Conseils lecture
Que dire de plus après un titre qui résume à lui seul le contenu de cette œuvre ? Peut-être, excusez du peu, évoquer le remarquable travail de l’auteur qui réussit simplement, mais avec beaucoup d’humour, à parler du racisme au sens large du terme. Il présente l’humanité et ses rapports conflictuels qu’elle a toujours entretenu avec cet·te « autre », qui n’est pourtant qu’elle-même !? Le racisme, la xénophobie ou encore les stéréotypes, les préjugés et autres discriminations sont autant de thèmes abordés dans ce livre, vulgarisés et combattus comme il se doit. Cette bande dessinée n’est pas que pour les enfants, elle est destinée à tous et toutes, tant son fond fait écho à la vie de tous les jours et va à l’encontre de cette immonde bêtise qui inonde le champs politique et certains médias.
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Ce titre est à découvrir dans votre Espace COOLturel, au rayon BD « tout public » et on vous la conseille chaleureusement ! - Michaël
Ann est une femme libre : pas de maison, pas d’enfant, pas d’homme, ou plutôt de temps en temps et pour se faire un peu d’argent. Elle vit dans sa voiture et telle la cigale, se la coule douce. Malheureusement, ce mode de vie peut attirer des ennuis et un soir, c’est la mauvaise rencontre, l’acte de trop... Seule, elle doit fuir vers l’inconnu, mais dans cette échappée belle rencontrera des personnages attachants, hauts en couleurs et vivra un peu leur histoire. Voici un manga original, tant par son histoire que son illustration. Le trait est étonnant : rien à voir avec ce qui nous vient habituellement du Japon. Ici, le dessin est volontairement grossier, sans trame (technique pour ombrer ou faire des effets de lumière dans les mangas), mais très expressif et parfaitement adapté au personnage de Ann. Le récit est lui écrit tel un feuilleton américain de type « série bouclée » : chaque chapitre narre une rencontre fortuite, fruit du hasard ou du destin ; Ann - grâce à sa personnalité assez unique - chamboule la vie de ces autres qu'elle croise. Véritable comédie dramatique « Sunny sunny Ann ! » est un manga à lire et faire lire aux non initiés du genre. - Michaël
Une relation très attachante, entre câlins et parfois, coups de griffe, se noue entre la petite fille et momo, sa chatte.
Le flegme des chats et l'incompréhension qu'on ressent parfois à leur égard est très bien retranscrit dans cet album, bien soutenu par des illustrations toutes en douceur. Nolwenn
C’est l’histoire d’un écureuil, il a un arbre, son arbre. Cet arbre donne des pommes de pin, ses pommes de pin. Tout cela est à lui et à personne d’autre, mais comment protéger ses propriétés face à un ennemi invisible qui menace ?... « C’est mon arbre » est un album jeunesse à double lecture. Une histoire délicieusement absurde pour commencer, mais que l’on comprend dans un second temps, bien plus profonde et philosophique qu’il n’y paraissait. Ici, subtilement, sont abordés les thèmes de la possession, de la propriété mis en opposition au partage et à la liberté. L’ignorance prend une place également importante, car elle est vecteur de peur et de paranoïa. Cette histoire dépeint de façon rare, mais intelligente, notre société et ses abus. Ce livre n’est pas triste pour autant, Olivier Tallec livre une composition astucieuse, emplie d’humour et qui fera rire les enfants comme les adultes. Ses illustrations sont une merveille, pas de grands et beaux décors, mais le strict minimum, juste ce qu’il faut pour offrir à notre écureuil un espace d’expressivité, à la one man show, totalement désopilant. - Michaël
Il y en a une qui n’a visiblement pas envie de dormir. Alors, lorsque son papa s’apprête à éteindre la lumière, une question jaillit : et pourquoi ci… ? Et pourquoi ça… ? Les réponses, le papa ne les a pas toutes, mais par contre, niveau imagination, il est plutôt très fort… Voici un merveilleux album proposé par les éditions « Little Urban » qui sont coutumiers du fait. Ils nous font découvrir l’œuvre deux aut.eur.rices de talents : Marc Barnett et Isabelle Arsenault. « Parce que » est de ces albums qui marque, qui reste dans vos esprits, non pas parce que la thématique est originale, mais parce qu’il a ce petit quelque chose de plus, de différent. Il se lit et s’appréhende différemment selon les sensibilités, pour certains l’aspect humoristique ressortira, pour d’autres la tendresse véhiculée ou encore par moment le léger parfum de mélancolie. Le texte est court, mais nul besoin de nombreux mots lorsque ceux que vous utilisez sont les bons. D’ailleurs, ils s’effacent rapidement pour laisser libre cours à l’imagination du papa et de sa petite fille. C’est alors qu’Isabelle Arsenault, illustratrice, prend le relais et nous entraine dans des univers incroyables. Ici, c’est moi qui manque de mots pour décrire les illustrations, tant elles sont magnifiques. Sur papier brun, elle couche au crayonné personnages et décors qu’elle volumise avec des jeux d’ombres et de lumières, aux couleurs aquarellées. Pleine page ou double page, ces incroyables dessins vont vous fasciner. « Parce que » est un incontournable qui plaira à tous et auquel chacun pourra s’identifier. - Michaël
Il est des livres rares qu’il nous semble toujours avoir connus parce qu’on s’y sent bien et parce qu’ils ont quelque chose d’universel en eux. Le roman que je vous propose de découvrir aujourd’hui fait partie de ces livres.
Il est comme les premiers jours de printemps, la douceur et la liberté retrouvée. Une petite brise qui délicatement vous soulève et vous fait vous sentir léger, un élan du cœur qui vous donne des envies de voyages et d’évasion. Le doux sentiment de pouvoir faire ce que l’on veut sans avoir de compte à rendre. Un parfum d’école buissonnière.
« Fup, l’oiseaux canadèche » c’est l’histoire de trois personnages atypiques, un vieillard « Jake », son petit-fils « Titou » et un canard apprivoisé (ou presque) « Canadèche ». Des êtres hors norme qui justement n’en ont que faire de la norme, ce qui les rend particulièrement attachants.
Le grand-père fait du whisky de contrebande et va jouer au poker quand il a besoin d’argent. Le jeune garçon passe son temps à planter des piquets et à faire des clôtures pour son propre plaisir et sans but aucun. Quant au canard il ne vole pas, mange énormément et se prend pour un chien de chasse.
Trois héros, marginaux qui évoluent dans un cadre champêtre au gré de leurs envies, on est pas loin du jardin d’Eden et d’ailleurs si je devais adopter une religion, je pense que ce livre serait ma bible et les vitraux des églises, les magnifiques illustrations de Tom Haugomat qui mettent en couleurs cette belle histoire. Cerise sur le gâteau ou orange sur le canard ce livre est illustré de 100 magnifiques planches épurées et lumineuses (au sens propres comme au sens figuré).
Ce roman est une merveilleuse fable « sans la morale chiante et bien-pensante à la fin » ajouterait le vieux pépé Jake.
Pour poursuivre l’expérience je vous propose de regarder cette captation de la lecture à deux voix du livre par Jim Caroll et Nicolas Richard, illustrée en direct par Tom Haugomat et mise en musique par Rubin Steiner (un maître de la musique électronique française, durée 44 minutes).
Un indien, un cowboy, face à face tendu pour un duel au soleil qui s’annonce sanguinaire... Enfin peut-être... À moins que... Sauf si... « Duel au soleil » est plutôt considéré comme un album jeunesse, mais je le place bien volontiers dans la catégorie de « Mes premières bandes dessinées ». Pourquoi ? Parce qu’il possède de nombreux codes narratifs des 9e et 7e arts. Je m’explique, lorsque l’on ouvre l’album, on découvre de très belles illustrations pleine planche dont les cadrages varient de page en page. Tantôt « plan d’ensemble », tantôt « gros plan », voire « très gros plan », Manuel Marsol dynamise son récit par cette narration particulière qui permet d’installer un certain suspense. Très peu de texte utilisé, placé à la manière de phylactère, mais sans la bulle. Tout est visuel et permet aux plus jeunes et aussi aux plus vieux de comprendre que la lecture n’est pas faite que de lettres et de mots : elle se trouve également dans l’organisation des différentes illustrations. Cette mise en scène technique pour raconter une histoire est une réussite. La trame narrative est quant à elle originale, ce duel tourne à l’absurde et nous sommes touchés par ces deux personnages, si différents et si proches à la fois... « Duel au soleil » est à découvrir car il vous fera rire et est par ailleurs une bonne approche pour comprendre l’art de la mise en scène, trop peu souvent étudié et pourtant sans doute bien plus important que l’illustration elle-même. - Michaël
Les deux volumes du cultissime « Idées noires » de Franquin sont enfin réunis dans une intégrale. Considérés à juste titre comme des chefs-d’œuvre du neuvième art, les différents récits qui le composent sont toujours aussi percutants et d’actualité, même s’ils ont été écrits dans les années 80. L’écologie, l’humanisme, la guerre sont autant de sujets qui nous préoccupent encore aujourd’hui. En utilisant l’humour avec brio, Franquin fait un constat sombre, mais réaliste, de notre société. Sans sermon, sans jugement ni remède miracle, il nous livre simplement des vérités, libre à nous de nous les approprier ou pas. « Idées noires » est une œuvre intemporelle, héritage du génie qu’était Franquin, à classer parmi la meilleure des littératures. - Michaël
Des camions et des caravanes arrivent dans un pré puis les forains installent leurs attractions à la lisière d’une forêt. Le jour, la fête foraine bat son plein ; puis la nuit tombe, le gardien fait une dernière ronde et le lieu se vide en attendant de recommencer le lendemain. Vraiment ? Non… car les animaux qui observent depuis leur forêt sont bien décidés à profiter eux aussi de ce lieu féérique, plein de sensations fortes et de sucreries à déguster ! "La nuit de la fête foraine" est un album qui donne à voir avec délice, un univers magique, une bulle ou le temps n’est dédié qu’à l’amusement. Sans texte, l’illustration de Mariachiara Di Giorgio réussit à parler à tous nos sens : on entend la musique des manèges se mélanger les unes aux autres, on sent le goût de la barbe à papa fondre dans la bouche. On se plonge sans retenue dans ce monde sucré et doux, aux lumières étincelantes et aux couleurs éclatantes. Les ours, sangliers, biches et autres loups sont représentés avec décalage et beaucoup d’humour dans des attractions peu adaptées à leurs morphologie, mais peu leur importe. Leurs regards sont si expressifs qu’on retrouve le plaisir d’être là et la joie dans leurs yeux. Un coup de nostalgie assuré pour les grands enfants que sont les adultes et d’émerveillement pour les plus jeunes qui assurément, auront hâte de retrouver leur fête foraine dès que celles-ci rouvriront leurs portes.
Conseils lecture
« Ils font de petits pas, les vieux, et traversent toujours au feu … Allez vite, c’est dangereux, on pourrait se casser en deux… Souvent ils souffrent dans leur corps, ils résistent encore et encore et combattent le mauvais sort… ».
Le ton est donné, avec humour et tendresse, l’autrice dresse le portrait de ces personnes âgées qui nous entourent. Leur vie quotidienne, pas toujours évidente, leurs petits bobos, leur solitude … Mais aussi leur combativité, leurs moments de bonheur et leurs souvenirs. Un texte poétique tout en rimes, où deux parties se répondent au fil des pages. La/le narrateur·rice qui évoque un cliché préconçu et un·e vieux·eilles qui lui répond en exposant son expérience et ses sentiments.
Les illustrations aux tons pastel sont douces et apaisantes. Les visages des personnages sont très expressifs. Les différentes situations sont représentées d’une manière joyeuse et drôle. L’équilibre entre le texte parfois triste, mélancolique et les dessins à contre-pied en font un album très touchant. On ne peut s’empêcher de penser aux instants passés avec nos grands-parents. Se dire qu’il faut profiter de chaque petit plaisir partagé en compagnie de nos proches.
« Vieillir n’est pas une maladie, c’est vivre une très longue vie. »
Raowl pourrait être un prince charmant, si ce n'est que sa véritable nature est d'être la Bête. Un peu comme dans le conte de Perrault, lui, ce qu'il souhaite avant tout, c'est d'être aimé par une princesse. Mais comment en trouver une ? Facile car c'est bien connu, il y a toujours quelque part une princesse dans la panade... « Raowl » est la nouvelle série humoristique de Tebo et une fois encore, cet auteur à l'humour corrosif frappe fort. Nous retrouvons tous les ingrédients déjantés et délirants de son univers : une succession de gags et de situations burlesques qui s'enchaînent à un rythme effréné, le tout au service d'une histoire originale se jouant des contes de notre enfance. Jeux de mots, situations burlesques font bon ménage et leur message est magnifié par les illustrations de Tebo. Son style, cartooniste, insuffle une énergie folle à nos héros par des gestuelles et des visages souvent distordus, mais désopilants. Il se permet également de très belles doubles-pages d'action, laissant ainsi parler tout son talent d'illustrateur. Une autre force de ce récit est qu'il n'y a point de sexisme : l'autre personnage principal est la Belle, qui comme son compère n’est pas la dernière pour en découdre. Tebo réussit une entrée fracassante dans le catalogue Dupuis, éditeur habitué à des titres jeunesse plus « gentils », mais soucieux de diversification et gage de qualité. - Michaël
Raven, petite fille rigolote et maligne, a perdu son chemin et ses parents. Vu qu’elle n’a pas la langue dans sa poche, elle va quémander l’aide à un ours, qui lui est plutôt du genre grognon et solitaire. Pourtant, celui-ci va accepter sans se douter que cette aventure sera bien plus longue et compliquée que prévue... Agréable surprise que cette bande dessinée jeunesse qui nous vient du Brésil. A l’origine publiée en ligne, elle fait aujourd’hui l’objet d’une adaptation en album. Drôle, inventive, l’histoire se lit avec beaucoup de plaisir tant les rebondissements sont fréquents. Les illustrations sont belles et colorées, servies par un découpage original. On s’amuse énormément à la lecture de ce récit, mais on cogite également pas mal, la faute à de nombreuses énigmes qui parsèment la quête de nos amis. Un duo improbable à découvrir rapidement. - Michaël
Des enfants et leur professeur s’en vont en classe verte. Verte ? Grise plutôt ! Car notre petit groupe part visiter la lune ! Pendant que ses camarades et son enseignant explorent cet astre, une petite fille, un peu lunaire justement, en profite pour croquer la terre vue de son satellite et finit par s’assoupir. A son réveil, la classe est repartie sans elle ! C’est alors qu’elle va faire une bien étrange rencontre… Classe de Lune est un album sans texte, poétique, qui prends son temps pour nous parler de contemplation et d’imagination. Les illustrations à la peinture supportent efficacement le récit et le contraste en noir et blanc des paysages lunaires permettent de détacher les petits détails de la rencontre du 3e type qui se déroule sous nos yeux. Avec notre petite héroïne, nous traversons merveilleusement toutes les émotions qu’elle peut ressentir grâce à une illustration subtile et maîtrisée : la peur, la curiosité, la mélancolie… De plus, John Hare réussit le tour de force de ne pas utiliser les expressions faciales car notre petite astronaute garde sa combinaison spatiale pendant presque toute l’histoire. Enfin, le thème original (une classe verte sur la lune, qui n’en rêverait pas ?) ravira les enfants, petits et grands, qui ont la tête dans les étoiles.
Ada Müller vit seule avec son père depuis que sa mère les a quittés. Son quotidien à la campagne est dur en cette année 1917, l’hiver s’annonce rude et son père la maltraite, lui impose de nombreux travaux physiques harassants. Ses seules distractions sont sa chienne Gertha, mais également la peinture qu’elle pratique en cachette et qui fait l’objet d’un échange épistolaire avec E(gon). Elle profite d’un déplacement de son père à Vienne pour montrer ses derniers travaux à son correspondant, loin du regard paternel, du moins le pense-t-elle.
Barbara Baldi, qui s’était déjà fait remarquer avec « La Partition de Flintham », récidive en créant un beau personnage d’artiste féminine dont la vocation contrariée ne peut s’éteindre. Son histoire, à la fois terrible et touchante, bénéficie d’un dénouement inattendu. Il faut souligner la patte de l’auteure, la beauté de ses cases peintes, y compris lorsqu’elle reprend certains portraits iconiques de la peinture moderne. Barbara Baldi creuse son sillon dans la bande dessinée, l’écrivant de façon très romanesque et féminine. Cette œuvre vous séduira d’abord par son esthétique picturale avant de vous conquérir définitivement par son histoire, singulière. - Michaël
Ils sont quatre. Ils sont "amis" et ont un point commun qui les rassemble : leur mauvaise réputation ! Monsieur Loup, Monsieur Piranha, Monsieur Requin et Monsieur Serpent ont décidé, le temps de cet album, de vous prouver une bonne fois pour toutes qu'ils ne sont pas, mais vraiment pas, de mauvais gars...
Quelle idée originale d'Aaron Blabey que de nous proposer un récit jeunesse uniquement centré sur des personnages que l'humanité, au fil des siècles, a transformé en monstres. Alors pourquoi ne pas les réhabiliter, enfin si on veut... et surtout de façon humoristique. Oui ce récit est une vaste plaisanterie : on rit à chaque page, chaque situation. La bonne volonté ne suffit pas toujours et nos charmants compagnons en sont le parfait exemple.
Le récit est rythmé et s'affranchit des codes en brisant régulièrement le quatrième mur par l'intermédiaire de Monsieur Loup, le personnage principal.
Côté dessin, l'auteur possède un style plus proche de l'illustration jeunesse que de la bande dessinée, mais peu importe, cela fonctionne à merveille ici. Des plans moyens, des gros plans et des très gros plans sont sur-utilisés afin de centrer toute l'attention des lecteur·rices sur les faciès hilarants de nos protagonistes.
"Les bad guys" est un court mais intense moment de rigolade et vous pourrez prolonger le plaisir grâce à son adaptation animée sur grand écran.
2151 : l’humanité vit dans 7 mégalopoles tandis que la nature reprend ses droits sur le reste de la planète. La surexploitation des ressources de la Terre au début du 21e siècle et les désordres qui s’ensuivirent ont décimé la population. Le seul et dernier espoir des hommes pour un monde meilleur : la conquête spatiale. La plupart en rêvent, Youri non, car sa mère, Simone, prépare son départ pour une mission spatiale sans retour, SOON. Le scénario échafaudé par Thomas Cadène et Benjamin Adam est fouillé et confère à cette bande dessinée une intensité qui se révèle petit à petit. Dans ce récit d’anticipation, il est bien évidemment question d’écologie et de l’urgence à changer nos habitudes de consommation. Mais il nous interroge aussi et surtout sur ce qui nous fait aller de l’avant, partir à l’aventure, donner du sens à nos actions et à nos vies. Ce qui fait d’un simple citoyen un bon fils, un homme amoureux, un père attentif, ou d’une mère une femme aimante et conquérante. Le graphisme créé par Benjamin Adam est sublime et participe de cette profondeur. Il alterne illustrations en bichromies sur fond noir pour relater la conquête spatiale et sur fond blanc pour narrer l’histoire de Youri. Ainsi, il donne corps à cette dualité, être et devenir, qui oriente chacun de nos gestes et crée le monde de demain. « Soon » est un beau récit d’anticipation à la fois sombre et lumineux qui fera de vous un lecteur comblé. - Michaël
David Merveille n’en est pas à son coup d’essai en ce qui concerne Monsieur Hulot, le personnage emblématique et bien connu du réalisateur Jacques Tati.
S’inspirant des films cultes « Mon oncle » ou encore « Les vacances de Monsieur Hulot », il nous offre avec son dernier album « Hulot Domino » un livre empli de poésie et de petits mystères. Dans cet album sans texte, nous retrouvons Monsieur Hulot dans sa vie et ses activités quotidiennes : lecture, bronzage à la plage, promenades… Chaque moment se termine par une découpe au laser en ombre chinoise, ellipse qui entraîne Monsieur Hulot dans une tout autre situation. Toutes ces petites scénettes humoristiques sont habilement liées par des strips à la manière de la bande dessinée. Les découpes en ombre chinoise viennent se superposer aux pages superbement colorisées et soulignent le décalage de notre personnage et l’humour de notre auteur-illustrateur. David Merveille nous offre un album à contempler, à lire à relire, où l’on retrouve pour notre plus grande joie Monsieur Hulot, son imperméable, sa pipe, son parapluie, mais aussi son étourderie et sa magie.
Alan, auteur en mal de reconnaissance, vient de perdre son ami d’enfance. Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, sa compagne en profite pour lui annoncer qu’elle le quitte pour quelqu’un de plus mature et surtout de plus talentueux. Alors forcément au bord de la piscine de ses voisins, qu’il entretient pendant leurs vacances, Alan à la sensation, comme Isabelle Adjani dans son petit pull marine, d’avoir touché le fond.
Mais qu’à cela ne tienne il va rebondir et s’imposer une discipline de samouraï pour écrire le roman de sa vie et reconquérir l’être aimé ! Malheureusement, rien ne se passe comme prévu. Alan est aux antipodes d’un maître de guerre japonais et ses bonnes résolutions sont tout sauf faciles à tenir. Un peu maladroit, plutôt inadapté socialement, roi de la procrastination, habité par des tocs et angoisses multiples, il a plus du anti-héros que l’inverse.
Son existence guidée par les faux pas et les quiproquos devient vite décalée, totalement loufoque et hilarante sous la plume de Fabrice Caro. L’auteur nous livre un roman plein d’humour qui dépeint avec beaucoup de justesse l’incongruité et l’absurdité des rapports sociaux et affectifs qui régissent parfois nos vies.
Enfin c’est un réel plaisir d’accompagner le quotidien d’Alan, personnage plein d’autodérision et particulièrement attachant avec son côté bancal et désabusé.
Si vous avez encore envie de rire vous pouvez également découvrir les bandes dessinées de l’auteur disponibles pour la plupart à la médiathèque.
En 2018 à Moscou, un père succombe sous les coups de ses trois filles âgées alors de 17, 18 et 19 ans. C’est le point de départ du roman de Laura Poggioli qui tout au long de son ouvrage, tente de comprendre comment trois jeunes femmes peuvent concevoir un tel acte et le mettre à exécution. Grâce à de nombreuses archives elle recompose le quotidien de ces trois filles et de leur mère depuis leur enfance jusqu’à ce jour fatidique où elles passent à l’acte. On découvre alors un père qui n’en a que le nom, tyrannique, abusif, violent, un monstre en quelque sorte et une société russe complice où patriarcat et tradition légitiment les violences faites aux femmes, où la corruption, la religion et le communautarisme murent les victimes dans le silence.
Le récit ne s’arrête pas là car il trouve une résonnance particulière dans l’histoire personnelle de l’autrice. Elle aime profondément la Russie pour y avoir vécu à plusieurs reprises, pour avoir appris sa langue, aimé ces habitants. Elle se souvient tout au long du roman des moments passés là-bas, de ses amis, du bonheur partagé, de cette société attachante et contradictoire. Elle se souvient aussi de ce petit ami violent « Mitia », comment avait-elle pu accepter son comportement ? Elle se souvient de toutes les violences dont elle a été victime, de celles qui ont été faites à ses aïeules dans une autre société, en France. Et c’est là toute la force de ce livre. Non, les violences faites aux femmes ne sont pas une pratique barbare d’un autre pays, d’une autre culture ! Elles existent partout, au quotidien, jamais anodines et toujours insupportables.
Un roman parfois dur mais absolument nécessaire, qui vous met en face de vos responsabilités, comme les trois regards qui vous fixent sur la couverture du livre. Ceux de ces trois jeunes Moscovites : Krestina, Maria et Angelina, si lointaines et si proches, sacrifiées comme tant d’autres sur l’hôtel du patriarcat.
Marco est un renard qui se pose plein de questions sur le vaste monde. Pourquoi les arbres de parlent pas ? Où va le soleil lorsqu’il disparaît dans l’océan ? Mais lorsqu’il pose la question à ses camarades renard, ceux-ci lui répondent : « mais quel est le rapport avec la blanquette de poulet que nous sommes en train de cuisiner ? »
En quête de réponses, et de sens à sa vie, Marco le renard s’embarque pour un voyage presque sans retour à bord du bateau-cerf. Pour compagnons, il aura un équipage drôlement constitué : des cerfs et des biches qui ne savent pas naviguer, des pigeons qui ont soif d’aventure mais ne savent pas travailler… que va trouver Marco au bout de son aventure ?
A travers cet album, Dashka Slater nous embarque dans une histoire erratique, qui balance le lecteur au gré des questionnements de Marco le renard et des aventures qu’il vit à bord du bateau-cerf. Le récit fait la part belle à l’amitié qui se noue entre les protagonistes : comment faire pour trouver un ami ? se demande Marco. L’histoire lui réponds de plusieurs manières : autour d’un repas, d’une aventure en commun, ou tout simplement en lui posant des questions…
Les illustrations des frères Fan nous rappellent une époque pas tout à fait révolue de la littérature jeunesse : celle d’un dessin assez réaliste, friande d’anthropomorphisme, fourmillant de détails. Les couleurs assez sombres, dans les tons gris / marron, donnent une ambiance mélancolique à l’histoire.
Nos trois auteurs nous offrent un album surprenant, onirique et philosophique, laissant de nombreuses questions ouvertes ; A charge au lecteur, petit ou grand, d’y apporter les réponses qu’il veut.
La naissance de Tom, le petit frère de Juliette, a profondément bouleversé le quotidien de toute sa famille. Tom, le petit rêveur, est né lourdement handicapé…
Subtil mélange de fiction et de faits réels, « Le petit astronaute » est un récit tendre et poignant. Au travers des souvenirs d’une adolescente, le sujet du handicap est abordé sans complexes, ni pathos. L’histoire de Tom, mais aussi de ses parents, dépeint la triste réalité des difficultés rencontrées par ces familles souvent abandonnées par la société. Tout est limpidement abordé, sans concessions. L’auteur parle de la souffrance des parents, de leur monde qui s’écroule d’un coup. Il dénonce le système qui n’offre pas suffisamment d’aide, de ressources pour soulager ces familles souvent démunies. La notion d’« acceptation » est très présente et est une des forces du récit : accepter son enfant, sa différence pour ensuite accepter le regard des autres, celui qui fait tant de mal.
Pourtant, après tout cela, ce que l’on ressent le plus une fois le livre refermé, est très certainement de la quiétude, car au final, nous avons vécu une pure et belle histoire d’amour.
Mallory, 15 ans, et son père se sont lancés un défi : faire ensemble l’ascension du mont Everest. Iels ont suivi une longue préparation en amont, notamment la montée du Qomolangma culminant à 8000 mètres. L’aventure commence dans le camp de base, au pied de la montagne, avec les différents allers-retours par palier afin d’acclimater le corps à l’altitude, à l’effort et au manque d’oxygène.
La jeune fille ne craint pas le vide ni les épreuves, mais elle ne se doute pas dans quoi elle s’est embarquée. L’expédition va lui réserver bien des surprises plus ou moins agréables.
« 8848 mètres » n’est pas uniquement la hauteur de l’Everest ou un roman sur la montagne et l’alpinisme, même si chaque étape de l’expédition est extrêmement bien documentée. Les personnages sont attachants et l’écriture fluide nous accroche à la cordée pour nous tenir en haleine tout au long de l’aventure.
L’autrice nous fait découvrir également l’autre facette du « Toit du Monde », les comportements de femmes et d’hommes peu scrupuleux·ses qui abandonnent leurs déchets, le travail des associations pour nettoyer et sensibiliser le public à l’écologie et au réchauffement climatique. C’est aussi une approche du bouddhisme et de la spiritualité. La confrontation à la mort est évoquée puisque chaque année des personnes périssent en montagne.
Silène Edgar nous offre un roman « vertigineux » , plein de courage, d’entraide et de persévérance.
En suivant la quête de Mallory, je suis passée par toutes sortes d’émotions. Je ressors de cette lecture avec des envies de défis et de sommets à atteindre.
A la récré, les enfants ne parlent que d’une chose : de la maîtresse qui a un bébé dans le ventre ! Comment est-ce possible ? Comment a-t-il fait pour arriver jusque-là ? Bien évidemment certains enfants ont déjà la réponse, même si leur histoire semble quelque peu éloignée de la réalité. D’autres connaissent mieux le sujet, mais il reste quelques interrogations. Lou, quant à elle, sait, même si pour elle, l’histoire est un peu différente, mais c’est sa vraie histoire… De nombreux albums parlent de la conception et/ou de la naissance d’un enfant. Très rares sont ceux qui traitent de la PMA, la procréation médicalement assistée. « Am Stram Graine » fait partie de ces derniers. Efficacement et sobrement, Anne-Catherine Le Roux explique aux enfants le mystère de la conception, mais en plus, elle raconte son histoire à travers les mots de cette petite fille. Sans grand discours et avec des mots simples, elle aborde une thématique qu’elle connaît par cœur et qui est souvent très mal connue, même du public adulte. Grâce à son récit, son témoignage, elle met des mots, des images et des sentiments sur un parcours qui peut s’avérer compliqué lorsque l’on souhaite un enfant. Elle parle également d’identité, qui on est vraiment ? Que veut dire être parent ? La filiation ? Elle donne matière à réflexion, mais plus que tout, Anne-Catherine Le Roux, donne des clés de compréhension et d’ouverture d’esprit. Elle est accompagnée dans sa tâche par Jules, illustratrice au trait épuré et aux couleurs chatoyantes, dont les planches sont aussi efficaces que le texte. Voici un album rare et incontournable pour combattre les préjugés et rendre le monde plus ouvert. - Michaël
Un lundi, un petit garçon trouve un tout petit ours polaire dans son jardin. Si petit qu’il tient dans sa main. Le mardi, le tout petit ours a un peu grandi : alors le petit garçon le dépose dans sa poche. Arrivé au mercredi, ne tient plus dans la poche : il est temps de ramener petit ours chez lui. Alors nos deux amis s’en vont faire un long voyage…
Tout petit ours est un album d’une très grande tendresse. Richard Jones signe une très jolie histoire d’amitié entre ce petit garçon et ce petit ours. L’amour qu’ils se portent l’un à l’autre les fait grandir tous les deux : l’ours grandit physiquement, et le petit garçon s’émancipe également. Même quand notre ours polaire aura atteint sa taille adulte, dépassant depuis longtemps le petit garçon, il restera « Mon tout petit ours ».
Les illustrations à la gouache ainsi que le choix des couleurs pastel appuient le propos très doux du récit. A travers les expressions du garçon et de l’ours, le lecteur saisit toute la force de la relation indéfectible qui lie les deux personnages.
« Il était si petit qu’il tenait dans ma main. Je sentais son cœur battre sous sa fourrure de nuage blanc. »