes sculptures disséminées dans le village et alentour, dont personne ne semble connaître l'origine et la signification. Ses investigations la pousseront jusqu'aux portes d'un phare lugubre dont le gardien, un inquiétant personnage, semble détenir les réponses, mais à être trop curieuse la jeune fille risque de réveiller de vieilles malédictions et surtout le monstre des profondeurs responsable, peut-être, des années auparavant, de la mystérieuse disparition de son grand-père marin. Un récit court, aux illustrations magnifiques d'une jeune artiste qui signe là sa première bande dessinée. Un travail remarquable, allié à un scénario bien mené. - Michaël
Monsieur Henri vit dans un arrêt de bus depuis déjà très longtemps. Tellement longtemps que plus personne ne le remarque vraiment. Un jour, par le plus étrange des hasards, un éléphanteau vient s’asseoir à côté de lui.
Qu’il est beau ce petit éléphant, mais comme il a l’air triste… C’est décidé, Monsieur Henri va l’aider à retrouver sa famille même si pour cela il doit, un temps, quitter son abri…
« L’arrêt de bus » est un très joli album sur l’amitié et l’entraide. L’autrice délivre un texte certes court, mais empli d’une abondance d’émotions. D’une grande sensibilité, par moment mélancoliques, ces mots nous enveloppent d’une couverture de bien-être.
Ils sont en parfaite harmonie avec les délicieuses illustrations, au style « anglais » de Juliette Lagrange. Un travail pictural remarquable tant par le trait, fin et délicat, que par la mise en couleur : des aquarelles savamment travaillées, aux couleurs justes et équilibrées.
Leur travail de mise en scène est également à souligner, mélangeant allègrement illustrations pleine page, magnifiques de détails et saynètes plus intimistes, propices à l’émotion.
« L’arrêt de bus » est un très bel album, tout en retenue, propice à la lecture en famille.
Neil Gaiman, auteur anglais de romans fantastiques à succès, a développé dans les années 1990 une série de comics baptisée "Sandman". Cette saga, aujourd'hui devenue culte, est considérée comme l'une des œuvres majeures de la bande dessinée mondiale. Pour faire simple, « Sandman » est un subtil mélange de fantastique, de métaphysique, de philosophie, de science, de mythologie et de plein d’autres choses encore… le juste équilibre qui en fait un chef-d’œuvre onirique.
"Sandman : ouverture" s’adresse aux non-initiés, il est une porte d'entrée, un sas donnant accès à cet univers riche et foisonnant. La construction du récit est complexe, mais réfléchie et maitrisée. Les illustrations de J.H. Williams III s’adaptent parfaitement aux contraintes du découpage et à l'atmosphère étrange du récit grâce à une utilisation de différentes techniques graphiques.
N’oublions pas non plus, Dave McKean, qui officie ici en tant qu’illustrateur de couvertures et une fois encore, il nous éblouit par son génie.
"Sandman : ouverture" est une œuvre ambitieuse qui se lit d'une traite et vous questionne, vous interpelle sur l'origine des choses. Alors, n'ayez pas peur, venez rencontrer le marchand de sable…
1911. Augustin Lesage, mineur, fils et petit-fils de mineur, époux de fille de mineur, entend une voix : il sera artiste. Bien sûr cette idée provoque l’hilarité. Seul Ambroise y croit, et l’invite bientôt à une séance de spiritisme. Augustin entend à nouveau cette voix, qui lui intime de devenir peintre et le conseille dans ses choix de matériaux, conduisant même sa main sur la toile. Au bout d’une gestation longue d’une année, cette mystérieuse et minutieuse alchimie donne naissance à une toile virtuose de trois mètres sur trois. Le directeur de l’Institut Métapsychique International (IMI), le docteur Osty, décide de se pencher sur ce phénomène et rencontre celui qui n’est alors qu’un simple mineur. Avec l’aide de ces deux bienfaiteurs, Augustin poursuit sa voie et peint plus de 800 toiles.
Enferme-moi si tu peux débute avec cette biographie d’Augustin Lesage, l’une des figures les plus connues de l’Art Brut. Cet art est, selon Jean Dubuffet, l’œuvre de personnes dépourvues de toute formation et culture artistiques : l’art des fous et des marginaux… de ceux qui n’ont aucun droit. Pandolfo et Risjberg explorent celui-ci à travers six biographies (citons Madge Gill ou le Facteur Cheval) qu’ils relient entre elles de façon judicieuse et malicieuse, interpellant le lecteur sur la folie de ces créateurs mis au ban de la société parce que pauvres, femmes, infirmes, mal nés. On retrouve avec bonheur le couple d’auteurs de l’excellente BD Serena, qui une fois encore nous livre de beaux portraits intimistes, écrits à la première personne et sublimés par le dessin évanescent de Terkel Risjberg. Découvrir cette galerie d’artistes hors normes, c’est se rendre compte que la liberté, comme la création, provient avant tout d’un élan intérieur irréductible et salvateur, parfois issu du gouffre, mais toujours salvateur. Un album optimiste et d’une très qualité, graphique et narrative. - Michaël
Paris, rédaction de Gringoire, octobre 1933. Suite à la demande du rédacteur en chef, Xavier de Hauteclocque, journaliste germanophile, se voit confier une enquête sur la nouvelle Allemagne, celle qui a élu voilà six mois Hitler au rang de chancelier, et qui s’apprête à voter de nouveau aux législatives en novembre. L’ Allemagne, notre reporter la connaît très bien ; il en revient d’ailleurs, parle couramment la langue et y a un solide réseau d’indics. Dès son arrivée à Berlin, l’ambiance est nauséabonde : intimidation de la population, disparitions inquiétantes se multipliant, voyage encadré pour la presse étrangère… Une chape de plomb est tombée sur l’Allemagne en seulement quelques semaines. Difficile pour Xavier de Hauteclocque de mener son enquête : l’omerta règne. En quête de vérité, celui-ci persévère et prend des risques pour comprendre les rouages du nouveau régime nazi.La Tragédie brune, c’est avant tout le titre du récit publié dès 1934 par Xavier De Hautecloque, dans lequel il alerte sur le danger nazi. C’est aussi cette bande dessinée qu’en ont tiré Thomas Cadène et Christophe Gaultier où l’on suit un homme virevoltant au gré de ses investigations grâce au dessin incarné de Christophe Gaultier. Le trait, épais, souligne la noirceur de cet automne 1933, ô combien glaçant et annonciateur des malheurs à venir. Thomas Cadène se fait discret dans son récit sur la biographie de notre héros : il choisit de se concentrer sur l’enquête en s’appuyant sur le texte original (dont le début est reproduit en appendice). Hommage est ainsi rendu non seulement à un homme, mais aussi au journalisme d’investigation et à sa quête de vérité. Avis aux amateurs de L’Ordre du jour d’Eric Vuillard – et aux autres - : ne passez pas à côté de ce titre ! - Michaël
Ceci est une histoire vraie, celle de son autrice qui est née homme, mais qui ne l'a jamais été. C'est l'histoire de son adolescence, une partie de sa vie livrée crue, sans fioriture, sans omission aucune. Sa souffrance, son mal-être passé, elle nous les confie dans cette bande dessinée, sans doute une forme d'exutoire, mais surtout, certainement, pour ouvrir les esprits sclérosés et aider jeunes et moins jeunes à vivre pleinement ce qu'iels sont.
Elle est née homme, elle est une femme à part entière. Son adolescence, nous la découvrons page après page et ce qui nous frappe, c'est son courage. De souffrance en humiliation, elle a traversé des épreuves au-delà du raisonnable. Tel le roseau, elle a plié mais n'a pas rompu. Elle s'est construite dans la douleur, mais aujourd'hui, elle est ce qu'elle a toujours été : une femme.
"Mon adolescence trans", témoignage sur la transidentité, œuvre pour l’acceptation de toutes les orientations sexuelles, ainsi que pour l’accès à l’identité de genre de son choix. A partager !
En vidant les poches d'Alice, qu'est-ce que vous y trouverez ? une clé ? une tasse de thé ? et celle du petit chaperon rouge, assurément une belle galette et quelques fleurs cueillies au bord d'un chemin...
C'est en vidant les poches de son petit garçon, un soir, et en s'imaginant sa journée, qu'Isabelle Simler s'est demandé ce qu'on trouverait dans celles de nos personnages préférés... Grâce à une illustration bien maîtrisée, et une imagination débordante, cet album nous fait (re)découvrir les contes... à sa façon !
Nolwenn
Pulchérie, la trentaine passée, prend enfin conscience de son corps, de son être et surtout d’un organe si souvent tabou : le clitoris.
⠀
« L’affaire clitoris » est, comme le titre peut le sous-entendre, une bande dessinée de reportage. Nous allons, par une enquête minutieuse, partir à la découverte d’un organe féminin des plus importants et pourtant encore de nos jours très méconnu : le clitoris. Il est, selon la définition du Larousse, un « organe érectile de l'appareil génital féminin externe, principalement composé de deux bulbes bordant la vulve et d'un gland (ou clitoris au sens strict), situé au-dessus de l'orifice urétral. ». Très bien, mais encore… ? A quoi sert-il ? Comment est-il fait ? Et surtout, pourquoi depuis des siècles, il est invisibilisé dans nos sociétés patriarcales ? Tant de questions qui trouveront réponses dans cette excellente bande dessinée de vulgarisation. Science, philosophie, croyance sont autant de thèmes abordés par les autrices via cet organe de 10 cm qui n’est que depuis 2017 correctement représenté dans les manuels de SVT.
⠀
Ce titre est classé dans nos rayons adultes, mais il peut vraiment être conseillé à un plus jeune public tant sa valeur est éducative et pédagogique, libératrice d’un plein épanouissement personnel.
Comme toutes les jeunes filles de son âge, Raina, 11 ans, passe le plus clair de son temps à rêvasser et à chahuter avec ses frères et sœurs. Son entrée en sixième s'est passée tout naturellement : elle a des amies, d'assez bonnes notes et se sent bien dans ses baskets. Pourtant, un malheureux accident va bouleverser cet équilibre. Une mauvaise chute casse à jamais ses deux dents de devant. Défigurée, la jeune fille va alors subir de nombreuses opérations ainsi que le port d'appareils tous plus horribles les uns que les autres. Son calvaire de presque 5 ans va profondément modifier sa personnalité et de ce fait, sa relation aux autres. En pleine adolescence, comment avoir confiance en soi et dire à l'être aimé ce que l'on ressent avec de fausses dents et du fil de fer plein la bouche ?
Sensible et drôle, cette histoire peut, si vous avez une dent contre les dentistes, vous réconcilier avec eux. Et si, tout comme notre héroïne/auteure, vous avez des problèmes de dentition, elle vous redonnera le sourire et l'envie de croquer la vie à pleines dents. - Michaël
Eté 1913, Valdas a 15 ans, dans une riche demeure du bord de mer, sa vie se dessine. Le monde des adultes, auquel il n’appartient pas tout à fait, lui paraît être un vaste théâtre où tout n’est que faux-semblants, alors la nuit il s’enfuit renifler la côte, ses embruns, un parfum de liberté. Il y vit ses premiers émois et se confronte au monde extérieur, plus pauvre, plus dépouillé loin du confort de sa classe bourgeoise vaguement contestataire.
De retour à St Pétersbourg la vie s’emballe, une promesse de fiançailles, l’armée, la guerre, la révolution, le choix du mauvais camp, puis l’exil, Paris, la misère, une autre guerre et la solitude. Un siècle de barbarie dont il est le témoin, et au milieu de cet océan de cruauté, un écrin de beauté, une île où affleure l’amour. Une parenthèse de vingt jours d’un bonheur intense qui lui permettront toute sa vie de résister.
Voilà ce que raconte merveilleusement ce livre, comment un amour même éphémère peut être éternel. Comment dans un monde sauvage et violent, il vous donne la force d’être juste et bon, de rester humain.
Encore, un magnifique roman, tout en pudeur, d’Andreï Makine, dont la langue, si belle, si douce à l’oreille est un enchantement.
Il est des livres rares qu’il nous semble toujours avoir connus parce qu’on s’y sent bien et parce qu’ils ont quelque chose d’universel en eux. Le roman que je vous propose de découvrir aujourd’hui fait partie de ces livres.
Il est comme les premiers jours de printemps, la douceur et la liberté retrouvée. Une petite brise qui délicatement vous soulève et vous fait vous sentir léger, un élan du cœur qui vous donne des envies de voyages et d’évasion. Le doux sentiment de pouvoir faire ce que l’on veut sans avoir de compte à rendre. Un parfum d’école buissonnière.
« Fup, l’oiseaux canadèche » c’est l’histoire de trois personnages atypiques, un vieillard « Jake », son petit-fils « Titou » et un canard apprivoisé (ou presque) « Canadèche ». Des êtres hors norme qui justement n’en ont que faire de la norme, ce qui les rend particulièrement attachants.
Le grand-père fait du whisky de contrebande et va jouer au poker quand il a besoin d’argent. Le jeune garçon passe son temps à planter des piquets et à faire des clôtures pour son propre plaisir et sans but aucun. Quant au canard il ne vole pas, mange énormément et se prend pour un chien de chasse.
Trois héros, marginaux qui évoluent dans un cadre champêtre au gré de leurs envies, on est pas loin du jardin d’Eden et d’ailleurs si je devais adopter une religion, je pense que ce livre serait ma bible et les vitraux des églises, les magnifiques illustrations de Tom Haugomat qui mettent en couleurs cette belle histoire. Cerise sur le gâteau ou orange sur le canard ce livre est illustré de 100 magnifiques planches épurées et lumineuses (au sens propres comme au sens figuré).
Ce roman est une merveilleuse fable « sans la morale chiante et bien-pensante à la fin » ajouterait le vieux pépé Jake.
Pour poursuivre l’expérience je vous propose de regarder cette captation de la lecture à deux voix du livre par Jim Caroll et Nicolas Richard, illustrée en direct par Tom Haugomat et mise en musique par Rubin Steiner (un maître de la musique électronique française, durée 44 minutes).
"Bergères guerrières" : à la lecture de ce titre, on pourrait s'attendre à une bonne comédie franchouillarde avec des gags à n'en plus finir. Il n'en est rien. Bergères guerrières est un titre jeunesse pour ceux qui aiment l'aventure, les sagas fantastico-médiéviales. Quant à ceux qui n'aiment pas cela : vous allez adorer quand même ! Jonathan Garnier et Amélie Fléchais nous ont concocté une oeuvre palpitante avec de l'action, des sentiments, du mystère et tout de même une bonne dose d'humour. Nous suivons les aventures de ces bergères avec passion et on ne referme ce livre qu'avec regret et une envie de faire disparaître à jamais ces quelques mots "à suivre"... - Michaël
Après une première partie très dure qui décrit la cruauté, les codes de la violence en milieu carcéral, on est soulagé pour Joseph qui va enfin retrouver sa liberté;mais à quel prix !
La" robinsonnade" qui s'ensuit est un vrai régal, un rapport à la nature magnifique ! Mais aussi une lutte contre la solitude : plus d'ennemi mais plus personne à aimer.
Et la grande question existencielle : peut-on vivre seul ?
De très beaux moments de lectures telle l'évocation de la longue et patiente approche de l'animal à apprivoiser.
Mon coup de coeur de cette rentrée !
C.